Que pense le Groupe financier Peak, qui a des activités pancandiennes dans différents secteurs, de cette possible adoption au Québec de l’ACCFM ? «Cela serait une bonne chose. J’aurais alors un seul régulateur plutôt que deux», affirme Jean Carrier, vice-président conformité. Actuellement, la firme doit subir des audits des deux entités de réglementation en plus de produire des états financiers pour chacune.

Quant aux frais liés aux actifs moyens sous administration, il faudra voir ce qui est inclus dans la facture, dit-il. Beaucoup de variables restent inconnues : devra-t-on payer pour un seul fonds d’indemnisation des investisseurs, optera-t-on pour celui de l’ACCFM ou pour celui de l’Autorité des marchés financiers (AMF), ou encore pour les deux ? s’interroge Jean Carrier.

Au Groupe Cloutier, moins de 5 % de l’actif sous administration est situé hors du Québec. À ce jour, les frais de l’ACCFM sont assez abordables. «Par contre, si on devait payer des frais pour la totalité de nos actifs sous gestion, y compris le Québec, la facture de l’ACCFM serait multipliée par 20 à 30, même chose pour leur fonds d’indemnisation», explique François Bruneau, directeur principal, administration et opérations de Groupe Cloutier.

«Dès qu’on grossit, cela devient beaucoup plus cher. Un courtier en Ontario qui a 2 G$ d’actif sous administration paiera bien plus avec l’ACCFM qu’avec l’AMF», ajoute Michel Kirouac, vice-président et directeur général du Groupe Cloutier.

L’avantage d’être uniquement avec l’ACCFM sera d’éviter de subir deux audits, l’un de l’AMF et l’autre de l’ACCFM. «Pour cette raison, nous prêchons pour l’adoption des règles de l’ACCFM. On voudrait que le Québec accepte ces règles afin d’être audité par l’ACCFM, et que l’AMF l’accepte, ou encore que l’AMF applique les règles de l’ACCFM et que ce soit satisfaisant pour le Québec et pour le reste du Canada», ajoute-t-il.

Approche rigide

Quelques cabinets au Québec ne sont pas membres de l’ACCFM. C’est le cas de Mérici Services financiers, un courtier en épargne collective indépendant qui compte une cinquantaine de représentants. L’entreprise ne voit pas d’un bon oeil la possible reconnaissance de l’ACCFM au Québec. Selon son chef de la conformité, Maxime Gauthier, cela aurait des conséquences importantes et néfastes pour l’industrie et pour la protection des consommateurs.

Ce dernier juge qu’il en coûterait beaucoup plus cher pour sa firme de changer d’organisme. «La structure de frais avantagerait essentiellement les courtiers en épargne collective qui ont énormément de représentants et dont les actifs sous gestion sont faibles», résume-t-il.

Maxime Gauthier met également en garde ceux qui pensent éviter de payer la cotisation à la Chambre de la sécurité financière (CSF) : «Tous ceux qui détiennent également un permis d’assurance de personnes en plus de celui en épargne collective ne s’en sortiront pas. Ils seront nombreux à devoir payer tout de même leur cotisation à la CSF. Et même si la CSF devait disparaître, il faudrait tout de même que quelqu’un s’assure de la déontologie et de la formation de ces représentants, et cela ne sera pas sans frais.»

«L’approche de l’ACCFM est prescriptive et rigide, calquée sur le modèle des grandes institutions financières canadiennes qui est plus coûteux à mettre en place et à opérer en plus de moins bien protéger les investisseurs, puisque leur fonds d’indemnisation couvre beaucoup moins que celui qui est actuellement géré par l’AMF. À tous points de vue, la reconnaissance de l’ACCFM représenterait un recul pour le Québec qui confierait à Toronto le soin d’encadrer l’industrie des fonds communs au Québec», soulignait Mérici dans un récent communiqué.

Économique pour Desjardins

Tous ne sont pas de cet avis. Dans son mémoire, le Mouvement Desjardins a calculé qu’en transposant ses activités d’épargne collective dans le cadre réglementaire en vigueur dans toutes les autres provinces, elle aurait économisé plus de 1,7 M$ seulement en 2014.

À ce surplus de dépenses, on doit aussi ajouter des coûts indirects liés «à la gestion simultanée de deux cadres réglementaires bien différents pour opérer partout au Canada et à l’obligation systématique de composer avec la CSF et l’AMF pour les affaires québécoises», peut-on lire dans son mémoire.