C’est la question que devait trancher la Cour d’appel du Québec dans l’arrêt Procureure générale du Québec c. Groupe Hexagone (2018 QCCA 2129). Le document dont on demandait la communication consistait en un rapport préparé conjointement par l’ingénieur qui était surveillant du chantier et par une ingénieure surveillante adjointe. Ce rapport avait été utilisé dans le cadre de procédures administratives de traitement de réclamations selon un processus de règlement de différends.
Le processus de règlement de différends en cause impliquait la négociation afin de permettre aux parties de régler un litige sans avoir à recourir aux tribunaux.
Les échanges entre parties qui tentent de régler un différend sont protégés par le privilège relatif aux règlements. Ce privilège vise à empêcher que soit invoqué devant un tribunal un document communiqué dans le cadre de discussions de règlement.
Cependant, un document qui ne peut être produit ou invoqué devant un tribunal peut-il néanmoins être communiqué à la partie adverse dans le cadre d’un litige ? À cette question, la Cour d’appel répond oui en s’appuyant sur la nouvelle culture judiciaire que prônent le législateur et les tribunaux.
Selon cette nouvelle culture judiciaire, la coopération, la transparence et la célérité doivent être encouragées par les parties.
Ainsi, se fondant sur cette nouvelle culture, la Cour d’appel est d’avis que ledit document peut faire l’objet de communication au préalable, même si ledit document ne peut pas être admissible au fond lors d’un procès.
Confirmant le jugement de première instance, la Cour d’appel affirme :
«[75] Il est manifeste que le juge, ici, a estimé que la communication de ce rapport permettrait d’accélérer le débat et d’éviter de consacrer des ressources importantes à un interrogatoire qui, ultimement, permettrait d’obtenir l’information qui y est contenue.
«[76] Bref, le fait qu’un document ne puisse être produit au dossier de la cour ni utilisé à l’audience ne doit pas constituer un obstacle dirimant à ce qu’un juge puisse, par ailleurs, en ordonner la communication s’il estime que cela sera utile. L’esprit animant le Code de procédure civile impose, selon moi, que les tribunaux fassent dorénavant preuve, à cet égard, d’une certaine souplesse.»
*associée chez McCarthy Tétrault S.E.N.C.R.L., s.r.l. Le présent article ne constitue pas un avis juridique.