Année après année, les répondants au Pointage des régulateurs sont des plus critiques face au fardeau de la réglementation que ces organismes leur imposent.
Les responsables de la conformité sondés accordent aux régulateurs des notes oscillant en moyenne entre 5,3 et 6,7 points sur 10, soit les plus faibles résultats, toutes catégories confondues.
Le graphique portant sur l’évolution de la note selon les catégories d’éléments évalués le montre avec éloquence. L’écart entre les notes octroyées aux éléments liés au fardeau de la réglementation et les autres catégories de critères évalués est au minimum de 0,6 point et il a même atteint 0,9 sur 10 en 2011 et 2012.
Les répondants justifient souvent ces notes par l’alourdissement du fardeau financier lié aux ressources consacrées à la conformité que diverses firmes de l’industrie doivent allouer, comme en témoignent ces commentaires : «J’ai deux adjoints en conformité, je trouve que ça en dit long» ou encore «La conformité coûte de plus en cher et elle est lourde. Il faut plus de communication et de formation, et non une multiplication des règles.»
L’élément qui a obtenu le résultat le plus faible est la sensibilisation des régulateurs aux préoccupations et aux problématiques des petites firmes. En moyenne, les répondants lui ont accordé 5,6 points sur 10 en 2016. Les commentaires à ce sujet témoignent des pressions et des enjeux pour les petits cabinets : «Nous avons la perception [que la réglementation] légitimise les grandes [firmes]qui ont plus de pouvoir et d’influence pour faire changer les règles que les petites firmes» ou encore «Je ne suis pas dans une petite firme, mais je constate que c’est un peu inégal. L’Autorité des marchés financiers (AMF) est plus sensibilisée aux grandes firmes».
D’ailleurs, à ce chapitre, la note accordée à l’AMF a baissé de manière notable par rapport au pointage de 2015, principalement celle des répondants en épargne collective, dont certains soulignent que le régulateur a un impact majeur sur leur survie.
«Lors des inspections, on dirait que les règles sont faites pour les grandes firmes», indique un répondant. «Les petites firmes sont rarement prise en compte lorsqu’il y a des changements dans la réglementation», dit un autre.
Les répondants accordent cependant l’importance la plus faible à la sensibilisation des régulateurs aux problématiques des petites firmes, soit 7,5 points sur 10. Ceux et celles qui assument des responsabilités en conformité sont d’avis que ce critère ne doit pas être la priorité des régulateurs, lui préférant la justesse et l’équité dans leur façon d’appliquer les règlements.
Si on observe les données du tableau, on constate que cet élément obtient en moyenne 8,8 points, une différence de 1,3 point par rapport à la sensibilisation des régulateurs aux problématiques des petites firmes.
Fermes, mais clairs
Entre 2010 et 2016, l’industrie des services financiers a connu de nombreux changements d’importance en matière de réglementation, dont la mise en place de la phase deux du Modèle de relation client-conseiller (MRCC 2) et les différentes modifications et obligations relatives au Règlement 31-103.
Avant d’instaurer de nouvelles règles et obligations, les régulateurs envoient plusieurs communiqués à ceux qui leur sont assujettis. Souvent, ils souhaitent avoir leur opinion sur un sujet.
Ce sont d’ailleurs sur les aspects relatifs à la communication que les régulateurs obtiennent leur meilleur résultat, et ce, pour tous les secteurs d’emploi sondés.
Les répondants jugent que les règles sont claires, accordant à cet élément la deuxième note moyenne la plus haute, soit 7,8 points sur 10.
Cependant, par rapport à 2015, les répondants ont accordé cette année une note plus faible à l’AMF concernant l’efficacité de son processus de consultation. «Sentir que l’AMF a une volonté réelle de consulter l’industrie serait bienvenu», dit un répondant. «Étant une petite firme, on est souvent négligé. Les consultations passent trop vite et on n’a pas assez de temps pour s’exprimer», ajoute une autre personne sondée.
À la suite d’un processus de consultation, le régulateur applique un nouveau règlement. La fermeté avec laquelle les régulateurs décident de faire respecter les règles est l’autre critère où ils excellent, d’après les résultats.
«Ils sont fidèles à la réglementation, donc c’est rassurant», souligne un répondant. En moyenne, les régulateurs obtiennent une note de 8 points, soit le critère ayant la meilleure moyenne en 2016.
Cependant, certains répondants aimeraient que les organismes de réglementation soient plus souples. «Certaines sanctions semblent disproportionnées. Il est clair qu’il faut sanctionner les fraudes, mais les fautes administratives pourraient l’être moins lourdement», explique l’un d’entre eux.
Lente adaptation aux fintech
Par ailleurs, en comparaison avec le pointage de l’an dernier, la Chambre de la sécurité financière (CSF) affiche une note plus basse par rapport à l’équité et à la compétitivité des frais imposés par le régulateur. «Les frais imposés sont trop chers par rapport à ceux des autres provinces», dit un répondant. Un autre affirme : «Je ne pense pas que les frais des institutions sont exorbitants, compte tenu du contexte».
Pour son septième Pointage des régulateurs, Finance et Investissement a ajouté deux nouveaux éléments, après avoir reçu une rétroaction de l’industrie. Il s’agit de l’aisance du régulateur à utiliser une technologie convenable dans ses communications avec l’industrie et de la rapidité du régulateur quand il s’agit d’adapter le cadre réglementaire aux changements technologiques de l’industrie. Les répondants ont jugé plus sévèrement les régulateurs sur ce dernier critère (Voir le texte «Lente évolution techno des régulateurs», en page 27).
Méthodologie
Le Pointage des régulateurs 2016 a été réalisé à partir d’entrevues téléphoniques menées par notre sondeuse, Lola Mirkhusainova. Les appels ont été effectués entre le 5 janvier et le 5 février 2016. Les 124 personnes sondées sont issues du secteur de l’assurance de personnes (43), de l’épargne collective (42) et des valeurs mobilières (39). Elles ont été sélectionnées dans notre liste d’abonnés. Tous les répondants au sondage assumaient des responsabilités en conformité. Ainsi, seulement des directeurs de succursale, des responsables de la conformité au sein des cabinets et des dirigeants de firmes ont été interrogés. Lors des entrevues téléphoniques, nous avons insisté auprès des répondants sur le caractère confidentiel et anonyme de leurs réponses, et ce, afin de garantir un maximum de transparence. Frédéric Roy a colligé les données obtenues et les a analysées.