Mais attention, l’enrichissement injustifié n’est pas la panacée pour les ex en colère! C’est un recours qui peut être appliqué dans toutes sortes de situations juridiques où une personne s’est enrichie en causant du même coup l’appauvrissement d’une autre.
« Le meilleur exemple est celui d’une femme qui aurait abandonné sa carrière pour travailler dans l’entreprise de son conjoint de fait sans que ce dernier ne lui verse de salaire. Lorsqu’il la quitte, elle se retrouve sans emploi et dans une situation financière précaire », explique Me Alain Roy, professeur titulaire à la Faculté de droit de l’Université de Montréal.
Le professeur est toutefois catégorique: il n’y a pas de garantie lorsqu’on évoque l’enrichissement injustifié. Ce n’est pas non plus un recours légal particulièrement conçu pour les relations familiales et, ajoute-t-il, les tribunaux vont exiger que le conjoint prouve qu’il a fourni plus qu’une simple contribution domestique.
« La preuve de l’enrichissement sans cause est habituellement rigide, mais, en matière familiale, les tribunaux se montrent plus souples puisque les conjoints de fait tiennent rarement une comptabilité précise de leur apport aux finances du couple », avance Alain Roy.
Le bon contrat
Un client entrepreneur qui n’est pas marié, mais qui utilise le travail de sa tendre moitié est-il donc obligé de lui verser un salaire? Pas nécessairement, selon Hélène Marquis, directrice régionale du service consultatif de gestion de patrimoine chez Gestion privée de portefeuille CIBC, puisqu’on peut aussi choisir de rédiger une convention de vie commune qui, en cas de séparation, prévoit le versement d’une prestation compensatoire.
» La convention devrait prévoir le versement d’une certaine somme en cas de rupture, indique-t-elle. De plus, lorsqu’un des deux conjoints de fait décide de rester à la maison, même s’il ne travaille pas dans l’entreprise familiale, il n’est pas illégal de prévoir le versement d’une aide alimentaire pour une certaine période en cas de séparation. Ça lui permettra de retourner à l’école ou de prendre le temps nécessaire pour réintégrer le marché du travail. »
Tous les contrats ne sont toutefois pas égaux et il faut s’assurer d’avoir un très bon notaire qui inclura, notamment, des mécanismes de révision en cas de changement de situation, soutient Alain Roy. Le notaire pourrait, à cet égard, transposer simplement le cadre qu’on retrouve déjà en matière matrimoniale.
» C’est un contrat, et même s’il peut paraître injuste, il restera en vigueur. Donc si monsieur s’est engagé à payer 1000$ par mois à madame et qu’il perd son emploi, il devra quand même continuer à verser cette somme qui est considérée comme une dette civile. Sans clause de révision, il ne pourra pas simplement se présenter devant le tribunal comme un ex conjoint divorcé pour invoquer un changement dans sa situation. »
De plus, comme on le ferait avec un testament, il convient de réviser le contrat de vie commune de façon périodique. Par exemple, souligne Hélène Marquis, il serait préférable d’ajuster les sommes prévues lorsque de grandes périodes de temps se sont écoulées. « Si on prévoyait le versement de 50 000$ en dédommagement en 1950 c’était très généreux pour l’époque alors que ce n’est pas du tout le même montant aujourd’hui! », note la planificatrice financière.
L’hypermédiatisation de l’affaire Lola contre Éric remettra peut-être plusieurs pendules à l’heure dans le grand public quant aux droits et devoirs des conjoints de faits: « Erronément, les gens pensent qu’au bout d’un certain temps de vie commune, les conjoints de fait avaient les mêmes droits que les conjoints mariés alors que ce n’est pas le cas! Les gens n’ont pas beaucoup utilisé les conventions de vie commune jusqu’ici, mais j’espère qu’ils ne feront davantage dans le futur! »
Photo Bloomberg