«En 2008-2009, nous avons choisi d’être proactifs avec nos clients plus nerveux en les appelant et en les rassurant. Ces derniers nous disaient : je suis content que vous téléphoniez, je n’osais pas le faire, vous devez être bien occupés», se rappelle Hélène Grandmaison.
Le client souhaite que son conseiller soit à ses côtés, même quand les choses vont moins bien, ajoute-t-elle. Dans ces moments, certains clients leur demandent : que change-t-on au portefeuille ? «On leur répond alors que les portefeuilles sont bâtis pour subir des replis, comme celui du mois d’août, sans casser. Être réactif pendant une crise n’est généralement pas la chose à faire», dit François Chartier. «On leur rappelle que ce n’est pas non plus le bon moment pour changer son profil d’investisseur», poursuit Hélène Grandmaison.
Gérer les attentes
Le conseiller doit aussi gérer les attentes de ses clients. «Ces derniers doivent comprendre que le rendement d’un portefeuille n’est jamais linéaire d’une année à l’autre. Certaines années sont exceptionnelles, d’autres seront moins bonnes. L’important, c’est que sur une moyenne de trois à cinq ans, on tend vers l’objectif de rendement qu’on s’était fixé», note Hélène Grandmaison.
«Si le portefeuille est bien équilibré, une mauvaise année ne devrait pas mettre en péril le projet de retraite d’un client. C’est notre travail de nous en assurer, même quand il n’y a pas de crises», poursuit-elle.
L’humilité et l’authenticité du conseiller peuvent aussi changer les choses. «Lorsque les marchés montent, on est tous bons, mais quand cela baisse, on est aussi pas mal tous moins bons, et ces épisodes seront des moments de vérité pour le conseiller. Pour celui qui fait de fausses promesses, cela risque d’être plus difficile», affirme Jacques Landry, de Valeurs mobilières Desjardins, et conseiller en placement depuis 1987.
Plus de hausses que de baisses
La nature humaine étant ce qu’elle est, chaque client a une réaction différente lorsque les marchés sont très volatils.
«Certains clients ont le sentiment qu’ils perdent de l’argent, même si les premiers mois de l’année ont été très bons. Il faut leur rappeler que les périodes de baisse sont souvent plus prononcées et violentes, alors que les périodes de hausse sont plus modérées et moins spectaculaires, mais elles sont aussi plus nombreuses», soutient François Chartier.
D’autres vont souhaiter tout vendre quand cela va mal et attendre des jours meilleurs. «On leur explique qu’on ne peut pas geler un portefeuille qui a un horizon de placement de 30 ans. Cela serait pire que de subir des pertes occasionnelles. Il faut remettre les choses en perspective et avoir une vision à long terme», ajoute-t-il.
«C’est en période de crise que l’on comprend la vraie tolérance au risque des clients, remarque Hélène Grandmaison. Il peut arriver qu’un client ait un profil un peu trop agressif pour lui. Ce n’est alors pas le bon moment pour faire des changements.»
Et il vaut mieux documenter ces changements, car il est possible que lorsque les marchés évolueront sous des cieux plus cléments, ce client souhaite revenir à un profil moins conservateur. «Il faut alors lui dire : rappelez-vous en 2008, vous étiez très mal à l’aise et aviez souhaité changer de profil», note François Chartier.
Un conseiller qui adopte un style de gestion plus agressif risque de connaître des périodes plus difficiles lorsque les marchés boursiers vacillent. «Nous avons recruté de nouveaux clients qui avaient été échaudés et qui recherchaient une gestion de portefeuille plus plate, mais où la stabilité et la diversification sont à l’avant-plan», confirme François Chartier.
Les clients apprécient également le fait de parler aux mêmes employés, à la même équipe au fil des ans, ajoute-t-il.
Pas juste le rendement
Si le rendement du portefeuille reste important pour bien des clients, ce n’est souvent pas leur première préoccupation. Le type de service offert aux clients joue également un rôle essentiel dans la fidélité de la clientèle.
Si on offre des plans de retraite et des planifications financières complètes aux clients, ces derniers s’inquiètent moins lors des soubresauts boursiers, selon Martin Pépin, conseiller en placement et planificateur financier chez Gestion de patrimoine TD : «Je leur dis : « Si on suit le plan, on va arriver à destination ». C’est souvent une approche à long terme».
«Les clients veulent se sentir épaulés, qu’on leur assure un bon suivi. Ils souhaitent être servis par une personne compétente et en qui ils peuvent avoir confiance», affirme Martin Pépin.
On tisse des liens plus personnels avec le temps. Après avoir discuté des marchés, de questions fiscales ou testamentaires diverses, le conseiller prend le temps de parler avec eux de leur dernier voyage, de leurs petits-enfants.
«Lorsque le client se sent encadré, une année de mauvais rendement ne sera pas une raison suffisante pour aller voir ailleurs», précise Hélène Grandmaison.
Servir un proche est délicat
Il est beaucoup plus délicat de gérer l’argent d’un proche, comme un ami ou un parent.
«On se doit de bien connaître nos clients et c’est encore plus vrai avec les membres de notre famille. Quand ton frère te prête 10 000 $ et que tu dois lui expliquer pourquoi il lui en reste 8 000 $, peu importe la raison que tu vas lui donner, ce n’est pas évident. Je ne pense pas qu’un conseiller qui a un style de gestion agressif devrait servir sa famille. C’est aussi une question affective», affirme Jacques Landry.
Comment ce dernier explique-t-il la fidélité de sa clientèle ? «C’est l’intégrité. Il faut leur donner l’heure juste en tout temps. Si on vient me voir en disant : « Moi, je veux investir dans les mines ou encore, je veux faire beaucoup d’argent », je vais répondre à cette personne qu’elle ne fait pas affaire avec le bon conseiller. Je gère les avoirs de mes clients en générant un rendement qui bat l’inflation et qui leur permet de dormir la nuit», précise-t-il.