Les FNB représentent 0,5 % de la répartition moyenne de l’actif sous administration des conseillers liés à un cabinet multidisciplinaire, selon ce sondage mené de la fin de mars à la fin de mai 2020.
Au début de 2020, les FNB comptaient pour 3 % de la répartition moyenne de la provenance des revenus des conseillers interrogés dans le cadre d’un sondage semblable, le Dealers’ Report Card, effectué par notre publication soeur, Investment Executive. En 2019, cette proportion était de 1,9 %.
Par comparaison, en 2020 les FNB représentaient en moyenne 7,4 % de l’actif sous gestion des conseillers en placement sondés à l’occasion du Pointage des courtiers québécois de Finance et Investissement, et 8,2% en 2019.
Plusieurs facteurs expliquent cette adoption lente. Parmi ceux-ci, les FNB semblent peu cadrer avec le modèle d’affaires des représentants en épargne collective, dont 7% en moyenne des sondés sont rémunérés par honoraires, selon le Pointage des cabinets multidisciplinaires. La majorité (55 %) est rémunérée par des commissions de suivi sur fonds d’investissement, alors qu’une infime partie de l’actif total en FNB canadien offre ce genre de commission, selon une source de l’industrie.
De plus, par le passé, des barrières et des coûts technologiques ont limité les courtiers qui n’ont pas de filiale de courtage de plein exercice dans leur ajout de FNB à leur espace tablette. Le Groupe financier PEAK, dont 36% de l’actif est à honoraires, a été parmi les premiers à offrir les FNB à ses représentants en épargne collective, en décembre 2016. En mai dernier, l’actif en FNB de ceux-ci représentait 0,63% (près de 50 M$) de l’actif sous gestion de PEAK. «C’est donc très peu, mais nous constatons un intérêt de nos conseillers à faire plus et à suivre la formation en ce sens», écrivait alors Philippe Roy, vice-président chez PEAK, dans un courriel. Il ajoute que la part d’actifs en FNB a presque triplé de janvier à avril 2020.
Chez certains courtiers, les embûches technos seront bientôt chose du passé. En mai, on prévoyait que les représentants en épargne collective de Gestion de patrimoine Assante auraient accès aux FNB avant la fin de l’année, en raison de changements apportés à leur arrière-guichet (back office), confirmait alors Éric Lauzon, vice-président au développement des affaires et au recrutement pour le Canada.
«L’idée est de faire que nos conseillers demeurent compétitifs, mais les FNB ne font pas de la magie. Y avoir accès ne fait pas que nos conseillers auront plein de nouveaux clients», disait-il. Chez Assante, les honoraires représentent plus de la moitié des actifs gérés.
SFL Gestion de patrimoine, dont 14,5 % de l’actif sous gestion au Québec était à honoraires en mai, prévoit déployer progressivement le logiciel d’arrière-guichet Dataphile, du fournisseur Broadridge, dans les prochains mois. «Ça va nous donner les coudées franches pour rajouter de nouveaux produits à court et moyen terme, dont les FNB, qui vont donner un avantage concurrentiel à nos réseaux», expliquait, en mai, Michael Rogers, vice-président, ventes et distribution, réseaux indépendants au Mouvement Desjardins.
Toujours en mai, le système utilisé par Investia Services financiers ne lui permettait pas d’offrir des FNB. «Sachant que notre fournisseur de systèmes a récemment ajouté cette capacité supplémentaire, nous réexaminons notre analyse pour l’ajout de cette offre.
Nous voulons avoir une offre de produits robuste, mais également nous assurer que les coûts de plateforme n’entravent aucun avantage potentiel pour le client», écrivait alors iA Groupe financier, société mère de ce courtier, dans un courriel. Environ 15% de la rémunération des conseillers est sous forme d’honoraires chez Investia.
Transition salutaire?
L’adoption du titre de conseiller en placement par un segment des représentants en épargne collective de quelques réseaux pourrait peut-être étendre l’utilisation de FNB chez ces derniers.
Par exemple, chez Assante, la proportion de conseillers en épargne collective qui sont encadrés par l’Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières (OCRCVM) devrait augmenter progressivement, pour passer de 50 % actuellement à 75% à terme, d’après Éric Lauzon.
