La tendance est suffisamment forte pour que Strategic Insight (précédemment Investor Economics) y consacre une analyse, dans une récente étude.En septembre 2012, 61,7 % de l’actif en fonds distincts à long terme ayant des fonds communs comme actifs sous-jacents étaient gérés à l’extérieur par des firmes indépendantes. En septembre 2016, cette proportion est passée à 51 %, les gestionnaires externes retenant tout juste la majorité des mandats.
De septembre 2012 à septembre 2016, l’actif en fonds distincts à long terme ayant des fonds communs comme sous-jacents est passé de 51,8 à 63,7 G$. Selon Strategic Insight, cette tendance touchant ces fonds s’explique par une combinaison de facteurs, dont durant certaines périodes, des rachats nets de fonds distincts gérés par des tiers par rapport à des ventes nettes positives pour les fonds gérés à l’interne. De plus, la proportion de ventes brutes de fonds distincts gérés par des tiers est passée de 49 à 36 % durant cette période.
Chez Manuvie, on affirme que ce déplacement vers la gestion interne n’est pas un acte délibéré d’accroître l’intégration verticale de la société aux dépens des firmes externes. Il s’agit plutôt d’une conséquence naturelle de la croissance des capacités internes de gestion d’actifs qui ont augmenté au fil du temps.
«Plusieurs nouveaux mandats de gestion ont été offerts dans nos contrats de fonds distincts qui ont été en mesure de recourir à ces capacités», écrit dans un courriel Beverley MacLean, directrice des relations média chez Manuvie.
Chez Great West Lifeco, un des plus importants manufacturiers de fonds distincts sur le plan des actifs gérés, on nous dit également que le privilège accordé à la gestion interne n’est pas une décision délibérée. Par contre, le retour à l’interne est un mouvement bien amorcé et susceptible de se poursuivre, affirme Sam Sivarajan, vice-président principal, Gestion du patrimoine, client individuel, chez Great West Lifeco.
Bien sûr, une portion de la gestion d’actifs distincts demeurera forcément à l’externe, jugent les porte-paroles de Manuvie et de Great West. La demande des clients l’impose, disent-ils, mais aussi, le besoin de satisfaire à des mandats spécialisés, par exemple dans les marchés émergents.
Pour l’instant, chez Great West, il reste que même des mandats domestiques sont gérés tant par des équipes internes qu’externes. Sam Sivarajan donne l’exemple de mandats d’actions canadiennes qui sont confiés à une équipe interne, mais aussi à Fidelity et à Beutel Goodman. Par contre, les mandats de marchés émergents sont assurés uniquement à l’externe par J.P. Morgan Chase.
Nouvelle dynamique des coûts
La poussée dépressive des coûts de gestion est le principal moteur du rapatriement à l’interne, dit le gestionnaire de Great West Lifeco, poussée qui sévit tant dans l’univers des fonds distincts que dans celui des fonds communs. «Avoir recours à des gestionnaires externes impose des coûts plus élevés», et cela entraîne les firmes à développer leurs équipes internes pour offrir toutes les catégories d’actifs.
À cela s’ajoute le fait que les assureurs doivent mettre un capital de réserve pour assurer la garantie des fonds, autre facteur qui contribue à la tendance de contenir les frais. «Nous sommes dans un monde de compression de marges», soutient Sam Sivarajan.
Un autre facteur se combine aux précédents, selon Strategic Insight : l’intense compétition qui sévit dans l’industrie de la gestion d’actifs.
S’ajoute un développement à venir qui, selon Strategic Insight, intensifiera aussi le retour à la gestion interne : les projets dont on parle de plus en plus, soit d’harmoniser la règlementation tant des fonds communs que des fonds distincts. «Nous appuyons ce mouvement vers la transparence non seulement des coûts de distribution, mais des coûts de produits totaux», affirme Sam Sivarajan.
Or, un tel contexte d’harmonisation encouragera en effet le rapatriement à l’interne de la gestion des fonds distincts. Pour Great West, par exemple, dont une proportion d’environ 75 % des actifs totaux est déjà gérée à l’interne, le rapatriement «simplifierait la gestion et les coûts de comptabilité», note Sam Sivarajan.