Un homme d'affaire sur un marche pied sur un toit qui regarde à l'horizon.
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Les signes ne trompent pas. Malgré l’optimisme affiché en fin d’année par le président de la Réserve fédérale américaine (Fed) à l’égard de l’économie américaine, tout porte à croire qu’un ralentissement se pointe à l’horizon, voire même une récession en 2020 ou 2021.

Le fort endettement des ménages, les hausses des taux d’intérêt, la baisse des mises en chantier et les différends commerciaux sont autant d’indicateurs qui annoncent la fin d’un cycle de croissance qui s’est avéré très robuste depuis bon nombre d’années déjà.

Les marchés boursiers, ces derniers mois, ont d’ailleurs été le reflet de ce ralentissement. Le mois d’octobre a été particulièrement dur à encaisser pour les investisseurs qui ont vu l’indice canadien S&P/TSX subir une perte de 6,27 %. Les secteurs importants de l’énergie (- 9,2 %) et des sociétés financières (- 8,1 %) ont particulièrement été touchés au cours de ce mois d’octobre, le pire à survenir depuis la crise économique et financière de 2008.

Marché canadien

Dans ce contexte, nombreux sont les gestionnaires de portefeuille à recommander à leurs clients d’augmenter le poids de leurs liquidités dans leur portefeuille. Certains suggèrent même une répartition allant jusqu’à 25 % en encaisse afin de profiter des aubaines qui se présenteront sur le marché, particulièrement au Canada.

«On garde un niveau de liquidité plus élevé qu’à la normale. Si le marché atteignait des niveaux encore plus bas dans les prochains mois et que certains titres de sociétés devenaient encore plus abordables, on envisagerait assurément d’accroître notre pondération dans le marché canadien qui devrait d’ailleurs bien tirer son épingle du jeu, soit en 2019, soit en 2020», indique Jean Duguay, premier vice-président et gestionnaire principal chez Gestion de placements Eterna.

François Bourdon, chef des placements global chez Fiera Capital, favorise d’ailleurs les actions canadiennes et celles des pays émergents qui performent généralement mieux en fin de cycle économique.

«Les fins de cycle sont caractérisées par des pressions inflationnistes plus fortes et des prix des commodités plus élevées. Une situation qui est positive pour le marché canadien, en particulier pour les secteurs de l’énergie et des services financiers» précise-t-il.

L’attrait pour les actions canadiennes est d’autant plus grand que ce marché est sous-évalué. «Le ratio cours-bénéfice du S&P/TSX, par rapport au S&P 500, est 2,5 points plus bas. C’est rare qu’on ait un multiple plus faible qu’aux États-Unis. La dernière fois remonte à 2009», fait valoir François Bourdon.

Pour Christine Décarie, vice-présidente principale et gestionnaire de portefeuille de la société de gestion Placements Mackenzie, la fin du cycle économique amène les investisseurs à être moins surpondérés en actions.

«Un portefeuille équilibré qui avait une surpondération de 60 % devrait aujourd’hui se situer davantage autour de 50 %», suggère-t-elle, en précisant avoir adopté une stratégie plus défensive en choisissant des sociétés qui réagissent mieux à un ralentissement économique.

Toutefois, compte tenu de la déroute qu’a connue le marché boursier canadien ces derniers mois, «il y a des titres ayant chuté dont le risque, par rapport au rendement, est devenu beaucoup plus intéressant», ajoute Christine Décarie, qui a aussi le secteur de l’énergie dans sa mire, malgré ses nombreux aléas. Le prix du baril de pétrole brut Western Canadian Select est en effet vendu à escompte, jusqu’à 30 $ de moins que celui de son homologue américain, et son transport reste un problème majeur.

Cependant, «les dépenses en capital par les acteurs du secteur seront moins importantes, l’offre et la demande devraient s’équilibrer en 2019, et les producteurs auront des marges plus élevées», estime Christine Décarie.

Steve Bélisle, directeur général et gestionnaire de portefeuille principal de Gestion d’actifs Manuvie, estime pour sa part que les prix du pétrole sont trop imprévisibles pour rendre le secteur attrayant. Il note néanmoins qu’une entreprise comme Suncor est «une société intégrée qui exploite des raffineries et qui est moins exposée au différentiel de prix».

Steve Bélisle s’intéresse davantage au secteur financier, en particulier les banques qui ne cessent d’intégrer les technologies pour améliorer leur productivité et de consacrer des ressources importantes en gestion de patrimoine, et ainsi «propulser à la hausse les profits».

Cela dit, ajoute-t-il, «le secteur n’est pas à l’abri des pertes sur prêts liés au secteur de l’énergie, comme on l’a vu en 2015, ou à une récession potentielle», prévient-il.

Jean Duguay fait écho à ses propos. «On a une ressource, le pétrole, qu’on ne peut pas vendre à un niveau de prix mondial et qu’on peine à transporter. Ce n’est pas très positif pour le secteur», souligne-t-il, en précisant que l’industrie bancaire est plus attrayante.

«Les titres bancaires ont baissé ces derniers mois. Pourtant, les bilans demeurent solides et il n’y a pas eu de changements dans les opérations, ni dans le management, ni dans leur capacité de payer des dividendes élevés qui tournent autour de 4 %. Tout ce qui a changé, c’est l’occasion d’acheter des actions moins chères et de réaliser des rendements intéressants à long terme», indique Jean Duguay.

Le secteur des produits de consommation de base s’avère aussi intéressant, note Christine Décarie. «C’est un secteur qui, en général, performe bien en période de ralentissement ou de récession», souligne-t-elle, en ajoutant que l’industrie de l’alimentation profite notamment des pressions inflationnistes et de l’augmentation des prix du panier d’épicerie.

Steve Bélisle estime d’ailleurs que le titre de Loblaw, dans le contexte actuel et depuis la vente de ses propriétés immobilières, est particulièrement attrayant. La société d’emballage et d’étiquetage CCL Industries est aussi à surveiller, note Steve Bélisle.

D’ailleurs, le mot d’ordre est le même pour tous : alors que les nuages s’accumulent sur l’économie, les placements doivent être faits dans des titres de qualité pour une perspective a plus long terme.

«Il faut investir dans des entreprises de grande qualité, qui ont peu de dettes et qui n’ont pas besoin d’une accélération économique pour bien performer», suggère Steve Bélisle.

«La sélection des titres devient de plus en plus importante et il faut avoir des attentes de rendement plus réalistes», ajoute Christine Décarie.