«Aussitôt que nos conseillers commencent à travailler avec des clients qui ont plus d’argent, ils se voient confrontés à la nécessité de devenir représentants de plein exercice. Dès qu’ils font la transition, des clients qui leur confiaient le tiers de leurs actifs et qui aimaient beaucoup leur conseiller décident de leur confier tous leurs actifs», relatait-il.
Chez PEAK, la décision d’adopter le courtage de plein exercice revient au conseiller en épargne collective. Et lorsque ça arrive, on facilite cette conversion.
L’éventuelle réforme des organismes d’autoréglementation (OAR) pilotée par les Autorités canadiennes en valeurs mobilières (ACVM), qui pourrait mener à une fusion de l’OCRCVM avec l’Association canadienne des courtiers de fonds mutuels (ACFM), pourrait inciter des représentants à attendre avant de faire le saut, affirmait Robert Frances, président du conseil et chef de la direction du Groupe financier PEAK, en mai dernier: «Un conseiller devrait regarder ça de près, parce que ça pourrait avoir un impact important sur le travail et les coûts de transition d’une inscription à l’autre. Ça pourrait être avantageux d’attendre.»
C’est d’autant plus le cas que, chez PEAK, les représentants en épargne collective ont déjà accès aux FNB, aux fonds négociés sur plateforme (FNP) et aux nouvelles émissions d’obligations. Robert Frances admet que les conseillers en placement ont l’option supplémentaire d’offrir des actions, des obligations du marché secondaire et des placements privés. «Les conseillers se disent:“On va soit faire du référencement auprès d’un conseiller en valeurs mobilières, soit attendre de voir ce qui s’en vient avec la réglementation”», observait-il.
Chez Investia, on n’a pas constaté d’augmentation importante du nombre de conseillers passés de l’ACFM à l’OCRCVM. «L’un des avantages concurrentiels propres à iA Groupe financier est que nous proposons un large éventail de services de conseil dans ces deux canaux et que nous disposons d’une équipe de transition attitrée dont le rôle est d’assurer le passage harmonieux d’une entreprise à l’autre pour les conseillers désireux de migrer d’Investia à Industrielle Alliance Valeurs mobilières (iAVM), cela afin d’offrir une gamme de produits élargie.»
Investia surveille aussi le résultat des consultations des ACVM sur le cadre réglementaire des OAR.
Chez SFL, on ne prévoit pas à court terme de développer une offre de plein exercice, préférant fonctionner par recommandation avec Valeurs mobilières Desjardins ou Courtage en ligne Disnat, en fonction du besoin du client.
Réforme salutaire?
Une éventuelle fusion OCRCVM-ACFM serait toutefois un catalyseur pour ces tendances, du moins ailleurs qu’au Québec, d’après deux organisations.
Dans son mémoire soumis aux ACVM, l’Association canadienne des FNB (ACFNB) prône ce regroupement. Actuellement, un représentant dont le courtier est membre de l’ACFM qui veut offrir des FNB à son client «peut faire face à des obstacles importants pour y parvenir, à moins que sa firme ne soit affiliée avec un courtier en placement, ce qui peut augmenter les coûts pour les investisseurs et réduire leurs options», écrit l’ACFNB.
L’Association canadienne du commerce des valeurs mobilières (ACCVM) souligne que même si l’ACFM permet aux conseillers ayant fait la formation préalable d’offrir des FNB et des FNP, plusieurs firmes membres de l’ACFM n’ont pas l’infrastructure d’arrière-guichet nécessaire pour offrir ces produits.
«Bien qu’il puisse y avoir une demande des clients et des conseillers pour ces produits, les coûts de mise en œuvre des nouveaux systèmes nécessaires pour les offrir peuvent être prohibitifs pour les membres de l’ACFM. Si l’ACFM et l’OCRCVM étaient fusionnés sous un OAR consolidé, ces représentants pourraient avoir un meilleur accès à des produits supplémentaires, ce qui améliorerait l’accès des clients à une plus vaste gamme de produits», lit-on dans le mémoire de l’ACCVM.
Avec leur consultation sur les OAR, les ACVM visent à créer «un cadre réglementaire qui offre aux personnes inscrites et aux investisseurs un accès homogène, s’il y a lieu, à des produits et à des services similaires».