Une telle éventualité est propice aux fonds négociés en Bourse (FNB) à taux flottant. Non seulement ils peuvent protéger le portefeuille obligataire contre une remontée des taux, mais ils permettent même à l’investisseur d’en profiter. Et en attendant, certains donnent des gains fort substantiels.

Structures diverses

Tous les FNB à taux flottant ne sont pas d’une même mouture. Tous ont comme particularité de lier leur performance à un panier d’obligations à taux flottant, mais ils ont des façons très différentes de le faire. Par exemple, les trois qui sont offerts chez iShares Canada, Invesco Canada et Les fonds négociés en Bourse Horizons diffèrent considérablement par leur structure et produisent des rendements et des risques fort différents.

Le plus visible de ces fonds est celui d’iShares, le DEX Floating Rate Note Index Fund (XFR), qui abrite 46 M$ d’actifs. Ce fonds répond au modèle classique des FNB. Il reproduit le rendement de son indice de référence en investissant dans des titres à taux variable dont la qualité varie de A à AAA. Il est composé à 89 % de titres gouvernementaux et à 11 % de titres d’entreprises ; le portefeuille est rééquilibré tous les mois.

Lancé en décembre 2011, le XFR a à peine plus d’un an. À ce jour, il a eu un rendement de 1,67 %, légèrement supérieur à celui des obligations gouvernementales de cinq à dix ans, supérieur aussi à la plupart des fonds de marchés monétaires. C’est d’ailleurs une façon dont les investisseurs se servent de ce FNB : «Par exemple, des gens qui ont de l’argent liquide dans un CELI le mettront dans notre FNB plutôt que dans un fonds de marché monétaire», indique Mary Anne Wiley, directrice d’iShares Canada.

Lancé en avril 2012 au pays, le FNB PowerShares Senior Loan Canadian Hedged Index (BKL) se présente comme un fonds de fonds. Le BKL reproduit uniquement le rendement de son grand frère américain, dont le symbole est BKLN et qui a été lancé en mars 2011.

Le BKLN investit dans des titres à plus haut risque, ce qu’on appelle aux États-Unis des prêts senior (senior loans), «une catégorie peu pratiquée au Canada», indique Michael Cooke, chef de la distribution chez Invesco, à Toronto. Ces titres obligataires sont de type pacotille ou à haut rendement (cote inférieure à BBB), en général émis par des entreprises. Leur taux est flottant et fixé selon un écart de 400 à 500 points de base au-dessus du LIBOR américain, de telle sorte que le rendement à maturité de tout le portefeuille est de 6,15 %.

Le niveau de risque est atténué par deux facteurs absents dans les obligations à haut rendement habituelles. Leur statut senior en cas de défaut de paiement donne priorité de remboursement à leurs détenteurs, et ils sont garantis par des actifs tangibles (immobilier, équipement, inventaire, etc.) et même intangibles (brevets, marques de commerce, etc.). Ces deux garanties composent un niveau de risque «pas plus élevé que pour d’autres catégories de titres de revenu fixe», assure Michael Cooke.

Si le rendement moyen à maturité est de 6,15 %, la performance du fonds, de son côté, a été de 13 % pour l’année se terminant le 31 octobre dernier. Et cela, avant même tout mouvement de taux à la hausse. Cet écart entre rendement et performance tient au prix moyen des titres en portefeuille de 97,28 $US, sous leur valeur nominale de 100 $US, explique Michael Cooke. «Le prix des obligations à haut rendement est plutôt de 106 à 107 $US, ce qui rend actuellement peu propice l’entrée dans ce marché», fait-il ressortir.

Protéger la liquidité

Comme c’est souvent le cas, Les fonds négociés en Bourse Horizons ont recours à une structure synthétique dans leur FNB Active Floating Rate Bond, de gestion active. Le moteur de ce fonds est un swap de type variable-fixe, un des plus répandus du monde, dans lequel Horizons est engagé avec la Banque Nationale (BN). Horizons compose un panier de titres de dettes d’entreprises dont la qualité va de BBB à AAA. Le rendement variable de ce panier est versé à la BN qui, en échange, garantit le rendement du FNB selon la formule suivante : le taux CDOR (équivalent canadien du LIBOR) + l’écart variable entre dettes d’entreprises et dettes gouvernementales (corporate spread). Ces deux taux combinés ont donné jusqu’ici un rendement total de 4,28 %.

Horizons fait appel à cette structure synthétique pour neutraliser autant que possible «les resserrements de liquidité qui surviennent dans les périodes de crise», explique Jaime Purvis, vice-président exécutif chez Horizons. Car la bonne qualité du panier de référence qui soustend le swap fait en sorte qu’au moment d’un resserrement de liquidité, la valeur nette des titres leur assure un meilleur marché, donc une chute moins brutale de leur valeur d’actif net.

Selon Yves Rebetez, ces FNB devraient faire partie du portefeuille de tout investisseur qui négocie des titres obligataires. «Considérez que, pour les dix prochaines années, les taux remonteront facilement de 3, 4 ou 5 points de pourcentage, prévoit-il. Qu’est-ce qu’il vaut mieux détenir ? Des titres de 10 ans qui donnent un rendement de 1 ou 2 % ? Ou un papier qui, au fil du temps, reflètera la montée des taux ?»