Dans 20 ans, les 65 ans et plus représenteront le quart de la population, soit le deuxième pourcentage le plus élevé dans le monde après le Japon.
Bon nombre de personnes âgées mourront sans avoir eu besoin de soins de longue durée, dans une proportion de une personne sur trois, selon les statistiques de chercheurs de l’Institut de recherche en politiques publiques (IRPP), qui se sont penchés sur la question dernièrement (http://tinyurl.com/kkzdkra).
En revanche, une personne sur cinq aura besoin de soins de longue durée pendant au moins cinq ans, et une personne sur trois, pendant une période de un à cinq ans. Enfin, un petit pourcentage nécessitera des soins de longue durée pendant moins d’un an.
Comme on le voit, deux personnes âgées sur trois en auront probablement besoin vers la fin de leur vie. Or, les coûts sont beaucoup plus élevés si les soins sont prodigués en établissement plutôt qu’à domicile.
Le projet de loi qui sera déposé cet automne aura pour objectif de faire passer de 15 à au moins 40 % le pourcentage des coûts de soins à domicile financés par l’État. «Les services de base seront couverts. Mais il reste une place pour l’assurance privée», constate Yves Millette.
Cela dit, la situation est-elle mûre pour l’achat d’assurance soins de longue durée ? Car les conseillers savent à quel point ce produit est difficile à vendre. En 2011, dernière année pour laquelle des chiffres sont disponibles, les nouvelles primes en assurance soins de longue durée (ASLD) s’établissaient à 0,4 M$ au Canada, par rapport à 1,1 G$ en assurance vie individuelle.
Obstacles à l’ASDL
Dans un article publié en 2012 dans La Revue canadienne du vieillissement, le ministre de la Santé et des Services sociaux, Réjean Hébert, faisait remarquer que les personnes âgées ont peu d’intérêt à acheter des produits d’assurance pour couvrir la dépendance (http://tinyurl.com/m93htoo).
Réjean Hébert, qui était alors professeur à la Faculté de médecine et des sciences de la santé de l’Université de Sherbrooke, constate que la plupart des personnes âgées pensent que l’État les prendra en charge en cas de besoin.
Réjean Hébert mentionne également l’importance du «déni». Il cite une étude selon laquelle une personne âgée sur deux pense que la probabilité de devenir dépendante est de zéro.
Toutefois, ajoute-t-il, la situation est différente chez nos voisins du Sud. Il note que les bénéficiaires de polices d’assurance semblent «satisfaits» de ces produits, qui couvrent la plupart des services nécessaires, que ce soit à domicile ou en établissement.
Aux États-Unis, l’assurance soins de longue durée représente un marché intéressant. Plus de 10 millions d’Américains y souscrivent. Comment expliquer cette différence Nord-Sud ? Elle s’explique en regard des subventions de l’État. Puisqu’elle est considérée comme une dépense médicale, la souscription d’un contrat d’assurance soins de longue durée est facilitée par des crédits d’impôt.
En 2013, l’État fédéral américain octroyait une limite maximale de 360 $ pour les moins de 40 ans, de 680 $ pour les 40 à 50 ans, de 1 360 $ pour les 50 à 60 ans, de 3 640 $ pour les 60 à 70 ans et de 4 550 $ pour les plus de 70 ans. De plus, des États comme le Maine et le Maryland ajoutent une autre «couche» de subventions (http://tinyurl.com/2e87c6e).
Faciliter l’épargne privée
C’est pourquoi Yves Millette estime que le Québec et le Canada devraient emprunter une voie semblable à celle des États-Unis. «Nous pourrions adapter le modèle du Régime enregistré d’épargne-études (REEE) à une éventuelle épargne en vue des soins de longue durée. Chaque année, la somme épargnée pourrait être bonifiée par des subventions gouvernementales», dit-il.
Mis à part les États-Unis, les pays qui facilitent ainsi l’épargne privée pour permettre l’achat d’assurances soins longue durée sont très rares. Les chercheurs de l’IRPP, Michel Gagnon et Nicole Bernier, mentionnent un seul autre cas, à savoir celui de Singapour.
Selon ces chercheurs, le Canada pourrait innover en instituant un compte d’épargne pour soins de longue durée, comportant soit une aide fiscale directe, soit la non-imposition des revenus qui seraient générés comme dans un CELI.
À l’heure actuelle, rappellent les chercheurs de l’IRPP, les personnes âgées qui n’ont rien prévu ont peu de marge de manoeuvre. Elles peuvent toujours recourir au prêt hypothécaire inversé.
Toutefois, cette solution ne serait pas nécessairement appropriée, car elle se heurte à la valeur moyenne des maisons, trop basse pour se prêter à l’exercice. Par exemple, un homme de 79 ans qui vit seul et qui possède une maison de 200 000 $ ne retirerait que 8 000 $ par an d’une hypothèque inversée.