J’ai adopté les fonds négociés en Bourse (FNB) pour la gestion de portefeuille à la suite de la crise financière mondiale de 2008-2009. À ce jour, il s’agit de la pire crise financière à laquelle j’ai dû faire face en plus de 30 ans de carrière en tant que gestionnaire de portefeuille.
À la suite de cette crise, je n’ai pas immédiatement utilisé les FNB. Peu d’investisseurs les connaissaient à l’époque et le choix était limité. Or, au fur et à mesure que les données financières devenaient disponibles, j’ai décidé de créer des portefeuilles discrétionnaires utilisant principalement des FNB, car j’ai réalisé que la majorité des produits gérés activement ne battaient pas leurs indices de référence sur de longues périodes. Par exemple, la recherche SPIVA de S&P Global montre que 75,3 % des fonds à grande capitalisation ont sous-performé l’indice S&P 500 pour les cinq années terminées le 31 décembre 2020, et que 98,6 % des fonds d’actions canadiennes ont sous-performé l’indice composite S&P/TSX sur la même période.
J’ai publié de nombreux articles sur le site de Finance et Investissement expliquant ce qui m’a attiré dans les FNB : leur faible coût, leur potentiel de rendement et leur facilité de gestion du risque. Ce que je voudrais souligner ici, c’est la conviction qui, selon moi, est nécessaire pour tirer le meilleur parti d’une stratégie de portefeuille modèle de FNB.
Les émotions et l’investissement ne font pas bon ménage. Comme l’a dit Warren Buffett, la peur et la cupidité sont les pires ennemis de l’investisseur. Pour moi, l’attrait des FNB tenait en partie au fait que les indices boursiers passifs et simples éliminaient les coups de tête et les émotions des gestionnaires actifs. Je trouvais la logique convaincante. S’il est si difficile de mieux performer que l’indice, alors pourquoi ne pas simplement acheter l’indice?
Toutefois, l’utilisation de FNB dans la gestion de portefeuille n’est pas une garantie unique de succès.
Le processus de construction du portefeuille est essentiel pour obtenir des résultats solides au fil du temps. Il commence par l’établissement d’un indice de référence qui servira de base à la sélection des FNB. L’indice de référence doit s’appuyer sur une déclaration de politique d’investissement qui décrit les paramètres d’allocation d’actifs et le profil de risque. Il doit également faire référence au style d’investissement du gestionnaire : approche descendante, ascendante ou à contrecourant (contrarian).
Les FNB feront leur travail en se rapprochant des rendements de l’indice, mais un gestionnaire de portefeuille qui manque de conviction dans ses compétences peut facilement manquer de discipline pour s’en tenir à son approche dans le temps, surtout en période de crise ou de marché baissier.
Dans les périodes difficiles, la tentation peut être grande d’ignorer les directives de la politique d’investissement et de remettre en question les décisions d’investissement et le style de gestion, ce qui ouvre la porte à des transactions motivées par les performances passées ou les questions des clients trop nerveux.
Dans de telles circonstances, il est essentiel que les clients restent investis et concentrés sur leur plan financier à long terme. Rééquilibrer les portefeuilles même lorsque les marchés baissent est également essentiel : une récente évaluation actuarielle du Régime de rentes du Québec a révélé qu’un rééquilibrage approprié pouvait ajouter chaque année jusqu’à 40 points de base de rendement, selon la composition du portefeuille.
Il est extrêmement important de parler aux clients en période de volatilité. Si ces derniers soupçonnent leur gestionnaire de portefeuille de remettre en question ses propres décisions ou de ne pas bien comprendre l’attribution du rendement du portefeuille, ils iront voir ailleurs.
La mise en place d’un comité d’investissement pour discuter des idées de négociation dans un portefeuille peut être utile pour maintenir la conviction dans une stratégie d’investissement à long terme. Je choisis des personnes de l’intérieur et de l’extérieur de mon entreprise pour discuter des décisions d’allocation d’actifs et de la sélection des FNB. Je ne cherche pas nécessairement des personnes qui approuvent mes décisions d’investissement; je recherche plutôt un échange perspicace. Parfois, ces discussions m’amènent à retarder une transaction ou à l’écarter complètement, mais dans tous les cas, c’est moi qui décide en dernier ressort.
Pour cultiver et maintenir la conviction dans une stratégie d’investissement, il faut établir et respecter un solide processus de gestion de portefeuille. Mais la conviction ne vous mènera pas loin si elle ne s’accompagne pas de discipline. Une fois que vous avez mis en place un processus, vous devez vous y tenir. Toutes sortes de tentations d’investir différemment de votre thèse d’investissement de base se présenteront. Résistez-y. La discipline consiste à s’en tenir à ce que vous savez et à ce en quoi vous croyez – complètement.
Une fois qu’un processus discipliné est en place, le test final de votre conviction est de vous demander : est-ce que j’investis dans le même portefeuille que celui dans lequel je conseille à mes clients d’investir? La réponse devrait être « oui ».
*Mary Hagerman, M. Sc., FCSI, CIM, PI. Fin, est gestionnaire de portefeuille et conseillère en placement chez Raymond James, dont les bureaux sont situés à Montréal.