Après avoir lancé le premier fonds négocié en Bourse (FNB) au monde et le premier FNB d’obligations au monde, le secteur financier canadien a lancé le premier FNB de bitcoins au monde à la mi-février. Il est loin d’être le dernier, car le nombre de FNB liés à la cryptomonnaie devrait augmenter dans les prochains mois, ce qui étendrait ainsi l’offre existante de différents fonds d’investissement donnant une exposition à ce type d’actif.
Ainsi, en février, les lancements des FNB de bitcoins de Purpose et d’Evolve, respectivement le premier et le deuxième au monde, ont été couronnés de succès. Le premier affichait un actif sous gestion (ASG) de 836 M$ le 9 mars dernier, et le second, un ASG de 64,4 M$à la même date.
Le FNB de bitcoins Purpose s’est taillé la part du lion des créations nettes de FNB de cryptomonnaie. De plus, le Groupe TMX a décidé d’inscrire des options à la cote relatives à ce FNB à la Bourse de Montréal.
Ce FNB entre dans le club des 52 FNB canadiens qui font l’objet d’options sur les 1 073 FNB canadiens en date du 5 mars 2021, d’après une compilation de Valeurs mobilières TD.
Rappelons que les options sont des produits dérivés qui permettent, entre autres, à des investisseurs de se couvrir contre un risque lié à la fluctuation de la valeur d’un titre. Par exemple, si un client détient des FNB de bitcoins dont la valeur a augmenté et souhaite se prémunir contre un risque de fluctuation à la baisse du prix, il pourrait acheter une option d’achat. En échange d’une prime, il aura la garantie qu’il pourra vendre son FNB au moins au prix d’exercice de cette option à un moment donné.
Faire partie du club des FNB auxquels une option est liée risque d’améliorer la perception des investisseurs à l’égard de ce FNB, comme Finance et Investissement l’évoquait dans un article paru en octobre 2020.
«Dans leurs critères de sélection d’un FNB ou d’une action, certains conseillers préfèrent investir dans un titre qui est le sous-jacent d’options. Ils estiment que cela leur confère une couche supplémentaire de liquidité», observait Alain Desbiens, directeur général, distribution des FNB, Québec et Atlantique chez BMO Gestion mondiale d’actifs, dans cet article.
«Les FNB, qui font l’objet d’options cotées, sont potentiellement plus attrayants pour certains investisseurs. L’activité de couverture du mainteneur de marché du secteur des options devrait également augmenter les activités de négociation. Or, ces activités ne signifient pas nécessairement qu’un FNB est plus ou moins liquide – la liquidité d’un FNB est basée sur la liquidité de ses actifs sous-jacents», indiquait alors Catherine Kee, directrice principale, communications corporatives et relations médias, au Groupe TMX.
Depuis le lancement des deux premiers FNB de bitcoins, Placements CI a lancé le sien. Ces trois FNB sont adossés à des bitcoins réglés physiquement, plutôt qu’adossés à des produits dérivés, comme des contrats à terme sur bitcoins.
Malgré tout, la Commission des valeurs mobilières de l’Ontario (CVMO) a approuvé le premier FNB de bitcoins au monde qui est adossé à des contrats à terme sur bitcoins, soit celui d’Horizons ETFs, indique une note de Valeurs mobilières TD.
La CVMO évalue aussi la possibilité d’approuver le premier FNB lié à l’ethereum, une autre cryptomonnaie, d’après cette note. Sachant que le régulateur ontarien a déjà approuvé un fonds à capital fixe lié à l’ethereum de 3iQ, il se pourrait que ce fonds voie aussi le jour.
Les firmes Arxnovum et Accelerate ETFs sont aussi en concurrence pour inscrire à la cote un FNB de cryptomonnaie, d’après Valeurs mobilières TD.
Nombreux risques
Les FNB de cryptomonnaies sont sujets à une foule de risques, dont le vol d’un portefeuille de monnaie virtuelle ou la manipulation boursière.
TD Valeurs mobilières cible également certains risques liés à la détermination quotidienne du prix d’un FNB de bitcoins. En effet, les FNB de bitcoins sont couverts de manière intrajournalière par des contrats à terme de bitcoins, «que le FNB soit adossé à des bitcoins réglés physiquement ou basé sur des contrats à terme», souligne cette firme de courtage. Cette situation crée des risques qui sont inhérents au marché des contrats à terme, un marché qui évolue selon ses dynamiques propres.
Risque lié aux contrats à terme réglés en espèces : Comme pour de nombreux autres produits négociés en Bourse qui comportent des contrats à terme réglés en espèces, il existe un risque que les contrats à terme se déconnectent de la valeur de leur matière première physique, selon Valeurs mobilières TD : «Nous l’avons vu avec les contrats à terme de pétrole brut qui se sont négociés en territoire négatif pendant une courte période l’année dernière. Ce risque serait plus important pour les FNB basés sur des contrats à terme, mais pourrait également avoir un impact sur les transactions intrajournalières des FNB adossés à des bitcoins réglés physiquement.»
Risque de base (basis risk) : La base d’un contrat à terme est la différence entre le prix d’un contrat à terme et le prix au comptant (spot) à une date donnée. La base varie en fonction de divers facteurs et aurait une incidence soit sur les avoirs d’un FNB basé sur des contrats à terme, soit sur le risque de base d’un mainteneur de marché qui doit livrer des liquidités au FNB adossé à des actifs physiques à la fin de la journée, explique TD Valeurs mobilières : «Si la base des contrats à terme de bitcoins devient volatile, il devient plus difficile pour le mainteneur de marché de livrer le niveau de liquidités approprié au fonds à la fin de la journée, ce qui pourrait avoir un impact sur l’écart cours acheteur-cours vendeur du FNB.»
Par ailleurs, ces FNB suivent tous un indice différent et il appartient aux mainteneurs de marché de livrer la valeur de cet indice unique en utilisant des contrats à terme. Bien que la base n’ait pas d’impact sur la tenue de marché des FNB basés sur des contrats à terme, elle aurait un impact sur les avoirs du FNB par rapport au prix au comptant du bitcoin, explique la TD.
Risque de roulement (roll risk): les contrats à terme ont une échéance, à l’instar des obligations. Lorsqu’un négociateur détient un contrat à terme qui doit arriver à échéance dans le mois, il peut se départir de son contrat et faire un roulement en se procurant un contrat à échéance plus longue afin de maintenir son exposition cible.
«L’un des inconvénients des FNB basés sur des contrats à terme est le risque de devoir faire le roulement des contrats à terme front month à la prochaine échéance pour maintenir son exposition cible aux bitcoins. Comme pour d’autres produits basés sur des contrats à terme, cela crée un effet d’entraînement naturel sur le FNB, qui peut entraîner une sous-performance importante. Cette traînée négative ou positive dépend de la forme de la courbe des contrats à terme de bitcoins et peut varier dans le temps», lit-on dans la note de la TD.
Les FNB basés sur des bitcoins «physiques» sont exposés au risque de roulement pour quelques journées, alors que les FNB basés sur des contrats à terme y sont exposés de manière permanente.