Connaître l’associé
«Il est extrêmement important de connaître le partenaire avec lequel nous allons nous lancer dans cette aventure, témoigne Philippe Hynes, gestionnaire de portefeuille, propriétaire et président de Tonus Capital, une firme de gestion de portefeuille de Montréal. Pour ma part, je connaissais bien l’autre individu, je savais comment il travaillait et je jugeais que le risque d’incompatibilité professionnelle était peu élevé.»
Philippe Hynes considère qu’un employé peut dans certains cas devenir un bon associé. Non seulement cet associé potentiel connaît déjà la réalité, les enjeux stratégiques et la clientèle de la firme, mais il a été possible d’observer son développement professionnel.
Un ancien collègue peut aussi devenir un bon candidat, indique An-Lap Vo-Dignard, conseiller en placement, gestionnaire de portefeuille, vice-président et fondateur en 1998 du Groupe VPP, associé à la Financière Banque Nationale (FBN), qui a choisi cette voie. «Nous avions déjà travaillé sur des dossiers communs et je le trouvais très bon, mentionne-t-il. Sans le lui dire, au fil de nos mandats communs, je l’analysais. J’ai aussi recherché des références à son sujet avant de lui proposer de se joindre à moi.»
Partager les valeurs et les ambitions
Pour An-Lap Vo-Dignard, lorsque vient le moment de trouver un associé, «se tourner vers les amis ou les anciens collègues n’est pas suffisant. C’est comme un mariage, et la question doit faire l’objet d’une bonne réflexion».
C’est pourquoi il juge important de bien s’entendre dès le départ sur les objectifs liés à la pratique voulue.
«Tout le monde recherche l’équilibre entre la qualité de vie et le travail, mais cette définition n’est pas toujours la même d’une personne à l’autre. Il est important de s’assurer que les associés sont au même diapason sur le sujet et qu’ils partagent une vision commune quant à l’engagement auquel on s’attend de part et d’autre», mentionne An-Lap Vo-Dignard.
Selon lui, il est aussi très important d’avoir des valeurs humaines similaires, notamment en ce qui a trait aux relations avec les clients.
«Nous avons eu un très bon associé qui possédait de belles aptitudes, mais nous ne partagions pas complètement les mêmes valeurs en ce qui concerne notre approche de la clientèle. Il s’intégrait bien à notre pratique et il a apporté de belles innovations, mais notre clientèle était peut-être trop différente de celle qu’il recherchait, ce qui a éventuellement mené à son départ.»
Philippe Hynes, qui sera bientôt confronté à la nécessité de recruter une ressource sénior en gestion ou de s’associer à nouveau pour nourrir la croissance de la firme, estime que le choix d’un partenaire ou d’un employé est d’autant plus important lorsqu’il s’agit d’une petite firme.
«Ça va être tout un défi, car il ne suffit pas de trouver une personne avec qui l’on s’entend bien. Étant une petite firme, nous recherchons toujours des personnes dotées d’un esprit entrepreneurial, parce que la description de tâches peut s’avérer beaucoup plus vaste que dans le cas d’une firme plus importante. Ici, nous sommes tous appelés à faire un peu de tout, et il faut être créatif et polyvalent. Surtout, le futur associé doit être conscient de cette réalité et être prêt à accepter ce rôle», explique-t-il.
Philippe Hynes estime aussi qu’au-delà d’une connexion sur le plan de la personnalité, il est aussi très important de partager la même philosophie d’investissement. «J’ai une approche de gestion de type très valeur. Il me serait sans doute très difficile d’être jumelé à quelqu’un dont le style est davantage momentum.»
Trouver des compétences complémentaires
L’intérêt de se constituer une équipe consiste en bonne partie à pouvoir miser sur différents talents, rappelle An-Lap Vo-Dignard. Selon lui, certains employés peuvent apporter des expertises plus pointues, mais cette avenue doit aussi être explorée dans le cas d’un associé.
«On dit toujours qu’il faut travailler sur ses faiblesses, mais nous évoluons dans un milieu concurrentiel. Nous améliorons nos chances de gagner lorsque nous misons chacun sur nos forces et que nous pouvons compter sur des gens capables de palier certaines faiblesses. Wayne Gretzky était super bon pour compter des buts, mais ce n’est pas lui qui allait chercher la rondelle dans les coins de la patinoire», illustre-t-il.
An-Lap Vo-Dignard rappelle que le Groupe VPP, après l’ajout de Ian Provost, s’est tourné vers un troisième associé : Benoit Primeau. «Benoît était actuaire et nous cherchions un profil différent du nôtre, quelqu’un qui ait une expérience davantage institutionnelle.»
Nourrir l’expérience
Selon An-Lap Vo-Dignard, toute personne qui nourrit le projet de créer sa firme en partenariat devrait évoluer seule avant d’accueillir un associé. Elle devrait également inciter l’associé potentiel à évoluer seul avant de se joindre à la firme.
«Ce n’est pas donné à tout le monde d’être seul et de monter sa pratique. Cela permet de voir à quel point nous avons un esprit d’entrepreneur et de constater l’ampleur des sacrifices à faire au cours des premières années», dit-il.
An-Lap Vo-Dignard et ses associés ont d’ailleurs travaillé seuls avant de confirmer leur partenariat. «Être à son compte en solo pendant toute une année, c’est très différent par rapport à évoluer dans une équipe, et ce n’est pas du temps perdu. Cela permet de faire son apprentissage et ses erreurs, ce qui apporte une plus grande valeur à l’association par la suite», avance-t-il.
Communiquer
Pour Philippe Hynes, la transparence et la communication sont aussi importantes avec la clientèle qu’avec son associé et son équipe. «La réussite d’une entreprise repose largement sur la confiance. Il faut nourrir cette confiance et s’en montrer digne.»
«Au quotidien, nous tentons de rester connectés le plus possible, mes associés et moi, mentionne An-Lap Vo-Dignard. Pour les grands enjeux, par exemple le choix des stratégies de développement de la firme, il n’est pas toujours possible d’en discuter et d’aller au fonds des choses. C’est pourquoi une fois par an, le Groupe VPP tient une retraite de groupe.»
«Nous faisons un bilan de notre année, en citant les bons coups et les moins bons coups, et dans un cadre structuré, nous abordons toutes sortes de sujets, notamment notre mission. Il faut alors laisser son ego à la porte et ne pas hésiter à se mettre au défi mutuellement, pour le bien de la firme», constate-t-il.