Si les deux produits diffèrent au point de vue financier, ils apparaissent très similaires au yeux du consommateur, selon Michel Mailloux, planificateur financier et président de Déontologie.ca. «Les clients perçoivent surtout qu’il y a des fonds communs garantis d’un côté, et de l’autre, des fonds communs ordinaires. Ce qui est imposé aux uns doit aussi l’être aux autres. Pour moi, il est clair que tous doivent patiner sur la même patinoire», dit-il.
Exclus des deux premières phases du Modèle de relation client-conseiller, les fonds distincts pourraient bien faire l’objet d’un éventuel MRCC 3 si l’on en croit les consultations en cours en vue d’harmoniser la règlementation dans les deux secteurs.
L’écart réglementaire entre les fonds communs et les fonds distincts fait l’objet d’une analyse du Conseil canadien des responsables de la règlementation d’assurance (CCRRA), qui souhaite rehausser les exigences de divulgation en matière de rémunération et de rendement pour les fonds distincts.
Le CCRRA recommande notamment qu’à l’instar des Organismes de placement collectifs (OPC), les sociétés d’assurance soient tenues de faire connaître tous les frais que paie le titulaire du compte.
À ce titre, le CCRRA propose même d’aller plus loin que le MRCC 2, dans lequel la divulgation de l’ensemble des frais de gestion avait d’abord été réclamée pour être rejetée en cours de route. «En fin de compte, c’est le client qui paie tout ça, alors disons-le-lui ! Je ne vois pas comment on pourrait s’opposer à ça», dit Maxime Gauthier, chef de la conformité et représentant en épargne collective de Services financiers Mérici.
Son avis est partagé par l’Association canadienne des compagnies d’assurance de personnes (ACCAP), qui pense que l’industrie des fonds communs et celle des fonds distincts devraient collaborer pour mettre en oeuvre la divulgation de l’ensemble des frais de gestion, et non seulement ceux liés à la distribution dans les relevés fournis aux clients.
La divulgation du rendement présente plus de problème. Le CCRRA recommande qu’il soit tenu compte des dépôts et des retraits faits dans le compte du client, de la variation de la valeur du compte et du taux de rendement total annualisé pondéré en dollars pour des périodes de 1, 3, 5 et 10 ans.
L’ACCAP souhaite que les assureurs puissent adapter ces rapports aux besoins de leurs clients. «Un client qui a un fonds distincts qui paie une garantie de retrait ne sera pas intéressé par les mêmes informations qu’un autre qui a choisi un certain nombre d’options de placement dans un contrat d’assurance individuelle en cas de décès. Les assureurs devraient continuer d’avoir la flexibilité de faire un rapport pondéré dans le temps ou pondéré en dollars», note l’ACCAP dans son rapport remis au CCRRA. L’Association s’inquiète d’un système prévoyant une divulgation excessive, qui finirait par créer plus de confusion.
L’une des craintes des régulateurs est que les représentants soient tentés d’orienter leurs clients vers l’achat de fonds distincts, sans égard à leurs véritables besoins, simplement parce que ceux-ci sont moins réglementés que les fonds communs de placement.
Les Autorités canadiennes en valeurs mobilières (ACVM) ont abordé cette question d’arbitrage réglementaire dans le document de consultation 33-404 sur la norme fiduciaire.
«Si un représentant également assujetti à d’autres régimes de réglementation, applicables notamment aux assurances ou aux banques, recommande à un client d’investir dans un produit financier autre qu’un titre, par exemple un fonds distinct, et que le client peut raisonnablement supposer qu’il envisageait de placer des titres, le représentant doit être en mesure de démontrer qu’il a géré le conflit découlant du fait qu’il détient deux permis», peut-on y lire.
Dans un mémoire déposé dans le cadre de la consultation du CCRRA, l’Institut des fonds d’investissement du Canada (IFIC) appuie l’idée de fournir aux acheteurs de fonds des rapports de rendement de compte équivalents à ceux requis pour les fonds communs de placement dans le cadre du MRCC 2. «Le rapport couvrirait la performance de la police. Cette mesure aiderait les investisseurs à comprendre la nature du produit qu’ils ont acheté», peut-on lire dans le document.
Au 31 mars 2015, les actifs sous gestion dans les fonds distincts s’élevaient à 113,1 G$. C’est bien peu en comparaison avec les plus de 1 000 G$ d’actifs totaux investis dans les fonds communs. Or, les ventes de fonds distincts ont augmenté de 16,8 % du 31 mars 2014 au 31 mars 2015, selon Investor Economics. Les ventes de FCP ont augmenté de 12,4 % pour la même période, selon les statistiques de l’IFIC.