C’est que les ACVM suggèrent une classification du risque, calculée à partir de l’écart-type des rendements totaux des 10 dernières années, qui se divise en six catégories : faible (écart-type de 0 à 2 %), faible à moyen (2 % – 6 %), moyen (6 % – 12 %), moyen à élevé (12 % – 18 %), élevé (18 % – 28 %), très élevé (+ 28 %).

Pour calculer l’écart-type, les gestionnaires de fonds doivent utiliser les rendements totaux mensuels des 10 dernières années, selon l’Institut des fonds d’investissement du Canada (IFIC) : «Pour les fonds nouvellement constitués ou ceux qui n’ont pas l’historique de 10 ans nécessaire, le gestionnaire doit utiliser les rendements mensuels d’un indice de référence afin d’imputer les données manquantes».

Or, actuellement, la plupart des firmes de fonds communs se conforment déjà de façon volontaire à la grille de l’IFIC qui découpe ce risque en cinq catégories, plutôt qu’en six.

Ce découpage utilise la même méthode de calcul du risque que celui des ACVM, mais est légèrement moins conservateur que celui des ACVM. Par exemple, les catégories de risque «faible», «faible à moyen» et «moyen» ont des bandes d’écart-type respectives allant de 0 à 6 %, de 6 à 11 % et de 11 à 16 %.

L’Association canadienne du commerce des valeurs mobilières (ACCVM) souligne dans sa réponse aux ACVM que le changement demandé serait le troisième en moins de trois ans. Avant 2011, les six catégories du classement ont été ramenées à cinq catégories, et retourneraient maintenant à six, déplore le groupe.

Complexe et coûteux

Le plus ardu, soutient l’IFIC, tient à tous les reclassements auxquels il faudrait procéder dans les comptes des clients.

«Nous pensons que les ACVM ont beaucoup sous-estimé les coûts et les dislocations potentielles entraînés par la méthodologie proposée», peut-on lire dans les commentaires de l’IFIC.

«Un sondage interne montre que toutes les firmes membres de l’IFIC seraient obligées de faire un reclassement du risque à la hausse dans un grand nombre de leurs fonds, plusieurs firmes devant le faire dans plus de 60 % de leurs fonds», apprend-on.

En conséquence, les systèmes informatiques des manufacturiers de fonds devraient être ajustés.

De plus, plusieurs conseillers devraient revoir le profil de risque d’un grand nombre de leurs clients et cela pourrait accroître les risques de plaintes et de recours légaux de la part des investisseurs, craint l’IFIC.

Prenons l’exemple d’un client de 85 ans ayant un profil conservateur qui, au moment de son décès, se retrouve avec un fonds précédemment classé à faible risque, mais qui est reclassé à un niveau de risque moyen.

Si le fonds connaît une performance négative, on peut imaginer les héritiers entreprenant un recours légal contre le conseiller qui a laissé passer une telle méprise.

«Les coûts en paperasse, en productivité perdue, en frais de transaction et en frais de gestion seront augmentés – la plupart payés ultimement par les investisseurs», fait ressortir la Fédération des courtiers en fonds mutuels.

L’IFIC n’est pas en désaccord avec tous les éléments de la proposition des ACVM. Par exemple, le lobby considère que la mesure de risque par l’écart-type est la plus appropriée.

Il est d’accord avec une lecture de la volatilité sur une période de dix ans. Pour les fonds nouvellement constitués ou ceux qui n’ont pas l’historique de 10 ans nécessaire, le gestionnaire doit utiliser la volatilité des rendements mensuels d’un indice de référence afin d’imputer les données manquantes, selon l’IFIC.

Méthodologie contestée

Toutefois, plusieurs intervenants demandent que la notion même de risque soit remise en question avant qu’on ne procède à une grille uniforme visant à le catégoriser. La notion de risque sur laquelle s’appuient les ACVM est trop partielle et cerne mal ce que le client moyen comprend par risque.

«Selon mon expérience, les investisseurs comprennent le risque comme la fréquence possible de perdre, combien ils peuvent perdre et combien de temps il leur faudra pour récupérer leurs pertes», écrit dans son commentaire Dan Hallett, spécialiste des fonds d’investissement au HighView Financial Group, à Toronto, mais qui s’exprime ici à titre personnel.

C’est un point de vue repris par plusieurs, tant Morningstar Canada que FAIR Canada et même la Fédération des courtiers en fonds mutuels.

Certains proposent d’avoir recours à un mélange de mesures de risque, mais s’il faut recourir à une seule mesure. Morningstar propose qu’il s’agisse de la valeur à risque conditionnelle (VaRC), une mesure qui s’appuie sur la notion de base de valeur à risque (VaR).

La VaR cherche à donner une idée à la fois de la probabilité et de l’ampleur d’une perte possible. Par exemple, une VaR à 5 % nous indique qu’il y a 5 % de possibilités de pertes dans une période donnée. L’ampleur de perte nous est donnée par un deuxième pourcentage, par exemple 10 %. Ainsi une VaR à 5 % de 10 % nous indique que sur un investissement de 10 000 $, on a 5 % de possibilités de perdre 1 000 $.

La VaRC fait un pas de plus en indiquant la possibilité de perdre au-delà de la VaR. Si la VaR est dépassée, quelle est la perte moyenne en capital qui peut être subie ? C’est ce qu’on appelle en anglais le tail risk, ou risque d’une variation de cours se situant dans la queue de courbe de distribution normale. Ainsi, une VaRC à 5 % de 20 % nous avertit que la perte moyenne dans les pires 5 % des cas est de 20 %.

Tout comme l’écart-type, la notion de VaRC requiert un calcul spécifique, mais n’est pas plus complexe à saisir, juge Morningstar.

Cependant, Dan Hallett propose d’aborder la question du risque d’une façon plus «anecdotique» et, du coup, plus accessible.

Par exemple, pour un fonds, il conseillerait de faire ressortir différentes mesures sur tout l’historique du fonds : meilleur rendement sur une période de cinq ans et pire rendement pour une période équivalente, comparé à la période de cinq ans moyenne.