Le secteur de la distribution des fonds communs de placement (FCP) n’a pas le même visage au Québec que dans l’ensemble du Canada. Le Québec, la société distincte des FCP ?
Le cabinet d’études de marché Strategic Insight a voulu savoir quels sont les 10 plus grands distributeurs de FCP parmi les firmes membres de l’Association canadienne des courtiers de fonds mutuels (ACCFM).
Les ventes générées par les firmes de courtage de plein exercice de l’Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières (OCRCVM) n’ont pas été incluses dans les calculs de Strategic Insight. Comme l’observe le cabinet d’études de marché, cette exclusion minimise l’importance des réseaux bien implantés auprès des firmes membres de l’OCRCVM, comme le sont Gestion de patrimoine Assante, Investment Planning Counsel (IPC), Manuvie et Groupe financier Peak.
Premier constat : les réseaux de distribution «Made in Quebec» ont un poids significativement élevé au Québec qu’on ne retrouve pas de façon aussi marquée ailleurs au Canada.
Sans surprise, Groupe Investors arrive en tête au Québec, comme c’est d’ailleurs le cas au Canada dans son ensemble. Investia arrive au deuxième rang, suivi par Desjardins et Peak. Les septième et huitième rang sont respectivement occupés par Excel Gestion Privée et le Groupe Cloutier.
Au Canada dans son ensemble, Investia arrive au troisième rang, alors que Desjardins occupe la huitième position. Peak, Excel et le Groupe Cloutier ne font pas partie du classement pancanadien.
Notons que Strategic Insight a élaboré le classement canadien en incluant le Québec, qui représente 23 % de la population du pays. Si on excluait le Québec, Investia et Desjardins feraient moins bonne figure. Ainsi, Desjardins n’apparaît pas au classement ontarien alors que Investia occupe son dixième rang.
Une prime à la proximité
D’après Marc St-Pierre, président de la firme de consultation en gestion de patrimoine MSP & Associés, les distributeurs implantés au Québec touchent l’équivalent d’une prime à la proximité.
«Les Québécois francophones sont plus conservateurs que la moyenne. Cela se voit dans leurs placements ainsi que dans leurs relations d’affaires. Avant de signer des contrats de vente, ils aiment prendre le temps de bien connaître les gens et les entreprises avec lesquels ils feront affaire. Par la suite, ils développeront de forts liens de loyauté», dit cet ex-vice-président principal, solutions gérées chez Fonds Dynamique.
Aux yeux de Marc St-Pierre, les consommateurs du reste du Canada obéissent à d’autres impératifs. «Ailleurs, le prix et la performance sont rois et maîtres. Il n’y a pas de place pour les sentiments ! Dès que les rendements diminuent ou que des produits moins coûteux leur sont présentés, les consommateurs Canadiens auront tendance à regarder ailleurs. Au Québec, on aime donner des chances au coureur et on en donne beaucoup ! Reste à voir si cette façon quasi familiale de faire affaire avec des réseaux de distribution tiendra le coup avec les milléniaux», dit Marc St-Pierre.
Marc St-Pierre ajoute que cette prime à la proximité continue à s’appliquer chez les firmes financières acquises par d’autres entreprises, comme ce fut le cas pour Excel, maintenant propriété du Groupe Financier Horizons. «Lorsque les dirigeants des sociétés financières acquises gardent leur autonomie, tout peut se passer comme avant», dit-il.
Plus petits books d’affaires
Strategic Insight a également comparé, d’une province à l’autre, les books d’affaires des conseillers relevant de cabinets membres du MFDA.
La proportion d’actif détenu dans les petits books d’affaires est la plus élevée au Québec. Ainsi, 44,1 % de l’actif géré par des conseillers québécois se trouve dans des books de moins de 20 M$. La moyenne pancanadienne est de 37,9 %.
L’enquête de Strategic Insight ajoute un élément révélateur. Lorsque les books ont moins de 10 M$ en actif sous gestion, les conseillers utilisent 34 FCP en moyenne offerts par l’entremise de quatre manufacturiers de fonds. Lorsque l’actif sous gestion est de 50 M$ et plus, les conseillers doivent alors jongler avec, en moyenne, 161 FCP provenant de 12 manufacturiers différents.
Directeur général de Excel Gestion Privée, Normand Morin affirme que les heureux conseillers aux gros books d’affaires devront réexaminer leur approche. «Selon moi, une des tendances futures de la réglementation consistera à mettre de l’avant l’obligation de bien connaître ses produits. Peut-on connaître adéquatement 161 produits ? Poser la question, c’est y répondre», dit Normand Morin.
Selon lui, les conseillers devraient se familiariser avec les produits de «quatre ou cinq manufacturiers de fonds, tout au plus».
Représentant en épargne collective chez Services en placements Peak, Marc Dubuc estime que la «limite d’efficacité» d’un conseiller consiste en une liste maximale de 25 FCP et 25 fonds négociés en Bourse (FNB). «Au-delà de cette limite, j’en aurais plein les bras !» témoigne l’ex-directeur principal, Stratégie marketing et gestion de l’offre de Desjardins.