Tous les courtiers et représentants de l’industrie financière du Canada, sauf ceux de l’Ontario, devront abandonner l’option de souscription à un fonds d’investissement avec frais d’acquisition reportés (FAR) à partir du 1er juin 2022. Qui seront les principaux perdants de cette décision du groupe de régulateurs dont fait partie l’Autorité des marchés financiers (AMF) ? Les conseillers de la relève, ceux qui administrent le moins d’actif et ceux qui génèrent le moins de revenus sont les plus susceptibles de devoir changer leur modèle d’affaires.
Voilà quelques-uns des constats qui découlent d’une analyse du profil des conseillers liés à un cabinet multidisciplinaire qui dépendent le plus des commissions par transaction à la vente de fonds d’investissement en 2020 et en 2019, analyse faite à partir des données récoltées lors des deux derniers Pointages des cabinets multidisciplinaires.
En 2020, Finance et Investissement a observé les traits d’un sous-groupe de conseillers dont 30 % ou plus du revenu brut (production) provenait de commissions à la vente de fonds d’investissement, comme les FAR.
Par rapport à leurs pairs, dont les données se trouvent dans le tableau «Profil des conseillers, selon le secteur d’activité, en 2020», en page 15, les conseillers de ce sous-groupe sont plus jeunes (48,5 ans en moyenne) et comptent un nombre inférieur d’années dans l’industrie (17,1 ans en moyenne). Notons que l’ensemble des répondants à nos sondages devaient travailler depuis au moins 3 ans dans l’industrie et au moins 1 an auprès de leur firme de courtage.
Toujours par rapport à leurs pairs, les conseillers de ce sous-groupe ont un revenu personnel médian avant impôt plus faible (de 50 000 $ à 99 999 $) et gèrent le compte de davantage de familles (293,2 ménages en moyenne).
Par ailleurs, les 20 % de conseillers liés à un cabinet multidisciplinaire générant les revenus bruts de production les plus élevés en 2020 semblent moins menacés que les autres 80 % par l’abolition des FAR. En effet, la proportion moyenne de leurs revenus de production bruts constituée de commissions à la vente de fonds d’investissement s’établissait à 5 % pour les premiers, comparativement à 19,8 % pour les seconds.
En 2019, le Pointage des cabinets multidisciplinaires montrait les mêmes tendances que celles décrites précédemment.
L’étude de 2020 révèle également quelques écarts entre les grands utilisateurs de commissions à la vente de fonds d’investissement et les autres. Par rapport aux seconds, les premiers ont tendance à administrer un actif en fonds communs légèrement inférieur, mais à avoir une part plus importante de leurs revenus bruts en assurance provenant de l’assurance vie temporaire.
Les FAR en déclin
Bien que le profil des «potentielles victimes» de l’abandon des FAR semble rester le même d’année en année, certains éléments ont changé entre le moment de l’étude de 2020 et celui de l’étude de 2019. Ainsi, entre le printemps de 2019 et le printemps de 2020, les Autorités canadiennes en valeurs mobilières ont confirmé qu’elles allaient de l’avant avec l’abandon des FAR. Cette nouvelle, annoncée en décembre 2019, semble avoir accéléré la tendance, déjà présente dans l’industrie, à délaisser les FAR dans le modèle d’affaires des conseillers liés à un cabinet multidisciplinaire.
Par exemple, en 2019, en moyenne, 33,8 % des revenus de production bruts des conseillers provenaient de commissions à la vente ou par transaction, ce qui inclut les FAR et les commissions en assurance. En 2018, cette proportion était de 42,5 %.
En 2020, Finance et Investissement a raffiné sa collecte de données, ce qui lui a permis de voir que, en moyenne, 15 % du revenu brut (production) des conseillers provenait de commissions à la vente de fonds d’investissement, comme les FAR. Les commissions à la vente de produits d’assurance de personnes représentaient 16,9 % du revenu brut, pour un total cumulatif de 31,9 %. On constate donc que les conseillers dépendent un peu moins des commissions à la vente.
De plus, en 2020, environ 41 % des répondants ne recevaient pas de commissions à la vente de fonds d’investissement. Ces derniers ne risquent donc plus de devenir les prochaines victimes collatérales de l’abandon des FAR.
Par ailleurs, à l’occasion du sondage annuel mené dans le cadre du Baromètre de l’assurance de 2020, Finance et Investissement a demandé aux sondés d’indiquer quel pourcentage de leur revenu brut est sous forme de FAR lorsqu’ils distribuent des fonds distincts. En 2018, cette proportion était de 51,6 %, en 2019, de 30,5 % et en 2020, de 31,1 %. Les FAR en fonds distincts restent permis, bien que les organismes de réglementation souhaitent une harmonisation entre les règles régissant la distribution de fonds communs et celles touchant les fonds distincts.