Or, la croissance du marché pousse les manufacturiers de FNB à se livrer une guerre de prix et à réduire encore davantage les frais de gestion. À quand des frais de gestion de 0 % ?
Début août, la société Horizons ETFs lançait deux fonds négociés en Bourse d’allocation d’actifs : le Portefeuille conservateur Horizons FNB a indice de rendement total (HCON) et le Portefeuille equilibre Horizons FNB a indice de rendement total (HBAL). Avec, à la clé, des frais de gestion aussi bas que… 0 % ! La firme précisait toutefois que le ratio des depenses de gestion des FNB HCON et HBAL sera d’environ 0,15 % et 0,16 % respectivement.
Dans les faits, ces nouveaux FNB «investissent dans d’autres FNB qui, eux, ne sont pas sans frais», souligne Ian Gascon, président de la firme de gestion de portefeuille Placements Idema, qui estime que le coût de détention de ces FNB sous-jacents serait plutôt de 0,36 %.
Dire que ces FNB n’ont pas de frais de gestion, c’est en effet assez trompeur, estime également Dan Hallett, vice-président et responsable, gestion d’actifs de la firme HighView Financial Group, qui note aussi que les investisseurs devront assumer un coût indirect. «Il s’agit néanmoins d’une belle stratégie de marketing», précise-t-il.
Vive concurrence
N’empêche : les frais de gestion des FNB, qui sont déjà l’option d’investissement la moins coûteuse sur le marché pour les investisseurs, chutent année après année. Les manufacturiers de FNB, toujours plus nombreux comme en témoigne l’arrivée du Mouvement Desjardins qui lançait sa propre gamme de FNB l’an dernier, se livrent en effet une vive concurrence pour tenter de maintenir ou augmenter leurs parts d’un marché qui ne cesse de croître.
«Il y a une plus grande offre de produits de la part d’un nombre grandissant d’acteurs, ce qui permet de réduire les frais de gestion», note Alain Desbiens, directeur des ventes FNB BMO, en rappelant que le marché canadien des FNB ne comptait que quatre acteurs d’importance quand il est arrivé chez BMO à titre de vice-président des ventes de FNB de Gestion mondiale d’actifs BMO.
Le secteur canadien des FNB poursuit en effet sa forte croissance, ayant atteint un actif sous gestion de 147 G$ en 2017 et de 157 G$ en juin 2018. Les ventes nettes de FNB canadiens ont d’ailleurs atteint un record de 25,8 G$ l’an dernier, soit une hausse de 56 % comparativement aux ventes nettes de 2016.
Ce volume d’activité dans les FNB canadiens est l’un des facteurs qui causent la baisse des frais de gestion. «Comme dans toute autre industrie, c’est le principe des économies d’échelle. En ayant plus d’actifs sous gestion, ça coûte donc moins cher de les gérer. D’autant que le travail de gestion ne change pas», fait valoir Yves Rebetez, analyste financier.
Des FNB sans frais de gestion ?
Selon Ian Gascon, «ce n’est qu’une question de temps avant qu’un FNB avec des frais de gestion réellement à 0 % ne fasse son apparition. On y est déjà presque.»
Aux États-Unis, ajoute-t-il, une quinzaine de FNB ont des frais de moins de 0,04 % et cinq de 0,03 %. Au Canada, le Horizons S&P/TSX 60 Index ETF (HXT) comporte des frais de gestion de 0,03 % depuis quelques années déjà. Plusieurs fournisseurs canadiens de FNB offrent aussi une exposition aux actions canadiennes à 0,05 % de frais de gestion. Aujourd’hui, plus de 35 % de l’actif sous gestion dans les FNB au Canada ont des ratios de frais de gestion de 0,20 % ou moins.
Or, ce sont principalement les FNB indiciels à gestion passive qui sont les moins coûteux et font l’objet d’une baisse généralisée des frais de gestion, fait valoir Alain Desbiens. «La bataille des frais de gestion se fait dans des catégories extrêmement compétitives, comme des fonds indiciels de base canadiens et américains ou des titres à revenu fixe», précise-t-il en ajoutant que le coût médian des frais de gestion de l’ensemble des FNB se situe entre 0,80 et 1 %. De plus, certains FNB affichent des frais de gestion supérieurs à 2 %.
Dan Hallett estime aussi que des FNB sans frais de gestion seront offerts dans un avenir rapproché. À l’exemple de Fidelity qui a récemment lancé deux fonds communs de placement sans frais aux États-Unis. «Il y a des exemples pour d’autres produits d’investissement. Dans tous les cas, ils sont offerts par des promoteurs qui sont assurés d’autres formes de revenus et qui veulent attirer les investisseurs sur leur plateforme d’investissement», souligne-t-il.
Yves Rebetez fait écho à ces propos. «Il ne faut pas se leurrer. Dans le secteur de la finance, il n’y a rien de gratuit, et on aime encore faire beaucoup d’argent», précise-t-il. Selon l’analyste financier, l’important n’est pas tant d’avoir des frais de gestion de 0,20 % ou même 0 %, mais plutôt de savoir si l’investisseur en a pour son argent. «Quel est mon rendement pour des FNB à 0,20 % ? Je serais prêt à payer des frais de gestion de 2 % si j’obtiens un rendement de plus de 10 %», conclut-il.