La branche financière de l’UNI Global Union a par ailleurs comptabilisé les données de 23 des 50 banques les plus importantes du monde avec lesquelles elle oeuvre. Résultat : en considérant les embauches et les pertes d’emplois, près de 100 000 des trois millions d’emplois de ces banques ont été perdus.

Ça se poursuivra

Les mises à pied devraient se poursuivre en 2014. Dans une étude publiée en décembre, la Deutsche Bank prévoit que le nombre d’emplois financiers au sein des dix institutions les plus importantes devrait chuter de 3 000 au cours de l’année. Si on ajoute à ce chiffre les pertes d’emplois dans les petites firmes et parmi le personnel administratif, celles-ci devraient atteindre 20 000.

L’Europe devrait être une fois de plus cette année la région la plus durement touchée.

Le rédacteur en chef du site eFinancialCareers, Paul Clarke, rappelle que les divisions des titres à revenu fixe des banques européennes ont subi des pertes plus importantes que celles des banques américaines au cours des dernières années. Cela les pousse à se réajuster.

Il cite l’exemple du marché des titres à revenu fixe, devises et matières premières (connu sous l’acronyme FICC, en anglais), dans lequel de grands noms américains comme Citigroup et JP Morgan «ont enregistré des gains depuis 2006». Ce qui n’a pas été le cas des institutions européennes et des banques d’investissement traditionnelles, ajoute-t-il.

Paul Clarke poursuit sa réflexion : «Qu’est-ce que cela signifie ? Dans un univers où les institutions doivent se concentrer sur leurs forces, les Société Générale et UBS de ce monde, qui performent mieux dans le marché des actions, pourraient bien se retirer du marché des FICC.»

Pour sa part, The Economist juge que ces réductions «découlent du fait qu’après des décennies de croissance des revenus – quoique ponctuées de brèves baisses -, le secteur bancaire est confronté à une décroissance structurelle.»

La publication britannique rappelle que paradoxalement, «la majorité des grandes institutions bancaires ont relancé l’embauche à la suite de la crise financière, espérant mettre la main sur des parts de marché, alors que certains de leurs concurrents faisaient des compressions».

Qui plus est, les revenus des banques d’investissement ont chuté de 5 % en 2013, atteignant un niveau 25 % plus bas que leur sommet de 2009. Dans une étude récente, McKinsey constatait que «malgré les signes de progrès accompli pour renouer avec la profitabilité, l’industrie bancaire mondiale continuait de lutter.»

La firme de consultation américaine soulignait notamment que le revenu des 13 banques d’investissement les plus importantes avait chuté de 10 % depuis 2009.

Pression sur les employés

Chose certaine, ces ajustements structurels, qui se traduisent par des pertes d’emplois, exercent une pression sur les employés. Certains spécialistes parlent maintenant de «climat de peur».

Andrew Gilliland, professeur de comptabilité et de finance à la Leeds Trinity University, au Royaume-Uni, confiait ceci au Yorkshire Post : «Les professionnels qui offrent des services financiers sont devant un important dilemme. Face à leurs clients, ils doivent parfois choisir entre l’intérêt de ceux-ci et leurs objectifs de ventes.»

Shalini Vohra, du Département de gestion de la Sheffield Hallam University, au Royaume-Uni, a constaté un renforcement de la pression qui provoque une hausse de la détresse psychologique parmi les employés de ce secteur. «Les employés doivent pouvoir en parler, dit-elle. Il est important que les directions favorisent une approche humaine» dans toutes ces restructurations.

Et au Canada ?

Au cours du dernier trimestre, plusieurs grandes banques canadiennes ont revu leurs effectifs à la baisse dans certains secteurs d’activité.

Au cours de l’exercice 2013, l’effectif en équivalent temps plein (ETP) de la Banque Laurentienne a été réduit de 214 postes, soit 5 % du nombre total d’employés, qui est actuellement de 3 987.

Elle n’est pas la seule dans cette situation. BMO Banque de Montréal a supprimé l’équivalent de 1 000 emplois au cours du quatrième trimestre de 2013, rapportait La Presse Canadienne à la suite de la conférence téléphonique donnée par le chef de l’exploitation Frank Techar, au début de décembre.

Pour sa part, la Banque Nationale comptait 229 employés de moins à la fin de l’exercice 2013 qu’à la fin de l’année précédente, pour un total de 19 691. Toutefois, l’effectif en ETP avait progressé de 0,2 %, pour atteindre 16 675 employés.

Cela dit, la situation au Canada est loin d’être aussi critique qu’en Europe. Au contraire, un rapide coup d’oeil aux effectifs des six grandes banques canadiennes permet de constater que certaines d’entre elles ont augmenté leurs effectifs depuis la crise.