Deux hommes d'affaire dos à dos devant un chemin qui se divise en deux, l'air pensif.
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Il est temps que le gouvernement du Québec cesse de le faire relativement au partage de commission entre un représentant en épargne collective et sa société par actions personnelle. Québec devrait également statuer de manière plus large sur l’opportunité pour un représentant du secteur des valeurs mobilières d’incorporer ses activités.

En effet, le statu quo est insoutenable pour un segment de représentants en épargne collective dont le courtier facilite le partage de commission. La Loi sur les valeurs mobilières (LVM) du Québec permet à un courtier en épargne collective de partager la commission qu’il reçoit avec un cabinet ou une société autonome régi par la Loi sur la distribution de produits et services financiers, sous certaines conditions.

Toutefois, Revenu Québec (RQ) et bon nombre d’acteurs de l’industrie interprètent différemment ces lois et ne s’entendent pas sur la manière dont un partage serait conforme sur le plan fiscal.

Résultat, ces dernières années, et encore récemment, des conseillers qui avaient effectué ce partage ont reçu des avis de cotisation de RQ, qui conteste leur interprétation. En conséquence, les avantages du partage de commission que le législateur a souhaité conférer à certains représentants sont devenus inapplicables.

En agissant ainsi, le gouvernement du Québec, par l’entremise de ses différents ministères et agences, tient des discours différents, voire contradictoires. Ce faisant, il laisse subsister un flou depuis de nombreuses années, lequel est intenable pour les représentants de l’industrie financière. Cette tergiversation crée même un risque de traitement inéquitable pour le consommateur de produits et services financiers, que le gouvernement devrait pourtant protéger.

Le problème est le suivant : un représentant en épargne collective commet une erreur aux yeux du fisc, qui lui achemine une facture fiscale pouvant facilement atteindre les 50 000 $, parfois dépasser les 100 000 $. Il paie à l’autorité fiscale la somme demandée afin d’éviter que les intérêts ne courent, même s’il est en désaccord.

Pour récupérer ce manque à gagner, certains conseillers posent des gestes discutables. Par exemple, ils déplacent leurs activités vers un courtier qui leur offre un dédommagement intéressant pour ce transfert de bloc d’affaires.

Des conseillers ont même choisi de « convertir l’ensemble de leur portefeuille d’épargne collective vers les fonds disCette tincts afin “de se légaliser fiscalement parlant” », comme l’évoque le Conseil des partenaires du réseau SFL (CPRSFL), dans un mémoire déposé auprès de l’Organisme canadien de réglementation des investissements (OCRI) en mars dernier (lire « Approche sous-optimale en vue » en une). Le CPRSFL note à juste titre que cette décision peut parfois désavantager certains clients.

C’est sans compter que ce différend fiscal crée d’autres situations qui mettent à risque la santé financière des conseillers et, ainsi, la protection du public. Le CPRSFL notait que la campagne de cotisation de RQ à l’endroit de représentants en épargne collective « provoque tant auprès des conseillers que des membres de leurs familles des situations incroyables de stress, d’angoisse et de santé mentale, sans compter le risque pour plusieurs d’en arriver à une faillite personnelle ».

Des membres de notre équipe ont entendu le témoignage de certains d’entre eux et ont constaté les effets de ce stress.

Cette position du gouvernement est intolérable pour plusieurs représentants. Et elle fait dire à différents observateurs, dont certains de la communauté fiscale, qu’il faudrait trancher : on permet ou on interdit le partage de commission. Qu’on arrête d’entretenir un flou fiscal et qu’on statue de manière claire sur la façon dont un représentant peut organiser ses affaires.

Par le passé, Finance et Investissement a jugé que le fruit était mûr et qu’on devrait permettre aux conseillers du secteur des valeurs mobilières de se constituer en société par actions. On continue de le penser, car, à l’instar d’autres professionnels, le conseiller devrait avoir l’option de s’incorporer notamment afin de permettre de mieux servir des clients.

Il n’est pas rare que des conseillers du secteur des valeurs mobilières s’associent avec des représentants en assurance de personnes, des planificateurs financiers et des spécialistes en courtage hypothécaire et en fiscalité. Ils visent à créer des équipes multidisciplinaires. Leur valeur ajoutée réside entre autres dans la combinaison d’expertises auprès des clients et le gouvernement devrait leur permettre d’organiser leurs affaires de la manière la plus efficiente, y compris sur le plan fiscal.

Évidemment, les organismes de réglementation peuvent favoriser cette position ou non, et prendre des mesures comme l’OCRI l’a fait cet hiver en menant une consultation sur l’incorporation et l’établissement de règles du jeu équitables sur la rémunération des représentants du secteur. Or, en l’absence de concertation avec les parties prenantes et les autorités fiscales, ces initiatives peuvent s’avérer infructueuses. D’où notre appel à ce que le gouvernement du Québec et son ministère des Finances mettent fin à cette insoutenable tergiversation.

L’équipe de Finance et Investissement