L’effet perturbateur des innovations cause des questionnements internes importants et le porteur de l’idée doit tenter d’influencer les décideurs afin qu’ils la favorisent.
«Lorsque des innovations – naissantes ou nécessitant d’être mises en œuvre pour recueillir des données chiffrées – ne disposent pas d’indices solides prouvant leur performance, la dynamique politique a tendance à préserver le statu quo en matière de pouvoir et de contrôle sur les ressources matérielles et humaines», écrit Brian Uzzi, professeur de leadership et de changement organisationnel à la chaire Richard L.Thomas de la Kellogg School of Management de l’université Northwestern, dans un article du Harvard Business Review – France.
Il décrit quatre étapes afin d’arriver à utiliser les rouages politiques d’une société pour innover.
Prévenir les résistances
Malgré le fait que les sociétés et leurs dirigeants lancent constamment un appel à des idées créatives de la part des gens travaillant pour eux, la majorité des ressources nécessaires à l’implantation de ces nouvelles idées ont déjà été «déployées ou affectées à des activités existantes, déjà à l’ordre du jour», dit Brian Uzzi.
En réorientant les ressources vers un nouveau projet, les chances de compromettre le projet déjà en cours augmentent, suscitant ainsi de la résistance ou de l’apathie envers la nouvelle idée, soutient-il.
Le professeur suggère de proposer l’innovation de manière stratégique, qui ne touche pas les ressources liées aux priorités de l’entreprise.
Les vraies motivations
«Lorsque la politique s’immisce dans le processus de décision, vos collègues sont susceptibles de ne pas exprimer toutes les vraies raisons de leur opposition à votre innovation», écrit Brian Uzzi.
Alors qu’en public, ils avanceront des raisons acceptables – comme les coûts, le temps ou la complexité -, en privé, les intérêts personnels sont à trouver.
Ainsi, en utilisant la politique au bon moment, le projet d’innovation peut s’insérer dans le lancement d’un nouveau groupe sur la rentabilité globale de la société, par exemple.
Trouver un porte-parole
La troisième étape consiste à trouver un porte-parole crédible et influent au sein de la firme afin que les dirigeants se rallient à l’idée.
En ayant ce représentant, l’innovation deviendra plus crédible aux yeux des autres dirigeants.
La preuve
La dernière étape et la plus difficile consiste à obtenir une preuve tangible du bon fonctionnement de l’innovation. Cependant, les données chiffrées ne s’obtiennent seulement que lorsqu’elle est lancée d’une manière ou d’une autre.
Afin de sortir de ce dilemme, Brian Uzzi propose de rechercher un autre type de preuve, soit la preuve sociale.
Le but est d’obtenir une masse critique de gens supportant l’idée plutôt que des données factuelles sur les résultats attendus.
«La preuve sociale est le mécanisme à l’œuvre dans toutes les croyances des individus, de l’efficacité d’une lessive aux dangers du changement climatique», dit-il.
Brian Uzzi ajoute que «déjouer les dynamiques politiques de l’innovation est souvent aussi difficile, voire plus, que de formuler l’idée elle-même». Mais en étant stratégique, nous augmentons nos chances qu’elle voit le jour.