Nous sommes d’avis que le gain ou la perte réalisés lors de la disposition d’une police d’assurance maladies graves est généralement de nature capitale. Cependant, en raison de l’exception édictée aux sous-alinéas 39(1)a)(iii) et 39(1)b)(ii) L.I.R., ce gain ou cette perte ne sera pas imposée comme un gain en capital ou déduit comme une perte en capital pour l’application de la Loi de l’impôt sur le revenu.
Or, les sous-alinéas dont il est question ici ne font qu’indiquer que les polices d’assurance, quelles qu’elles soient, ne génèrent pas de gain ou de perte en capital.
De plus, pour la société cessionnaire, celle qui bénéficierait du transfert, le paragraphe 15(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu (LIR) – avantage imposable à un actionnaire – ne s’appliquerait pas.
Ça, c’était l’an dernier…
Cette année, on voulait compléter le portrait. On voulait savoir quels pourraient être les impacts pour un transfert au profit d’un actionnaire physique. On voulait ainsi savoir si un avantage imposable devrait être calculé si un actionnaire recevait sa police de sa société.
Ici, les choses sont moins drôles. Avant de parler du pot, parlons des fleurs. Un tel transfert est considéré de la même manière par l’ARC pour la société cédante qu’un transfert au profit d’une société. Autrement dit, pas plus de gain ou de perte en capital que dans l’autre cas.
Normes actuarielles à définir
Là où c’est plus grave, c’est qu’on vient dire que le paragraphe 15(1) LIR devrait s’appliquer, si la société cédante ne reçoit aucune contrepartie et si aucun dividende en nature n’est déclaré. La valeur de l’avantage imposable pourrait être la juste valeur marchande (JVM) de la police.
Voilà. C’est dit. On ne pourra pas, de façon certaine, sortir une police d’assurance contre les maladies graves d’une société en faveur d’un individu sans payer d’impôt.
Cela dit, il est évident que dans le cas où une police ne vaut rien, l’avantage serait nul… Mais comment en être sûr ? Ou comment faire cette évaluation ? Il faudra faire appel à des actuaires. Jusque-là, rien d’étonnant. Sauf que…
Les actuaires n’ont pas voulu entrer dans ce jeu depuis des années. La raison est simple : l’étendue des résultats possibles est trop grande. La valeur de ce genre de police est trop sensible aux hypothèses qui, d’ailleurs, ne font pas l’objet de normes actuarielles. Autrement dit, ce qui s’est fait jusqu’à maintenant, c’est un peu n’importe quoi. «Combien veux-tu que ça fasse ?» disait l’autre…
Cependant, comme il faudra se pencher sur la question, l’Institut canadien des actuaires (ICA) n’aura pas le choix de développer de telles normes, sinon ce sera un capharnaüm. Il y aura de plus en plus de cas. Il y aura des contestations à n’en plus finir, car l’ARC utilisera des hypothèses en sa faveur alors que le client fera le contraire, et tous deux auront raison… jusqu’à nouvel ordre.
L’évaluation de la JVM des polices d’assurance vie fait déjà l’objet d’un bulletin d’interprétation de l’ARC, et les actuaires ont développé des normes quant à ce type d’évaluation. Il faudra faire la même chose pour les polices d’assurance contre les maladies graves. Et pourquoi pas, tant qu’à y être, les polices d’assurance invalidité, qui elles aussi peuvent faire l’objet de tels transferts. C’est à suivre…