La ministre fédérale des Finances, Chrystia Freeland, a promis que son gouvernement atteindrait ses objectifs financiers dans le prochain budget, mais des économistes estiment que ce sera difficile, alors que le déficit augmente.
Dans un contexte de pression croissante pour freiner les dépenses gouvernementales, les libéraux ont dévoilé à l’automne de nouveaux « garde-fous budgétaires » visant à limiter les déficits. Le gouvernement promettait notamment que le déficit de cette année ne dépasserait pas 40,1 milliards de dollars (G$).
Dans de nouveaux rapports en prévision du budget fédéral, la TD et Desjardins proposent des points de vue un peu différents sur les chances que le gouvernement fédéral atteigne son objectif pour l’exercice en cours.
La TD affirme que même si le déficit semble se rapprocher des 55 G$, elle prévoit qu’il sera plafonné à 40 G$. « Je pense que le gouvernement a la capacité de le faire », déclare James Orlando, directeur des affaires économiques à la TD.
Par contre, Desjardins prévoit un déficit de 47 G$, ce qui n’est pas loin des prévisions du directeur parlementaire du budget publiées la semaine dernière.
« Lorsque nous examinons les informations publiées par le gouvernement, il semble que, pour l’exercice en cours, à moins d’une grosse surprise, il sera très difficile pour le gouvernement fédéral d’atteindre son objectif budgétaire », a estimé Randall Bartlett, directeur principal, Économie canadienne, chez Desjardins.
Les projections du directeur parlementaire du budget suggèrent que le déficit fédéral atteindra 46,8 milliards $ (1,6 % du PIB) pour l’exercice en cours, « en supposant qu’aucune nouvelle mesure ne soit prise et que les mesures temporaires existantes prennent fin comme prévu ». Selon le ministère des Finances, le déficit fédéral pour l’exercice en cours s’élevait à 23,6 G$ à la fin de décembre.
Le mois dernier, lors d’une conférence de presse en Pologne, la ministre Freeland a réaffirmé l’engagement de son gouvernement à respecter ses nouvelles règles de dépenses. « Pour notre gouvernement, il est très, très important d’investir dans le Canada et les Canadiens (…) et de le faire d’une manière responsable », a-t-elle déclaré. « Dans l’énoncé économique de l’automne, nous avons défini certaines orientations budgétaires et nous les respecterons. »
Le gouvernement souhaite également réduire le ratio dette/PIB en 2024-2025 par rapport aux projections de l’énoncé économique de l’automne, et à maintenir les déficits en dessous de 1 % du PIB à partir de 2026-2027.
Coût de la vie, logement, inflation
Le budget fédéral, que Chrystia Freeland doit présenter le 16 avril, arrive à un moment où les questions du coût de la vie continuent de dominer la politique canadienne et où les conservateurs maintiennent une bonne avance dans les sondages. Le gouvernement libéral a déjà indiqué que le budget se concentrerait sur les défis auxquels sont confrontés les jeunes — en particulier le logement.
On s’attend également à ce que ce budget contienne plus de détails sur le programme d’assurance médicaments récemment annoncé, qui promet de couvrir les contraceptifs et les médicaments contre le diabète. Mais le gouvernement fédéral a-t-il les moyens de se consacrer à ces priorités ?
James Orlando a déclaré que la TD prévoyait que le gouvernement disposerait d’une marge de manœuvre budgétaire d’environ 5 à 10 G$, qui pourrait l’aider à financer certaines de ses priorités.
« Cela signifierait que le gouvernement pourrait soit mettre en réserve cette somme d’argent et réduire le déficit budgétaire pour les années à venir, soit maintenir ses perspectives actuelles de déficit — et cela signifierait aussi qu’il dépenserait un peu plus d’argent. »
Les deux économistes rappellent que le gouvernement a bénéficié d’une croissance économique plus forte que prévu. Par contre, ils soulignent aussi que les dépenses de programmes et les frais de la dette publique ont augmenté plus rapidement que ce que le gouvernement avait prévu.
Même si ce pourrait être difficile, Randall Bartlett croit qu’il n’est pas impossible pour le gouvernement de trouver un moyen d’empêcher le déficit de dépasser la barre des 40 G$ cette année.
Par exemple, le gouvernement fédéral pourrait vendre des actifs, a-t-il suggéré. Il pourrait aussi y avoir des dépenses inutilisées, c’est-à-dire des fonds alloués aux ministères qui ne sont pas dépensés.
Mais l’économiste de Desjardins admet que cela ne représenterait pas de réelles économies. « Nous devons voir quelque chose à plus long terme, afin d’avoir une bonne idée […] s’ils atteignent un objectif budgétaire cette année, de la façon dont ils vont le faire l’année prochaine et comment ils vont continuer à le faire à l’avenir. »