Cependant, l’absence de consensus est notoire sur certains enjeux : faut-il scinder les commissions de suivi des frais d’acquisition des produits de placement ?
Par exemple, le modèle actuel de rémunération, dans lequel les commissions et les frais de gestion sont inclus dans une seule facture, ne convient pas à la pratique des conseillers «qui proposent des produits et services personnalisés», écrit le Financial Planning Standards Council (FPSC).
L’idée que l’industrie puisse généraliser la pratique à honoraires ne fait pas plus consensus.
Certains, notamment dans le secteur du plein exercice, soutiennent cette idée.
D’autres, comme le Groupe Investors, font valoir que la fin des commissions au Royaume-Uni a créé une catégorie d’investisseurs qui n’ont plus accès au conseil de placement.
La rémunération actuelle des conseillers en épargne collective, où ce sont les manufacturiers de produits qui paient les conseillers pour les produits et services qu’ils offrent, suscite des inquiétudes chez les régulateurs, qui évoquent le manque de clarté pour les consommateurs.
Ils craignent en outre que des ventes de fonds communs soient faites par les conseillers dans le but de générer des revenus. À cet égard, un large consensus se dégage sur le fait qu’il est important que les investisseurs s’informent sur ce qu’ils paient.
Certains estiment cependant que peu de clients des conseillers se soucient vraiment des frais qu’ils paient.
«Nous croyons qu’il faut toutefois éviter de tomber dans la surabondance d’information à fournir aux investisseurs afin de ne pas accentuer inutilement la confusion chez ceux-ci», écrit le Groupe Cloutier dans son mémoire.
Les investisseurs qui en font la demande peuvent obtenir les détails de la rémunération de leur conseiller, fait valoir l’agent général.
Dans un mémoire conjoint, Mérici Services financiers et Planifax, deux cabinets d’épargne collective, abondent dans ce sens.
Toutefois, ils mettent en garde contre l’excès de zèle : sur le terrain, ils constatent «que les investisseurs ont une forte tendance à se fier à leur conseiller» pour ces questions.
Ils relèvent en outre que les investisseurs ont accès aux informations concernant les commissions et les frais divers des fonds communs.
Pour la Financière Banque Nationale, qui insiste sur l’importance de l’éducation financière des investisseurs, «une meilleure divulgation sera beaucoup plus adéquate» que de présenter séparément les commissions et les frais de gestion (unbundling).
L’expérience américaine montre d’ailleurs que le fait de séparer les frais payés pour les produits de ceux payés pour le conseil «a fait augmenter les coûts».
Commissions = services
Autre enjeu soulevé par les ACVM, celui de la réglementation des services offerts en échange des commissions de suivi.
«Nous pourrions faire valoir que moins le conseiller offre de services à un client, moins ce dernier est susceptible de continuer à faire affaire avec lui», écrit la Financière SunLife.
Une opinion que partage le Groupe Investors.
Le Mouvement Desjardins argumente en outre que les commissions de suivi ne servent pas qu’à vendre des produits.
«La convenance [des placements], les transferts de fonds, les conseils, le rééquilibrage des portefeuilles, la mise en place de programmes d’épargne» ne sont que quelques-uns des nombreux services qui sont offerts par les conseillers en échange de ces commissions.
Le problème soulevé par les ACVM quant aux conflits d’intérêts qui pourraient survenir, alors qu’un conseiller pourrait vendre plus de produits pour augmenter ses revenus, est théorique, selon plusieurs des intervenants à la consultation.
Par ailleurs, «alors que certains manufacturiers offrent des taux de commissionnement légèrement plus élevés, ces différences sont minimes et n’incitent pas vraiment à privilégier un produit plutôt qu’un autre», souligne Primérica dans son mémoire.
Déontologie
L’ensemble des professionnels québécois estime ainsi que les services de conformité et la déontologie, notamment, balisent l’offre de produit.
«Puisque la commission de suivi est basée sur un pourcentage de l’actif du client», poursuit Desjardins, tant le conseiller que son client ont intérêt à faire augmenter l’actif.
Par ailleurs, tous les intervenants expliquent que les structures de rémunération en place favorisent la concurrence entre les différents acteurs de l’industrie.
Cette concurrence, qui s’exprime entre autres dans la prestation de services et les produits offerts, doit être maintenue.
L’encadrement déontologique en place, au Québec du moins, est suffisant.
Ainsi, la Chambre de la Sécurité financière (CSF) écrit que «la solution aux problèmes soulevés par les ACVM concernant les commissions de suivi doit passer par la responsabilisation des conseillers. […] L’approche de micro-gestion envisagée par les ACVM dans leur document de consultation irait à l’encontre de ce principe».
Enfin, s’il y a consensus dans l’industrie, il existe également un consensus au sein des groupes d’investisseurs.
Sauf qu’ils estiment, quant à eux, que l’industrie est rongée par les conflits d’intérêts.
Pour le Mouvement d’éducation et de défense des actionnaires, il est impératif qu’on «remette l’investisseur au centre des préoccupations du système financier».
La Fondation pour l’avancement des droits des investisseurs, FAIR Canada, est également d’avis que l’abolition des commissions payées par les manufacturiers est nécessaire. Cela permettrait de réduire «les conflits d’intérêts sérieux».