Finance et Investissement (FI) : Hormis les vérifications d’usages liées à la stratégie de placement en tant que telle, quels éléments de vérification diligente les conseillers devraient-ils effecter spécifiquement au moment de choisir un fonds négocié en Bourse (FNB) pour leurs clients?
Étienne Joncas-Bouchard (EJB) : Il y a plusieurs points à considérer parce que, présentement (en novembre 2023), il y a plus de FNB qui se transigent sur le Toronto Stock Exchange (TSX) que de titres.
Il faut comprendre que les choix sont multiples. Donc, il faut prendre le temps de lire les documents publics. Si on a le temps, évidemment, il faudrait lire un prospectus, un fund factsheet, etc., des documents qui sont tous disponibles de façon publique, auxquels on peut accéder sans vraiment creuser et qui permettent ainsi de comprendre ce qu’on achète.
Il faut savoir quels genres de titres on détient en sous-jacent, comment l’indice est construit; car ce sont tous des produits qui sont bâtis de façon systématique. Ainsi, contrairement à un gestionnaire de portefeuille qui, lui, va peut-être modifier sa façon de penser du jour au lendemain, ici, il s’agit d’une recette qu’on réplique. Il est donc très faisable de se documenter là-dessus pour l’investisseur.
Un deuxième point, c’est de déterminer si ce FNB est liquide, en se demandant : est-ce que ses sous-jacents sont liquides? Une fois qu’on a compris la méthodologie, après ça il faut l’appliquer dans un scénario. Est-ce que tous les sous-jacents peuvent se transiger à l’intérieur d’une journée. Est-ce qu’il détient des titres privés ou des obligations à rendements élevés, des petites cap. Ça peut être des actifs qui sont quand même liquides, mais qui, dans des périodes de volatilité, peuvent l’être moins. Mars 2020 a ouvert les yeux à plusieurs investisseurs qui se sont rendu compte que le FNB se transigeait à une prime ou un escompte. Un nouveau concept qu’on a redécouvert en période de volatilité, mais qui existe réellement.
Si les sous-jacents ne se transigent pas, malheureusement, il y a un coût qui est associé à la transaction du FNB en tant que tel.
Donc c’est quoi la méthodologie, est-ce qu’il est liquide et troisièmement, il faut comprendre comment le transiger s’il est liquide. Donc mettre des ordres limites sur le marché et non un ordre de marché. Cela permet de dire qu’on veut le FNB à un tel prix sinon on peut se retrouver dans des situations où le manque de profondeur peut augmenter le coût à chaque part supplémentaire que l’on achète.
Ce sont les trois points clés que je recommanderais de vérifier aux investisseurs et conseillers qui achètent des FNB.
FI : Quels éléments de vérification diligente liés à l’émetteur de FNB sont les moins bien compris ou devraient l’être davantage?
EJB : Je pense que la taille de l’émetteur et la force de cette entreprise sont des éléments importants et souvent sous-évalués. Est-ce que ça fait longtemps que cette firme fait ça? Est-ce que ça fait longtemps qu’elle offre des FNB? Est-ce qu’elle a déjà eu des FCP? Ce sont des points clés.
Il est important qu’une firme soit grosse, car si jamais quelque chose arrive, on peut être supporté par une autre ligne de business ou une autre gamme de produits. On a vu que dans les périodes de volatilité, lorsque des petits émetteurs lancent des stratégies, elles sont également plus volatiles et à risque de fermeture. Je pense que pour un investisseur, ça peut être une des pires choses parce qu’on se retrouve immobiliser dans quelque chose qui finalement ne nous offre plus ce service d’investissement-là.
Donc la taille est très importante comme le type de stratégie. Quelque chose de plus vanille a plus de probabilité de passer à travers le temps que quelque chose qui est peut-être plus exotique.
FI : Auriez-vous un conseil pour un conseiller qui commence à s’intéresser au secteur des FNB?
EJB : Je lui conseillerais de lire. Il y a beaucoup de documentations sur comment ce véhicule fonctionne réellement, c’est quoi la différence entre la gestion active et passive. Ce sont deux des éléments qui sont les plus importantes.
Donc, comprendre le véhicule, comment le transiger, comment faire ses vérifications. On mentionnait la vérification sur la liquidité et la taille de l’émetteur, ce sont toutes des démarches qu’on peut faire avec un minimum d’efforts.
Ceci dit, ça demande quand même un effort. Donc si vous êtes un investisseur, peut-être vous fier à un conseiller, et, si vous êtes un conseiller, peut-être vous fier à des ressources dans l’industrie. Que ça soit chez votre courtier ou auprès de firmes de gestion de portefeuille comme Fidelity. Ce sont toutes de bonnes sources d’informations qui sont à votre portée.
Je recommanderais également de faire la diligence avant de commencer. Mais une fois que vous allez commencer, vous allez voir les opportunités que ça peut vous apporter en termes de recrutement de nouvelles clientèles. Pour un investisseur, ça peut être de nouvelles allocations d’actifs. Bref, je pense que pour les conseillers ça va être important de répondre aux besoins à long terme de la plus jeune génération qui a grandi avec les FNB comme le véhicule principal d’investissement à leur portée. Donc, pour le futur, c’est à considérer.
Les opinions exprimées sont celles d’Étienne Joncas-Bouchard, Stratège, FNB, Fidelity Canada en date du 13 novembre 2023, et elles peuvent changer selon la situation des marchés et d’autres conditions.