Cette règle de 4 % a été inventée en 1994, soit il y a 25 ans, par William Bengen. Elle stipule que les retraités pourraient retirer 4 % de leur portefeuille d’investissement chaque année pendant au moins 30 ans sans perdre d’argent.
Cette proposition avait alors été validée par plusieurs scientifiques. Une des études les plus connues à avoir analysé cette règle était l’étude Trinity, réalisée par trois professeurs de l’Université Trinity en 1998.
Cette règle est donc restée pendant des années le patron parfait du rythme de décaissement à la retraite.
La fin d’un mythe?
Plus récemment, cette règle a été revue et nombre d’experts ont déterminé qu’elle ne prenait pas en compte suffisamment de paramètres.
En 2013, le Wall Street Journal affirmait que malgré les hausses des cours boursiers de l’époque, ceux-ci ne progressaient pas suffisamment pour garantir la validité de la proposition de William Bengen.
Même après la publication de cet article, certains professionnels affirmaient que bien que la mise en œuvre de cette règle avait pour effet de gruger l’héritage pour les enfants, elle demeurait encore d’actualité. Surtout qu’il est fort peu probable qu’il reste 30 ans de retraite après que le client ait pris sa retraite à 65 ans puisque l’espérance de vie tourne autour de 85 ans.
Mais d’autres paramètres que la hausse des cours boursiers sont à prendre en compte. Parmi eux, on pourrait ainsi citer l’évolution des dépenses à la retraite, dont les frais liés aux soins de santé et l’impact des décaissements sur le montant d’impôt sur le revenu à payer, souligne Angie O’Leary, cheffe de la planification financière chez RBC Gestion de patrimoine aux États-Unis dans un article de MarketWatch.
Cette règle ne tient pas compte non plus d’une éventuelle chute des marchés au début de la retraite d’un client, que le retraité aurait du mal à compenser en maintenant des décaissements de 4 % chaque année, note également l’experte.
Morningstar abonde dans son sens dans son plus récent « Myth Buster » et soutient également que cette règle est dépassée. L’expert souligne ainsi que les situations des retraités ne sont jamais identiques. Certains scénarios sont simples, d’autres non. De plus les situations changent avec le temps, un retraité pourrait ainsi tomber malade et devoir augmenter considérablement ses dépenses en santé et la règle des 4 % ne tient pas compte des imprévus. Le décaissement devrait donc être évalué de façon régulière et être le fruit d’une combinaison de décisions au fil du temps plutôt qu’un montant fixe.
Parmi les facteurs à considérer pour décider du montant à retirer, il serait bon de prendre notamment en compte :
- La valeur du portefeuille
- Les dépenses discrétionnaires et non discrétionnaires
- Les flux de trésorerie exogènes tels que les retraites ou les assurances sociales
- La longévité
- Les préférences du retraité
Toute règle qui ignorerait ces différents facteurs pour présenter une solution simple ne fonctionnera pas, soutient l’expert du Morningstar.
Cette règle des 4 % n’est toutefois pas à écarter trop rapidement, car elle est utile pour savoir quel montant épargner en vue de la retraite. En appliquant un décaissement annuel de 4 % au portefeuille d’investissement, on peut calculer que le besoin d’épargne doit être environ 25 fois plus important que le montant des dépenses annuelles moyennes à la retraite.
Mais une fois à la retraite, il sera important d’ajuster le rythme des décaissements selon les objectifs et dépenses du client et les règles fiscales alors en vigueur.