Depuis de nombreuses années, des fonds distincts, offerts par les assureurs, ont la faveur de certains clients qui cherchent la sécurité. Mais à quel prix ?
Tout d’abord, je désire remercier Jean Grégoire, directeur, gestion des risques et stratégies d’assurance chez SFL Gestion de patrimoine, pour sa précieuse collaboration à ce texte.
Il faut comprendre qu’un fonds distinct possède plusieurs points communs avec un fonds commun de placement. Notre objectif ici n’est pas de comparer les deux produits, mais plutôt de faire la lumière sur l’utilité des fonds distincts et certaines de leurs caractéristiques.
Le point essentiel des fonds distincts est qu’ils comportent une garantie de capital qui est appliquée soit du vivant, soit au décès. Toutefois, cette garantie a un coût, lequel s’exprime en pourcentage d’augmentation des frais de gestion. On parle, par exemple, d’une fourchette s’établissant souvent de 0,9 à 1,2 point de pourcentage de plus que les frais standards comparables sans garantie.
Par exemple, si les frais sont à la base de 2,8 %, une garantie de 1,2 % les fera grimper à 4 % par année. Cela signifie ainsi que les premiers 4 % de revenus de placement servent à payer les gestionnaires et autres frais. On comprend donc que le rendement des fonds distincts est directement «amputé» de ces frais de garantie.
Lorsque le fonds atteint un certain solde (qui varie selon les assureurs), beaucoup d’assureurs offrent une réduction des frais. Cette réduction varie selon la catégorie d’actif. Par exemple, elle peut être de 0,25 % pour le marché monétaire et de 0,80 % pour les actions canadiennes.
Valeur garantie
Les fonds distincts offrent tous une garantie de capital basée sur un montant de référence. Ce montant de référence s’appuie sur le solde du compte à une date d’évaluation donnée. À la date d’évaluation suivante, souvent trois ou cinq ans plus tard, la valeur garantie par les assureurs offrant cette option ne peut être inférieure à ce qu’elle était précédemment, même si le fonds a perdu de la valeur. Évidemment, l’impact des retraits doit être considéré dans les calculs.
Ces évaluations sont importantes, car elles fixent le montant de référence sur lequel les différentes garanties sont basées. Donc, en l’absence de retraits, le montant de référence est égal ou supérieur à celui établi lors de l’évaluation précédente.
En cas de décès, le montant minimal garanti est habituellement de 100 % du montant de référence, et en cas de retrait ou à l’échéance, le pourcentage est souvent moindre, par exemple 75 %.
Le choix de placements, à l’intérieur des fonds distincts, est également plus restreint que celui des fonds communs. Il faut comprendre qu’un assureur s’engage à garantir un capital dans la mesure où ce dernier n’est pas investi de façon trop agressive. C’est pourquoi on limitera souvent le risque à celui d’un profil modéré.
Or, quelle est la probabilité pour un fonds à profil prudent ou modéré de perdre plus de 25 % de sa valeur ? Faible. Cette probabilité vaut-elle la peine de payer les frais supplémentaires ? Oui, pour certains clients très peu tolérants au risque.
En phase d’accumulation, des bonis peuvent venir créditer le solde du compte. Ces bonis ne sont ni plus ni moins qu’une sorte de remboursement de frais.
Revenu minimal annuel
Beaucoup de fonds distincts offrent un «revenu» minimal garanti à vie. Ce revenu garanti ne doit pas être confondu avec celui d’une rente viagère. Ce ne sont pas les mêmes bases de calcul.
Par exemple, un fonds distinct peut offrir une garantie de revenu minimal annuel de 4 % du montant de référence à compter de 65 ans. Plus on commence les retraits tard, plus le pourcentage est élevé. Par exemple, à 70 ans, le retrait minimal garanti pourrait être de 4,5 %.
Il ne s’agit pas d’une garantie de rendement de 4 % par année, contrairement à ce que croient certaines personnes. À 65 ans, un retrait garanti de 4 % nous indique simplement que, si ce retrait est effectué pendant 25 ans, le rentier aura retiré l’équivalent de son capital… à 90 ans.
Une rente viagère, quant à elle, procurerait peut-être l’équivalent de 5 % de son capital.
On peut représenter la mécanique de calcul d’une rente viagère un peu comme si on versait, chaque année, tout le rendement réalisé pendant l’année en plus d’une certaine partie de capital qui s’épuiserait selon l’espérance de vie.
Par ailleurs, la fiscalité d’un fonds distinct non enregistré est moins complexe que celle d’une rente non prescrite, mais plus complexe que celle d’une rente prescrite qui nivelle le revenu imposable.
Lorsque les distributions du fonds sont réinvesties, elles augmentent le prix de base rajusté (PBR) de chaque unité et, par la suite, lorsque le retrait a lieu, c’est un calcul de PBR proportionnel, comme dans le cas des fonds communs, qui s’applique.
Rendement supérieur possible
Alors, finalement, pourquoi opter pour un fonds distinct plutôt que pour une rente viagère ?
C’est une question de flexibilité et de possibilité de réaliser un rendement supérieur au taux «gelé» d’une rente viagère.
Il faut comprendre qu’on peut effectuer des retraits variables dans un fonds distinct. Le revenu minimal garanti s’ajuste en conséquence si un retrait (supplémentaire au retrait minimal prévu) a été effectué.
De plus, si le fonds réalise un rendement supérieur, particulièrement juste avant une période d’évaluation, le retrait viager prévu peut être haussé.
Certains clients qui souhaitent couvrir leurs dépenses de base peuvent trouver les fonds distincts attrayants en raison de ces éléments. Mais pour la plupart des investisseurs au profil prudent, la rente viagère donne souvent de meilleurs résultats. L’important, encore une fois, est de présenter les possibilités à votre client, en expliquant les avantages et les inconvénients de chaque produit, afin qu’il puisse prendre une décision éclairée.
*Directeur planification financière et optimisation fiscale, SFL Expertise