Il est temps de simplifier le système de production des déclarations de revenus pour l’ensemble de la population canadienne.
Les autorités fiscales, qui reçoivent déjà les feuillets de renseignements fiscaux de bon nombre de contribuables, pourraient ainsi éviter à bien des gens de perdre de longues heures à effectuer ce qu’ils considèrent souvent comme un douloureux exercice annuel.
La crise sanitaire des derniers mois a mis en lumière une des faiblesses du système fiscal, qui est basé sur l’obligation des contribuables de produire une déclaration de revenus. Certains citoyens de 70 ans et plus ont passé des semaines confinés chez eux, sans avoir le droit de sortir. Pour eux, produire une déclaration de revenus a donc été grandement compliqué. Et ce, même s’il existe des logiciels pour le faire, et même si les préparateurs de déclarations de revenus ont été créatifs en mettant notamment à la disposition de leurs clients des portails sécurisés en ligne afin qu’ils y déposent leurs feuillets fiscaux.
C’est sans compter les milliers de contribuables qui ne comprennent rien aux systèmes fiscaux canadien et québécois, parfois en raison d’une déficience ou d’un analphabétisme, et qui dépendent des bénévoles de centaines d’organismes communautaires pour produire leurs déclarations fiscales. La pandémie a fortement ralenti les activités des bénévoles, au grand dam d’une tranche de la population qui a besoin de cette aide pour déclarer ses revenus… et souvent pour profiter de mesures sociofiscales auxquelles on ne peut accéder qu’en effectuant cet exercice.
Revenons à la situation de beaucoup de clients. Les employeurs et les institutions financières font déjà parvenir aux autorités fiscales une copie des feuillets fiscaux de bon nombre de salariés dont l’ensemble des actifs financiers est placé dans des régimes enregistrés.
Pour rendre les choses plus simples, les autorités fiscales pourraient envoyer au contribuable une déclaration de revenus provisoire qui compile tout ce qu’elles ont reçu de part et d’autre. Le contribuable n’aurait qu’à vérifier le tout, préciser certains éléments, notamment par rapport aux frais médicaux et aux dons de bienfaisance, puis retourner la déclaration au fisc. Cette formule de déclaration de revenus préremplie simplifierait grandement le pénible exercice printanier.
Évidemment, pour les cas plus complexes, comme les travailleurs autonomes, les entrepreneurs et les professionnels constitués en société ou les propriétaires d’immeubles à revenus, il y aurait lieu de faire affaire avec un comptable ou un spécialiste pour préciser certains éléments aux autorités fiscales.
Toutefois, pour une bonne proportion des contribuables, la compilation du gouvernement pourrait très bien faire l’affaire. Cela leur épargnerait beaucoup d’heures à rassembler à gauche et à droite leurs feuillets fiscaux pour les remettre à leur préparateur de déclarations de revenus.
Les risques d’erreurs ou d’oublis seraient moindres, tant pour les contribuables que pour les préparateurs fiscaux qui ont beaucoup de travail à accomplir en très peu de temps. Les courtiers en valeurs mobilières et les assureurs n’auraient plus à rappeler à leurs clients qu’ils n’ont pas téléchargé tel ou tel relevé sur leur portail en ligne et que s’ils ne le font pas, leur déclaration sera incomplète. L’industrie financière recevrait sans doute beaucoup moins de questions de clients liées à la production de leurs déclarations de revenus chaque printemps, et pourrait se concentrer sur d’autres tâches plus productives.
Évidemment, les gouvernements devraient probablement faire aussi un peu de ménage dans leurs trop nombreuses et parfois complexes mesures fiscales, question de ne pas rendre l’exercice de simplification contre-productif. Une chose est certaine : la formule de déclaration de revenus préremplie doit trouver racine au sein des gouvernements, même si le lobby des préparateurs fiscaux et des concepteurs de logiciels qui offrent ce service les en dissuadait.
Cette idée vous paraît farfelue ? Détrompez-vous. Selon une lettre d’opinion publiée dans le New York Times en 2017, les autorités fiscales de pays industrialisés, dont le Japon, envoient une sorte de carte postale aux contribuables qui contient un résumé de ce qu’elles ont collecté. Les contribuables révisent la note, la modifient au besoin et peuvent la contester s’ils s’y opposent.
La crise actuelle force les entreprises à innover et à être créatives afin de demeurer en affaires. Les gouvernements et les autorités fiscales devraient en faire tout autant afin d’être réellement au service de la population.