Gracieuseté

«Je ne voulais pas cela. J’avais le goût de proposer un modèle où l’on est fier de ses valeurs coopératives», dit Guy Cormier, président et chef de la direction du Mouvement Desjardins.

Guy Cormier sentait qu’après la crise financière de 2008-2009, les exigences supplémentaires en matière de gestion des risques et d’obligation de capital avaient détourné l’attention : «Nous répondions à tellement d’attente par rapport [aux exigences] que nous avons peut-être oublié qu’il y a un membre, un client, là-dedans.»

Son but premier : rebrancher Desjardins à ses sept millions de membres et de clients au Canada. Depuis, Guy Cormier a agi en fonction de sa vision, soit que Desjardins assume son rôle d’agent socioéconomique et d’influenceur direct dans la société.

La coopérative a lancé un Fonds de développement de 100 M$, distribué sur trois ans au Québec et en Ontario, qui appuie des projets socioéconomiques et communautaires de la région.

Elle a aussi créé, en octobre 2017, le fonds de capital de risque Desjardins Capital PME, qui représente un engagement de 500 M$ sur les cinq prochaines années. Ce fonds vise à investir directement dans les petites et moyennes entreprises (PME) du Québec, sous la forme de capital-actions ou de dette subordonnée d’un montant variant entre 100 000 $ et 10 M$. La structure, issue d’un partenariat entre Gestion privée Desjardins et Capital régional et coopératif Desjardins, permet à des clients de gestion privée d’avoir accès à cette catégorie d’actif.

L’institution financière a créé, avec la Caisse de dépôt et placement du Québec, un fonds d’investissement de 50 M$ entièrement destiné aux fintechs et à l’intelligence artificielle appliquée à la finance. «Il s’agit de trois fonds où concrètement et rapidement nous sommes capables de montrer que Desjardins veut exercer plus de leadership ici», explique Guy Cormier.

Restructuration

Lorsqu’il est entré en fonction en 2016, Guy Cormier a amorcé une revue des activités de la coopérative, sentant qu’elle pouvait réduire ses coûts. Plus d’une centaine de postes de cadres (directeurs, directeurs principaux et vice-présidents) ont été abolis.

En février 2017, Desjardins a vendu Western Financial Group (WFG) pour environ 775 M$ à Wawanesa, soit un gain net de 258 M$, selon ses résultats au troisième trimestre de 2017. Après l’avoir acquis en 2011 au coût de 443 M$, la coopérative trouvait que le rendement de l’investissement n’avait pas été à la hauteur.

«Nous voulions mettre nos billes dans State Farm, notre dernière acquisition», souligne le président, expliquant que l’intégration se déroule bien et qu’en 2018, l’enseigne des quelque 500 agences sera changée et portera le logo de Desjardins.

Avec la vente de sa filiale et sa restructuration, Desjardins a obtenu des résultats positifs pour les neuf premiers mois de 2017. Au 30 septembre, elle a enregistré des excédents avant ristournes aux membres de 1 722 M$, par rapport à 1 263 M$ pour la même période correspondante de 2016. Si on exclut le gain réalisé en raison de la vente de WFG, les excédents rajustés avant ristournes ont augmenté de 16,3 % pour les neuf premiers mois de 2017 par rapport à la même période de 2016.

«Guy Cormier a mené toute une réorganisation depuis son arrivée en poste, et ce, en peu de temps. Il a aussi une vision claire de là où il s’en va et il essaie de faire bouger des choses chez Desjardins tout en préservant le statut de coopérative de l’institution», a déclaré le jury du Top 25.

«Nous soulignons que les résultats sont bons, dans les normes de Desjardins, et le fait qu’il a eu une prise en charge rapide de ses fonctions», ajoute le jury.

Desjardins souhaite au minimum maintenir ses parts de marché en 2018. Dans le secteur bancaire, l’institution financière se concentrera sur la grande région de Montréal et sur les jeunes pour augmenter ses parts de marché. Plus de 125 M$ ont été investis dans les dernières années à Montréal et plus de 10 nouveaux points de service ont vu le jour, démontrant le sérieux de la démarche de l’institution, selon Guy Cormier.

Alors que 350 000 entreprises ont un lien d’affaires avec la coopérative, Desjardins veut se concentrer sur celles de taille moyennes et trouver une manière de lier les entreprises ensemble.

Pour le moment, la part de marché de Desjardins concernant les prêts commerciaux au Québec est de 23 % ; elle est de 40 % dans le secteur agricole, et le président veut augmenter ces deux parts de marché à court terme.

Des annonces sont d’ailleurs prévues en 2018 sur le plan du capital de risque «pour aider les entreprises qui voudraient prendre des risques à l’étranger, en Europe, dit Guy Cormier. Desjardins va vraiment être là pour les accompagner».

Desjardins s’appuiera sur son concept de caisse/assurance comme avantage concurrentiel afin d’occuper davantage de place en gestion de patrimoine au Canada.

La coopérative peut vendre de l’assurance dans ses succursales, ce qui n’est pas le cas des banques. Guy Cormier revoit l’offre d’assurances dans les caisses, afin d’être proactif et plus efficace : «Nous avons les produits, plusieurs réseaux de distribution, du capital amplement. En raison du vieillissement de la population et de l’enrichissement comme tel, le marché est très porteur pour nous.»