Ce mantra, Daniel Laverdière n’y a jamais dérogé. Il tire d’ailleurs une fierté d’être reconnu comme quelqu’un qui donne l’heure juste aux clients. «Je suis surtout réaliste. Quand c’est trop beau pour être vrai, souvent il y a anguille sous roche. Dans un certain sens, je suis expert pour trouver les anguilles sous les roches.»
Il se réjouit de constater que plusieurs études mettent aujourd’hui l’accent sur la valeur du conseil. «Je ne vis pas du placement ou de l’assurance, je vis du conseil.»
Il croit que les gens ont souvent besoin d’un guide pour les accompagner.
«Ma conjointe a un Ph. D. en physiologie de l’activité physique et me pousse pour que je fasse de l’activité physique. Elle m’offre régulièrement des conseils pleins de bon sens et me vante les bienfaits à long terme de l’activité physique sur la vie. Toutefois, mettre ses conseils en pratique, c’est une autre histoire. Ce n’est pas une question de logique et je le sais. Alors, lorsque je donne des conseils financiers aux gens, c’est la même histoire, et c’est pourquoi j’estime qu’il est important d’être accompagné.»
De même, Daniel Laverdière ne croit pas que l’évolution technologique constitue une menace pour le planificateur financier. «À la fin, même si l’outil a aidé à tout préparer, on a besoin d’un humain qui a le flair de savoir quel scénario tester, comment interpréter les résultats et poser le bon diagnostic.»
Daniel Laverdière estime qu’il est important de bien connaître ce dont on parle. Évoquant la retraite, il n’hésite pas à affirmer que ce qui détermine sa réussite, c’est l’épargne. «Ils sont nombreux à mettre l’accent sur l’optimisation fiscale. Bien sûr, le REER et le CELI, c’est majeur, le gain en capital aussi, mais l’essentiel, c’est d’amener de l’argent dans le boulier et d’avoir été discipliné. Il faut mettre l’accent sur le financier et après, avec le fiscal, on peut chercher à optimiser.»
Passionné de chiffres
C’est en jouant aux Lego et avec des dés pendant son enfance que Daniel Laverdière s’est intéressé aux mathématiques et aux probabilités. «Je me suis beaucoup amusé à faire des courses de dés, à observer quels chiffres sortaient le plus souvent. Quant aux Lego, construire exige des calculs pour déterminer le nombre de blocs requis par formats et par couleurs.»
Daniel Laverdière a ensuite nourri sa passion pour les statistiques en suivant les exploits des Canadiens de Montréal.
«Je m’amusais à consulter les classements, à partir desquels je développais de petits tableaux statistiques. Guy Lafleur inscrivait autant de points que les Canadiens en avaient au classement, et dans ces années-là, les Canadiens ne perdaient pas souvent. Ils finissaient l’année de 80 matchs avec 120 points, et Guy Lafleur récoltait aussi 120 points.»
Cette passion pour les mathématiques et les statistiques mène Daniel Laverdière à étudier l’actuariat à l’Université Laval.
La passion pour les statistiques sportives anime toujours Daniel Laverdière. Lorsqu’il offre des formations, qu’il rédige des articles ou qu’il rencontre des clients, il ne se prive pas du plaisir d’y avoir recours pour illustrer ses propos. Il est même d’avis que sa passion de «brasser des chiffres pour le sport» lui a permis de développer son habileté à concevoir des outils pour son travail.
«Plusieurs graphiques que je produis pour des clients ont d’abord été construits en brassant des statistiques sportives, par exemple pour estimer quelles équipes seront éliminées, dit-il. Ces simulations, je peux les appliquer à la Bourse, parce qu’elle n’est pas linéaire.»
Il ajoute : «Nous sommes dans un domaine de chiffres, de mathématique, alors il faut gratter un peu, investiguer et simuler des scénarios. Moi, la fiscalité, je l’ai apprise avec Excel, dont je suis un fervent utilisateur».
D’actuaire à planificateur financier
Une fois diplômé, il a d’abord travaillé à titre d’actuaire chez Compagnie Wyatt (devenue Watson Wyatt en 1995 et Willis Towers Watson en 2016) en 1981, puis chez Optimum Actuaires & Conseillers en 1989. En cours de route, soit en 1983, il obtient son titre d’Actuaire associé (A.S.A.).
Dans les années 1990, toutefois, la situation change et la demande de services-conseils actuariels enregistre une forte diminution. «Je venais de quitter Wyatt pour aller chez Optimum, j’étais l’un des derniers arrivés et j’ai été licencié. Même si je désirais rester dans le secteur de la retraite, j’ai alors pensé que ce serait bien d’aller du côté des patrons», raconte Daniel Laverdière.
Cependant, la recherche d’un nouvel emploi s’étire et Daniel Laverdière est tenté de se lancer à son propre compte. «Comme expert en retraite, je me suis dit que je pourrais certainement donner des conseils», évoque-t-il.
C’est ainsi qu’il découvre le rôle de planificateur financier. Il obtient son titre de planificateur financier (pl. fin) auprès de l’Institut québécois de planification financière (IQPF) en 1996. La même année, il devient directeur de la planification financière à la Financière des professionnels. En 1997, il reçoit son titre de Certified Financial Planner (CFP).
