Que diriez-vous si un tiers surveillait la façon dont vous gérez les investissements de vos clients ? Cela pourrait très bien arriver. La vigie de portefeuille, qui est assez généralisée chez les investisseurs institutionnels, fait maintenant ses premiers pas du côté des investisseurs individuels.
La plupart des régimes de retraite mandatent des firmes d’actuaires pour s’assurer que les gestionnaires de portefeuille font un travail adéquat, a souligné Nathalie Bachand, planificatrice financière chez Bachand Lafleur, groupe conseil, lors du congrès 2019 de l’Institut québécois de planification financière, le 26 septembre.
«La première étape, c’est d’établir les critères pour sélectionner les gestionnaires. On effectue des entrevues et on détermine des finalistes. Puis, périodiquement, il y a un suivi des résultats, une révision des frais, etc. On n’évalue pas seulement le rendement, mais aussi les raisons pour lesquelles on a choisi de faire ces investissements. Presque tous les régimes de retraite font cela ; ça leur permet de limiter leur responsabilité», a expliqué Nathalie Bachand, qui est aussi présidente de Question Retraite.
Rassurer le client
Cette pratique est encore peu répandue chez les investisseurs individuels. La plupart des gens consultent un conseiller directement et ne demandent pas l’avis d’un intermédiaire pour en faire une évaluation, a indiqué Nathalie Bachand. Toutefois, la vigie de portefeuille chez les clients individuels tend à augmenter, remarque Richard Pilotte, planificateur financier et associé-conseil chez Mallette.
«Les clients sont préoccupés de savoir si leur dossier recevra une réponse adaptée à leurs besoins. Les scandales financiers n’ont pas aidé [à la méfiance envers les conseillers]. Ils veulent quelqu’un pour les accompagner dans le processus», explique Richard Pilotte.
C’est pourquoi ils demandent à des actuaires et à des analyses financiers (CFA) de réviser le travail du gestionnaire de leur portefeuille.
«Chaque mois, on produit un rapport consolidé. On s’assure que la politique de placement de chaque compte est respectée et que le décaissement se fait de façon à atténuer les répercussions fiscales, on révise les honoraires, les entrées et les sorties de fonds, etc.», précise Richard Pilotte.
Un suivi annuel plus complet, similaire à un audit, est aussi réalisé. L’Autorité des marchés financiers est alors contactée pour vérifier si le gestionnaire fait l’objet d’une poursuite ou est en voie de l’être, entre autres choses.
Selon lui, tant les clients que les professionnels en services financiers ont tout à gagner à recourir à la vigie de portefeuille.
Les représentants n’ont pas à craindre d’être écartés au profit de professionnels de la firme qui offre le service de vigie. «On respecte toujours le réseau du client. Le but n’est pas de « tasser » des gens. Nous travaillons tous en équipe», assure-t-il.
D’une génération à l’autre
Au décès d’un client, le travail peut se poursuivre avec la succession. «On revoit la politique de placement en fonction des héritiers, et on essaie de réduire les conséquences fiscales du décès», énumère l’associé-conseil de Mallette.
C’est une continuité que les clients apprécient, juge-t-il. Ils aiment également la transparence qu’apporte un tel processus. Mallette a, par exemple, créé des mesures de performance (rendement, volatilité, etc.) que tous peuvent comprendre, et non pas seulement les spécialistes de la finance.
De plus, les honoraires sont toujours payés par les clients pour éviter tout conflit d’intérêts. Il n’en tient alors qu’aux clients de mettre en oeuvre les recommandations émises par l’armée de spécialistes qui les entoure.