« C’est vrai, les femmes ont un important pouvoir économique et sont une force de décisions économiques importante, explique l’associée principale, Gestion privée de patrimoine, chez Jarislowsky Fraser. Elles représentent une plus grande partie de la main-d’oeuvre au niveau mondial, elles possèdent et dirigent des entreprises partout dans le monde et elles contrôlent également une grande partie de la richesse mondiale. »
Selon des données sur les États-Unis rapportées dans le cadre de sa présentation, les femmes vont hériter de près de 30 billions de dollars (M$) américains durant les 40 prochaines années. De plus, 39 % des investissements aux États-Unis seraient actuellement détenus individuellement ou conjointement par des femmes.
« Or, les femmes ne sont pas nos plus grandes admiratrices, elles se sentent mal servies et mal comprises par leur conseiller, souligne Sophie Palmer. Toujours selon des données américaines, 44 % des femmes n’ont pas de conseiller. Chez les clientes à valeur nette élevée, cette proportion est de 30 %. Pourtant, ce sont des femmes qu’on veut tous avoir comme clientes, mais elles sont là sans aucun lien avec l’industrie. »
Sophie Palmer souligne qu’il y a trois facteurs qui jouent contre les femmes actuellement. En premier lieu, elles travaillent moins longtemps que les hommes, notamment en raison des congés de maternité. Les femmes sont aussi plus souvent des aides naturelles pour leurs parents ou leurs beaux-parents âgés.
« En deuxième lieu, il y a encore des écarts de rémunération entre les hommes et les femmes. Dans la population en général, les femmes gagnent 85 sous par dollar gagné par les hommes. Chez les professionnels, c’est pire, à 75 sous par dollar », illustre-t-elle.
Finalement, les femmes prennent moins de risques et gardent plus d’encaisses: « Elles investissent à la banque, dit Sophie Palmer. Je dis souvent à mes amies, garder trop d’encaisses c’est un peu comme si 100$ tombait chaque semaine de ton sac à main sans que tu t’en rendes compte. »
En somme, non seulement les femmes épargnent-elles moins pour plusieurs raisons, mais puisqu’elles vivent plus longtemps que les hommes, elles ont besoin de fonds de retraite plus importants.
« Il est fort possible que la femme survive son mari de dix ans, ajoute Sophie Palmer. C’est important et, en plus, on dépense plus en soins de santé, les femmes. Je le sais, je vois mes clientes dans les maisons de retraite, ce ne sont que des femmes! »
L’industrie doit donc corriger le tir. Premièrement, en offrant un profil plus diversifié. « Nous n’avons qu’à observer : avoir des équipes diversifiées nous permet de mieux servir un groupe de clients diversifiés. Les femmes sont plus portées à aller voir d’autres femmes en matière de finance. Elles cherchent la compétence, mais aussi l’empathie, l’écoute et la complicité en matière d’argent », rappelle Sophie Palmer.
Il faut aussi leur faire la bonne offre: « 77% des femmes veulent investir dans des entreprises plus diversifiées (où il y a plus de femmes à des postes de haute direction) et 88 % dans des entreprises qui s’intéressent aux enjeux sociaux. Elles ont l’impression que le marché des actions et des obligations ne leur permet pas de le faire. Il faut leur montrer que leurs valeurs et leurs préférences sont comprises et qu’il est possible d’allouer une partie de leur capital en respectant leurs principes. »
C’est important non seulement parce que les femmes sont une clientèle incontournable, mais également pour changer les perceptions des générations futures, conclut Sophie Palmer: « Si les femmes sont plus confortables pour parler d’argent autour de la table devant leurs enfants, les enfants vont être à l’aise de le faire également. Si elles investissent elles-mêmes leurs économies, les enfants vont grandir en se disant qu’ils peuvent aussi faire carrière en finance. »