L’assurance vie permanente a le vent dans les voiles dans les affaires des conseillers en sécurité financière, d’après le sondage mené à l’occasion du Baromètre de l’assurance.
Près d’un conseiller sur trois (31,1 %) qui ont répondu au sondage considère la vie permanente comme le type de produit d’assurance de personnes dont la croissance récente a été la plus forte dans ses affaires. En 2018, seulement 22,9 % des conseillers étaient de cet avis.
Parallèlement, les produits d’assurance vie temporaire tiennent une place moins importante. Cette année, 31,9 % des conseillers ont signalé que l’assurance vie temporaire était le type de produit ayant enregistré la plus forte croissance. En 2018, la proportion se situait à 34,3 %.
Le sondage reflète, au moins partiellement, les phénomènes de vieillissement de la population et d’enrichissement relatif des consommateurs plus âgés, selon Louis-Charles Leclerc, directeur, produits d’assurance chez iA Groupe financier : «Ces clients peuvent se permettre d’acheter des produits d’assurance vie permanente, plus coûteux que les temporaires, en raison des valeurs de rachat ainsi que de leurs besoins de transmission d’héritage et de couverture d’impôts au décès .»
Par ailleurs, la moyenne d’âge des conseillers ne diminue pas. Cela joue-t-il un rôle ? «Les conseillers ont généralement des clients qui leur ressemblent. Par exemple, on ne verra pas souvent des conseillers de 58 ans ayant des clientèles de la génération du millénaire», poursuit Louis-Charles Leclerc.
«La moyenne d’âge relativement plus élevée des conseillers fait qu’ils sont portés à vendre davantage d’assurance vie permanente à des clients plus âgés», ajoute Simon Girard, leader du Centre d’excellence pour les services en assurance et en actuariat d’EY.
Parmi les répondants qui vendent davantage de vie permanente, bon nombre soulignent la spécificité de leurs clientèles sur le plan démographique.
Par exemple, l’un d’entre eux écrit : «ma clientèle est près de la retraite et elle est aisée». Un autre, qui semble occuper un poste de direction, dit : «on a de plus en plus de conseillers qui travaillent avec des personnes plus âgées. Leurs besoins font qu’ils délaissent l’assurance temporaire pour l’assurance permanente». Un troisième répondant estime qu’«une population vieillissante opte plus souvent pour ce type de produit».
Simon Girard propose une explication supplémentaire : le fait que ce type de police peut incorporer d’autres protections, par exemple l’assurance maladies graves. «Plus fortunés que la moyenne, les acheteurs d’assurance vie permanente pourraient vouloir combler plus d’un besoin par l’entremise d’un seul produit», signale-t-il.
Tous les connaisseurs interviewés mettent en garde contre l’idée d’une correspondance automatique entre l’âge des conseillers et leurs clientèles. Beaucoup de jeunes conseillers attaquent le marché de l’assurance permanente.
«De nombreux jeunes conseillers s’entourent d’équipes multidisciplinaires afin de rejoindre les clientèles plus aisées. L’assurance vie permanente ne leur échappera pas», signale Guy Couture, chef de la mise en marché, produits d’assurance individuelle à la Financière Manuvie.
Les répondants spécialisés en assurance vie temporaire signalent, eux aussi, l’effet de la démographie.
«La temporaire progresse parce que je fais affaire avec des jeunes couples souscrivant à des prêts hypothécaires. Ce produit est plus abordable», signale un conseiller. «J’ai une clientèle assez jeune», précise un autre. «Les milléniaux ne prennent pas d’assurance vie permanente et de maladies graves», affirme un troisième.
Ces commentaires ne surprennent pas David Benamron, directeur exécutif des ventes, marchés avancés à la Financière MSA : «Les moyens financiers des jeunes clients sont plus limités. Ils peuvent être à la tête de jeunes familles. Par contre, beaucoup sont aussi de gros consommateurs et il leur reste peu de dollars à la fin du mois. Ils ont conscience de leurs besoins d’assurance, mais ayant peu d’argent disponible, ils favorisent l’assurance temporaire.»
Bien vivantes, les temporaires
Compte tenu de leurs habitudes de consommation et de leurs emplois parfois précaires, les gens de la génération du millénaire graviront-ils le chemin menant aux produits d’assurance vie permanente ? En ont-ils tout simplement envie ?
Telles sont les questions que pose Robert Landry, consultant en services financiers et ex-vice-président exécutif d’AXA Canada. Les ventes d’assurance vie permanente individuelle ont globalement décliné en proportion du capital décès total des polices de l’ensemble des Canadiens, passant de 26 % à 24 % de 2007 à 2017, observe-t-il. Quant à elles, les ventes d’assurance vie temporaire individuelle ont progressé, passant de 29 % à 37 % pendant la même période, d’après un document de l’Association canadienne des compagnies d’assurances de personnes (ACCAP).
«Comment expliquer la popularité accrue des temporaires, sinon par les comportements d’achats de la génération du millénaire ? Car le phénomène de vieillissement de la population ne date pas de 2018 ou de 2019», dit Robert Landry.
Le consultant évoque également la situation des assureurs par rapport à leurs objectifs de rentabilité : «Les exigences en capital des produits d’assurance vie permanente sont très élevées et cela influe sur la rentabilité des assureurs. Rien ne dit que les produits d’assurance vie permanente seront éternels… d’autant plus que la génération du millénaire risque de ne pas avoir les moyens financiers de s’en procurer !»
Moyenne des résultats à la question : «Quel type de produit connaît la plus forte croissance dans vos affaires ?»
Assurance vie temporaire 31,9 %
Assurance vie permanente 31,1 %
Maladies graves 20,2 %
Invalidité 11,8 %
Assurance collective de personnes 5,0 %
SOURCE : Baromètre de l’assurance 2019 Tableau : finance et Investissement