La planification de la retraite est un exercice complexe qui utilise de multiples variables et hypothèses. Ce grand nombre d’éléments possède un potentiel d’erreurs ou d’exagérations qui pourront s’additionner et produire des résultats fâcheux.
Voici un aperçu de ces erreurs communes. Notons toutefois qu’il ne s’agit pas nécessairement d’une liste exhaustive.
Excès d’optimisme
Qu’il s’agisse d’un excès d’optimisme en ce qui a trait à sa propre capacité ou discipline future d’épargne, à l’évolution de son salaire, à la durée de sa carrière, à sa capacité future à rembourser ses dettes, le fait de surévaluer une ou plusieurs de ces hypothèses aura pour effet de gonfler artificiellement les résultats de l’analyse.
En ce qui concerne la capacité d’épargne (y compris le remboursement de dettes) et la discipline, il arrive que des plans de retraite tablent sur une épargne future démesurée. Combien de particuliers mettent l’accent sur le remboursement de dettes et reportent par exemple l’épargne après le paiement complet de l’hypothèque ? Ce plan n’est pas nécessairement mauvais, mais il existe un petit risque qu’une fois l’hypothèque totalement remboursée, le particulier soit tenté de s’accorder un bref répit de quelques mois qui pourrait se transformer en quelques années.
Quant à la durée de la carrière, plusieurs situations pourraient la raccourcir involontairement : maladie, perte d’intérêt envers son travail, fatigue généralisée, expertise qui devient obsolète, vague de mises à pied, fermeture d’entreprise, etc. Il n’est donc pas dit que tous les clients auront le loisir de choisir le moment où ils mettront fin à leurs activités professionnelles. Si une part significative des revenus de retraite provient de l’employeur, une retraite involontaire hâtive pourrait également avoir des conséquences fâcheuses sur le plan établi.
Inflation
Ne pas considérer l’inflation dans un plan de retraite peut s’avérer catastrophique. Certains plaideront qu’elle est relativement faible de nos jours, ce qui est par ailleurs vrai, mais à long terme, l’inflation cumulative va assurément gruger le pouvoir d’achat du retraité. Aux fins de projections à long terme, les Normes de l’Institut québécois de planification financière (IQPF) établissent actuellement l’hypothèse d’inflation annuelle à utiliser à 2,1 %. Sur une période de 30 ans, une durée que les plans de retraite dépassent fréquemment, l’inflation cumulative sera de 86,5 %. Ne pas tenir compte de ce facteur enlève toute crédibilité à une telle projection.
Surestimation des rendements
Qu’il s’agisse de surestimer les performances futures des marchés financiers, la valeur ajoutée qu’un gestionnaire spécifique pourra procurer à long terme ou de sous-estimer les frais de gestion, dans tous les cas, un tel optimisme quant aux rendements futurs nets gonflera artificiellement les résultats de l’analyse. N’hésitez pas à consulter et utiliser les Normes d’hypothèses de projection de l’IQPF à cet effet.
Outil d’épargne inapproprié
Quoique le REER s’avère souvent intéressant pour financer la retraite, il y a de très nombreuses situations où cet outil ne sera pas optimal. Si l’on a de jeunes enfants, le REEE pourrait se révéler drôlement plus efficace. En présence d’options d’épargne subventionnées chez son employeur (régime de retraite avec option de cotisations volontaires ou volet flexible, ou régime d’achat d’actions), il est fort possible que l’épargne par l’intermédiaire de ces régimes soit plus performante. En cas de divorce imminent, proscrivons idéalement l’utilisation du REER. Enfin, de nombreux particuliers auront droit tôt ou tard au Supplément de revenu garanti (SRG). Pour ces derniers, une épargne dans un CELI sera fréquemment beaucoup plus profitable.
Revenu trop intégré à 75 ans (ou à un autre âge)
Beaucoup de particuliers tablent sur le fait que, passé un certain âge (75 ans, par exemple), la nature des dépenses changera. C’est fort probablement vrai. Est-ce à dire que les besoins de revenus vont grandement diminuer ? Pas nécessairement. Compter sur une trop forte diminution des revenus à un certain âge implique possiblement de vivre artificiellement en dépensant trop avant cet âge.
Espérance de vie
Bâtir un plan de retraite qui table sur l’épuisement des capitaux à l’espérance de vie équivaut à bâtir un plan qui n’a que 50 % de probabilités de tenir la route. En effet, 50 % des particuliers devraient dépasser leur espérance de vie (certains de beaucoup). Pour le particulier dont l’état de santé est normal, il semble plus prudent d’utiliser la durée raisonnable de décaissement, qui dépasse habituellement de quatre à cinq ans l’espérance de vie (voir les Normes de l’IQPF).
Anticipation ou report automatiques des prestations gouvernementales
Quand vient le temps d’établir le moment opportun pour commencer à toucher les prestations du Régime de rentes du Québec (RRQ) ou de la Pension de la sécurité de la vieillesse (PSV), de nombreuses variables devraient être considérées (état de santé, évolution des revenus et des taux d’imposition, période de cotisation au RRQ, présence d’autres actifs, etc.). Le nombre de variables est tel qu’une réponse universelle n’existe pas. Une analyse et des simulations devraient être effectuées.
En conclusion
Nous avons présenté ici quelques-unes des erreurs fréquentes en planification de la retraite. Force est d’admettre que des conseils adéquats durant cet exercice apporteront assurément de la valeur aux particuliers !
* a.s.a., Pl. Fin., M. Fisc., président, ConFor financiers inc.