Il n’y a rien de sophistiqué dans les stratégies des fonds négociés en Bourse (FNB) d’obligations échelonnées, qui séparent les portefeuilles en tranches égales en fonction des dates d’échéance. Cette particularité fait partie de leur attrait, affirment les manufacturiers de FNB.
«L’échelonnement est une stratégie très simple, facile à comprendre pour un conseiller qui la présente et l’explique à un client», dit Stephen Hoffman, vice-président, FNB, chez RBC Gestion mondiale d’actifs (RBC GMA), à Toronto.
Dans de nombreux cas, les conseillers qui recommandent les FNB échelonnés ont déjà utilisé une stratégie d’échelonnement pour leurs clients, par la détention directe d’obligations ou de certificats de placement garanti (CPG).
«C’est pourquoi le passage d’une stratégie d’échelonnement, où vous achetiez des obligations individuelles pour votre client, à un FNB qui utilise une stratégie d’échelonnement est une évolution naturelle», ajoute Stephen Hoffman.
La plupart des FNB échelonnés rivalisent dans la catégorie des titres à revenu fixe à court terme canadiens. Généralement, ces fonds ont 5 «échelons» pondérés de façon égale dans leurs échelonnements, allant de 1 an à 5 ans. Les FNB à plus long terme peuvent compter jusqu’à 10 échelons, allant de 1 an à 10 ans.
L’échelonnement à plus court terme qui existe est celui du fonds 1-3 Year Laddered Floating Rate Note Index ETF d’Invesco, ce qui en fait le fonds le moins exposé au risque de taux d’intérêt. Le FNB d’obligations de sociétés canadiennes échelonnées 6-10 ans RBC est le fonds qui compte les titres à plus long terme. Toutefois, habituellement ce fonds est détenu conjointement avec les FNB d’obligations de sociétés échelonnées 1-5 ans de RBC.
Actuellement, 17 FNB cotés au Canada utilisent des stratégies d’échelonnement et 15 d’entre eux sont dans les catégories de titres canadiens à revenu fixe. Leurs actifs combinés, qui s’élevaient récemment à environ 4 G$, bien que considérables, sont bien inférieurs à ce qui est détenu dans les FNB indiciels traditionnels.
Plus de la moitié des actifs des FNB échelonnés sont détenus dans quatre fonds manufacturés par BlackRock Asset Management Canada, de Toronto, dont le plus important est le 1-5 Year Laddered Corporate Bond Index ETF de 1,03 G$. Invesco Canada est le deuxième acteur en importance, le 1-5 Year Laddered Investment Grade Corporate Bond Index ETF, de 778 M$, étant le fonds le plus considérable des cinq offres proposées par ce manufacturier.
L’intérêt de ce type de produit
Les frais des FNB échelonnés sont faibles, avec des ratios de frais de gestion (RFG) généralement d’environ 0,28 %, et dans certains cas, aussi bas que 0,17 %. Les FNB échelonnés sont toutefois légèrement plus chers que les FNB indiciels d’obligations canadiens les moins chers, qui ont des RFG à 10 points de base ou moins.
Avec le temps, les rendements d’un indice obligataire échelonné et ceux d’un indice pondéré en fonction de la capitalisation boursière sont susceptibles d’être étroitement corrélés, en supposant que les titres qui les composent soient plus ou moins les mêmes.
Les profils risque-rendement des indices passifs par rapport aux stratégies d’échelonnement dans la même catégorie sont très semblables, affirme Jasmit Bhandal, vice-président et directeur, stratégie et développement de produit FNB, chez Invesco Canada.
La différence, selon Jasmit Bhandal, est que les FNB échelonnés répondent aux besoins de clients qui ne veulent pas suivre les tendances des taux d’intérêt quand ils choisissent leurs placements, et ne veulent pas devoir s’inquiéter du risque de réinvestissement, c’est-à-dire lorsque la liquidité provenant des obligations échues ne peut pas être réinvestie aux taux actuels du marché.
«Avec l’échelonnement, cette portion du portefeuille est toujours réinvestie aux taux d’intérêt en vigueur, que les taux d’intérêt montent ou descendent, dit-il. Cela contribuera à stabiliser les rendements annualisés.»
Les FNB échelonnés peuvent avoir de l’attrait notamment auprès des investisseurs qui bâtissent déjà leurs propres échelonnements d’obligations ou qui achètent déjà des obligations individuelles.
«C’est une façon d’aider à diversifier plutôt que de devoir bâtir vous-même ce portefeuille d’obligations ou cet échelonnement d’obligations», ajoute-t-il.
Une duration particulière
L’une des caractéristiques les moins connues des FNB échelonnés est que leur duration – une mesure de la sensibilité aux fluctuations de prix du portefeuille par rapport aux changements de taux d’intérêt – varie au cours de l’année. La duration du portefeuille est plus élevée au point de rééquilibrage, lorsque les liquidités provenant des obligations échues sont réinvesties. Puis, elle chute jusqu’au rééquilibrage suivant.
Steven Leong, chef, produit FNB, chez BlackRock Canada, donne comme exemple la duration du fonds iShares 1-5 Year Laddered Government Bond Index ETF, qui est rééquilibré chaque année à la fin de juin. En juillet 2018, peu après le rééquilibrage de l’an dernier, la duration du portefeuille était d’environ 3,3 ans, soit à peu près six mois de plus que le fonds pondéré en fonction de la capitalisation boursière iShares Core Canadian Short Term Bond Index ETF. Mais à la mi-juin de cette année, peu avant le rééquilibrage annuel, la duration du FNB échelonné avait chuté à 2,5 ans, légèrement plus bas que le FNB indiciel.
«C’est vraiment selon le détenteur, mais pour la plupart des investisseurs, cette différence de duration est réellement significative», dit Steven Leong.
Quant aux rendements, une comparaison entre éléments semblables montre qu’il n’y a aucune différence importante entre une stratégie échelonnée et son équivalent passif pondéré en fonction de la capitalisation boursière. Steven Leong note que le fonds iShares 1-5 Year Laddered Corporate Bond Index ETF a actuellement un rendement à échéance de 2,31 %, très proche du rendement à échéance de 2,40 % du iShares Core Canadian Short Term Corporate + Maple Bond Index ETF. Ce petit écart peut principalement être attribué à la capitalisation imposée sur la quantité de titres triple B de qualité inférieure que le FNB échelonné peut détenir, dit-il.
Sur une période de cinq ans se terminant le 30 septembre, le rendement total du premier FNB était de 2,11 %, par rapport à 2,45 % pour le second.
Le risque de réinvestissement existe encore pour ceux qui investissent dans les titres à revenu fixe. Mais ainsi que Stephen Hoffman, de RBC GMA, le remarque, il n’est certainement pas aussi répandu que dans les années 1990, lorsque la courbe de rendement avait une pente plus ascendante, comme elle l’a eue historiquement.
«Nous avons constaté un certain flux de ces produits échelonnés, plus généralement, dans les produits indiciels pondérés en fonction de la capitalisation boursière plus traditionnels, dit Stephen Hoffman, dont la firme a conclu une alliance marketing stratégique avec BlackRock. Mais ils servent encore vraiment un objectif dans le portefeuille d’un client. Il y a encore là beaucoup d’argent à faire.»