Rétrospectivement, sans dire qu’il regrette de ne pas s’être lancé à son compte, Daniel Laverdière se demande quelles auraient été son histoire et sa carrière s’il avait persisté dans cette voie. «Le fait d’être salarié d’une entreprise qui me donne carte blanche pour offrir mes opinions, c’est rassurant et ça m’a permis de me réaliser à bien des égards», témoigne-t-il.
Daniel Laverdière s’est beaucoup engagé auprès de l’IQPF, notamment en siégeant au conseil d’administration, puis en devenant formateur. En 2002, il se joint au comité de rédaction de la revue La Cible, qu’il préside depuis 2008.
En 2009, Daniel Laverdière est nommé «Membre à vie» de l’IQPF pour sa contribution à l’avancement de la profession.
«À l’époque, j’étais vice-président du conseil d’administration de l’IQPF, et c’est moi qui ai eu la chance de le présenter. J’étais honoré de pouvoir le faire parce que j’admire beaucoup ce que fait Daniel», indique Martin Dupras, planificateur financier indépendant et président-fondateur de ConFor financiers.
Pour Martin Dupras, Daniel Laverdière est sans doute la personne la plus cartésienne qu’il connaisse et celui «qui a les graphiques les plus incroyables de toute la communauté de la planification financière. Il est très minutieux et fait preuve d’une rigueur incroyable. Ses arguments sont étoffés et il est difficile de le prendre en défaut. Toujours très sûr de ses opinions, il va défendre ses points de vue bec et ongles».
Martin Dupras et Daniel Laverdière se côtoient depuis une quinzaine d’années. C’est aussi le cas de Nathalie Bachand, cofondatrice de Bachand Lafleur Preston, groupe conseil et présidente de Question Retraite, avec qui il a effectué sa première animation à un congrès de l’IQPF, en 1996-1997 à Chicoutimi, se remémore-t-il.
En 2009, Daniel Laverdière, Nathalie Bachand et Martin Dupras ont réalisé ensemble les «Normes d’hypothèses de projection» de l’IQPF. Mises à jour chaque année, elles contiennent notamment des estimations du taux d’inflation, du taux d’emprunt, de l’espérance de vie et du rendement de cinq types de placement. En 2015, ces normes ont également été adoptées par le Financial Planning Standards Council (FPSC).
«Nous sommes très fiers d’avoir réalisé les Normes d’hypothèses de projection. Personnellement, je suis content d’avoir laissé cette trace-là, d’autant plus que les autres provinces les ont adoptées, ce qui est très bien pour une réalisation issue de trois Québécois», signale Daniel Laverdière.
En 1999, il fait son entrée à la Banque Nationale, puis rejoint Gestion Privée 1859 en 2008.
Gestion Privée 1859 offre des services et des conseils sur l’ensemble de la gestion de patrimoine des particuliers fortunés et compte aujourd’hui plus de 250 employés. Son actif sous gestion atteignait 18 G$ en septembre 2016, alors qu’il était de 15 G$ en novembre 2015. À titre de comparaison, la gestion privée a affiché une progression de l’actif sous gestion annualisée en fonds communs au Canada de 21,5 % de 2005 à 2015, selon Investor Economics.
«Il s’agit d’une croissance que pourraient nous envier tous nos concurrents et nous voulons poursuivre sur cet élan», indique Éric Bujold, président de Banque Nationale Gestion Privée 1859.
Au cours des derniers mois, cette filiale de la Banque Nationale a notamment revu son image de marque et raffiné son offre de services, en plus d’amorcer la mise en oeuvre d’un plan d’expansion qui l’a menée à ouvrir une succursale à Calgary et une autre à Vancouver.
Ces efforts d’implantation ont jusqu’ici permis de recruter une trentaine de personnes dans l’Ouest canadien, dont de nombreux experts, afin d’avoir une présence locale forte, selon Éric Bujold.
Les équipes de Montréal sont pour leur part mises à contribution et se rendent dans l’Ouest afin que «tout le monde, d’un océan à l’autre, partage la même vision et les mêmes valeurs».
Daniel Laverdière a ainsi vu croître son équipe d’experts avec l’embauche d’une ressource à Calgary et s’attend à de nouvelles embauches à Vancouver ainsi qu’à Toronto, où se trouve un bureau-satellite. Les défis que pose ce projet de développement dans l’Ouest canadien le réjouissent.
«Je veux être davantage présent hors Québec. Les Normes d’hypothèses de projection m’ont permis de connaître des gens au FPSC, et mon titre de CFP est un bel atout. Il me faut toutefois trouver les bonnes tribunes par rapport à notre développement», dit-il.
Âgé de 58 ans, Daniel Laverdière oeuvre dans la retraite depuis le début de sa carrière. Il est mentor dans le domaine de la retraite à l’IQPF depuis 2013. «J’ai deux filles, et l’une d’elles m’a rendu grand-père, alors je commence à voir la retraite sous un autre oeil et ce n’est plus juste de la théorie. Ça renforce ma conviction selon laquelle donner le bon conseil apporte vraiment une valeur ajoutée.»