Les noms de poste et les divers contenus vont sans doute varier d’une firme à l’autre, ce qui risque de créer de la confusion, croit Maxime Gauthier, chef de la conformité et représentant en épargne collective chez Mérici Services Financiers. Selon lui, ce «fouillis terminologique» risque de dérouter autant les courtiers que les clients.
«On voit beaucoup de points d’écueil et on craint qu’une règlementation supposée apporter de la clarté et de la transparence crée en fait beaucoup de confusion», dit-il.
La part du conseiller exclue
Divers montants sont exclus du relevé de frais. Par exemple, on n’y trouve pas la rémunération spécifique du représentant, mais seulement celle du courtier. «L’information la plus cruciale pour le client tient à son coût réel total, pas la part du conseiller, qui est incluse dans la rémunération du courtier», fait ressortir Radek Loudin, chef de la conformité chez Valeurs mobilières Desjardins.
Le but du MRCC 2, c’est que le client soit informé de la rémunération totale de la firme, et qu’il sache ce que lui coûte sa relation au courtier, selon Sylvain Théberge, directeur des relations médias à l’Autorité des marchés financiers (AMF). «Le client doit savoir s’il en a eu pour son argent. Si la part du représentant n’a pas à être dévoilée, c’est parce qu’on considère qu’il s’agit d’une relation contractuelle privée entre lui et sa firme. Par contre, si le courtier le juge à propos, il peut la dévoiler», dit-il.
Enfin, les frais de gestion des organismes de placement collectif (OPC) ne paraissent pas non plus dans le relevé. Tout d’abord, c’est parce que ces frais ne s’inscrivent pas dans la relation courtier-client. Ensuite, le calcul que doit faire l’OPC pour établir ces frais tient compte de plusieurs variables dont les montants et les flux varient dans le temps, ce qui rend difficile la divulgation, note Sylvain Théberge.
Calcul du rendement
Dans la plupart des cas, le rapport des frais et le rapport du rendement des fonds seront combinés. Un aspect controversé et qui mérite éclaircissement est la méthode du calcul du rendement. Deux méthodes se sont affrontées : un calcul du rendement pondéré en fonction des flux de trésorerie, et un autre, pondéré en fonction de la durée. Chaque méthode produit des résultats très différents.
Les autorités de règlementation ont retenu la première méthode, car elle reflèterait plus justement le rendement réel du fonds. «La méthode en fonction de la durée ne donne pas le rendement des fonds d’un client, mais le rendement du gestionnaire de ces fonds», dit Sylvain Théberge.
Il cite l’exemple d’un client qui a versé 50 000 $ dans un compte sur une période de cinq ans à raison de 10 000 $ par an. À la cinquième année, en raison de rendements annuels de 12 %, 10 %, 6 %, 8 % et – 25 %, il n’y a plus que 44 209 $ dans le compte.
Selon la méthode des flux de trésorerie, qui tient compte des entrées et des sorties d’argent, le rendement annualisé moyen est négatif (- 4,08 %), alors que la méthode en fonction de la durée donne plutôt un rendement positif de 1,13 % !
Dans la cour des grands
Les courtiers oeuvrant à l’intérieur de grands groupes financiers ne touchent pas des commissions, mais plutôt des paiements de transfert internes provenant de sociétés affiliées. Comment doivent-ils rendre compte de leur rémunération ?
Un document de l’Association canadienne des courtiers en fonds mutuels (ACCFM) précise que «Le membre qui reçoit des paiements de transfert au lieu de commissions doit faire une estimation raisonnable du montant qu’il aurait reçu s’il avait gagné une commission. Par exemple, il peut fonder son estimation sur la rémunération qu’un courtier tiers aurait touchée pour la vente des mêmes produits ou de produits similaires».
Chez les courtiers indépendants, on craint que les banques et les institutions financières, en raison de leurs structures à multiples filiales, soient en mesure de dissimuler ou d’amenuiser les frais apparaissant sur le rapport. (Voir l’encadré Les banques aussi devront divulguer leurs frais, en page 11.)
Dans l’âpre compétition qu’ils se livrent pour acquérir de la clientèle, ces grands acteurs pourraient peut-être tricher pour gagner un avantage déloyal.
«L’AMF nous dit que, s’il y a des écarts, elle va réagir», dit un représentant en épargne collective qui préfère garder l’anonymat. «Mais le temps de réaction d’une grosse boîte comme l’AMF n’est pas de cinq minutes. Si elle ne réagit que dans trois ou quatre ans, les banques auront déjà fait leurs gains de marketing.»
«On ne va pas essayer de masquer des rémunérations, affirme Radek Loudin. On demande à nos représentants d’être transparents. On joue la carte de la transparence.»
Pour Sylvain Théberge, les appréhensions des réseaux indépendants sont «sans fondement». Le MRCC 2 ne concerne pas les banques, mais leurs filiales de courtage et, quand c’est indiqué, leurs filiales de gestion de fonds. «Ces groupes sont conscients qu’on les surveille, dit le porte-parole de l’AMF. Si la rémunération de la firme de courtage de la Banque Nationale passe à 20 % alors qu’elle était de 42 %, on va poser des questions à Placement Banque Nationale.»
Avant même la production du premier rapport, l’AMF entend demander aux banques un rapport authentique, de façon à prévenir toute dissimulation des frais.