Non, selon l’honorable juge Bernard Synnott, de la Cour supérieure du Québec, dans son jugement rendu dans l’affaire Beauregard c. Boulanger, 2020 QCCS 2090. Le tribunal conclut que même si les défendeurs avaient mis fin aux négociations de manière intempestive, les demandeurs n’auraient eu droit qu’aux dommages subis entre la signature de la lettre d’intention et la terminaison des discussions.
En effet, le tribunal retient que les parties avaient clairement stipulé dans la lettre d’intention que cette dernière ne créait aucune obligation future. De plus, une fin prématurée ne peut donner droit à des dommages futurs pour une perte de rendement ou une perte de profit éventuelle.
Dans cette affaire inusitée, le juge rejette par ailleurs la demande au motif de frivolité et déclare même celle-ci abusive. Entre autres, le tribunal retient ceci :
La bonne foi se présume. Cette bonne foi doit être présente tant au stade préalable à la passation du contrat qu’au stade de son exécution.
Cette obligation de bonne foi à l’étape précontractuelle n’empêche ni l’une ni l’autre des parties de mettre fin à la négociation vouée à l’échec ou à celle menée de mauvaise foi.
La preuve administrée au procès démontre de façon plus que prépondérante que ni l’un ni l’autre des demandeurs n’avait à sa disposition la somme minimale de 1 M$ à investir. La preuve révèle aussi que les demandeurs étaient dans l’impossibilité de satisfaire aux exigences des institutions financières, y compris Investissement Québec.
Contrairement aux exigences de la bonne foi, les Beauregard ont utilisé des subterfuges et des prétextes pour gagner du temps.
Aucun financement n’était en place. Pourtant, par la voix de leurs avocats, les Beauregard affirment catégoriquement que toutes les étapes nécessaires ont été franchies avec les banques ou avec leurs partenaires.
Quant au caractère abusif des procédures :
Le tribunal conclut que de telles affirmations sont fausses et contraires aux exigences de la bonne foi en plus d’induire sciemment en erreur.
Le tribunal retient de la preuve la frivolité du recours et l’utilisation de procédures judiciaires de façon déraisonnable dans les circonstances. Elles sont utilisées à des fins stratégiques et dans le but de représailles à l’endroit des défendeurs aux fins de tenter à nouveau de s’approprier des actions des défendeurs, au moment où ceux-ci s’apprêtent à vendre au Groupe Ryan.
Dans les circonstances, le tribunal conclut que les procédures judiciaires des demandeurs sont abusives et qu’elles sont la continuité d’une conduite hors normes, et ce, à la lumière d’une preuve déclarée convaincante.
*Julie-Martine Loranger, associée chez McCarthy Tétrault S.E.N.C.R.L., s.r.l. avec la collaboration de Me Alain Tardif. Le présent article ne constitue pas un avis juridique.