«Mettre l’accent uniquement sur la partie distribution peut embrouiller le client. Il oublie l’essentiel, qui est le RFG total ! Ça donne quoi de savoir que tel fonds charge 60 points de base, et l’autre, 70, quand le premier peut avoir un RFG de 2,3 %, et l’autre, de 2 % ? Le RFG total devrait être divulgué tous les ans, car c’est là qu’est l’ensemble du coût.»
Alors que les frais de distribution sont bien connus dans l’environnement des représentants indépendants, ceux-ci n’existent pas dans un groupe intégré où ils sont remplacés par une transaction comptable entre filiales, souligne Yvon Charest.
«Alors, comment comparer des pommes avec des pommes ? On demande de calculer des frais qui soient justes et raisonnables. Autrement dit, on demande d’inventer quelque chose pour s’éloigner du RFG total.»
Il n’est pas contre l’idée de divulguer au dollar près le RFG total pour les fonds communs et d’appliquer le même principe pour les fonds distincts, car dans les deux cas, on doit publier l’aperçu du fonds. Toutefois, il soutient que la divulgation est plus complexe en assurance.
«En épargne, c’est simple parce que c’est indiqué dans les Funds Facts. En assurance, tous les coûts sont intégrés dans le produit. Ce n’est pas quelque chose qui se sépare facilement.»
«Quand je calcule le prix de mon produit d’assurance, j’essaie d’estimer tous mes coûts pour les 30 prochaines années, incluant mes revenus de placements. C’est énorme le nombre d’hypothèses qui appuient tout cela. Ce n’est pas un produit qui se prête à la divulgation. Techniquement, je pourrais dire au client : « Vous êtes chanceux d’avoir acheté ce produit en 2010, car je vous ai donné 1 point de pourcentage de plus de rendement que celui que j’estimais dans ma prime ».»
Menace réglementaire
Par ailleurs, selon lui, plusieurs risques de nature réglementaire menacent les assureurs. Par exemple, la norme internationale d’information financière 4 (NIIF 4 ou IFRS 4 en anglais) à laquelle seront bientôt soumis les assureurs nuira au développement de produits offrant des garanties à long terme, comme l’assurance vie permanente à prime nivelée.
Yvon Charest milite en faveur d’un assouplissement des règles pour les assureurs canadiens. «C’est quand même curieux qu’on nous impose des normes internationales, alors qu’il n’y a plus aucun assureur international au Canada !»
Le projet de norme spécifique aux contrats d’assurance, IFRS 4 Phase 2, a été développé surtout en Europe, où la majorité des produits vendus sont des contrats d’assurance à court terme. Il prévoit que les assureurs devront évaluer leurs obligations à long terme à leur valeur marchande.
Les assureurs pourraient être contraints d’augmenter le prix des produits qui offrent des garanties à long terme ou carrément de les abandonner. «Le risque numéro un auquel s’exposent les assureurs en ce moment est la réglementation», dit Yvon Charest.
Pas étonnant qu’une équipe de 110 personnes travaillent en conformité chez iA, soit 2 % de l’effectif total !
Révisions législatives
Concernant la révision de la Loi sur les produits et services financiers (LDPSF), Yvon Charest prêche pour que l’Autorité des marchés financiers (AMF) soit le seul régulateur pour le représentant. «Si un distributeur peut être réglementé par une chambre et par l’AMF, un travail est fait en double. S’il y a de la duplication, ce sont des coût supplémentaires», remarque-t-il, soulignant que c’est toujours le consommateur qui paie en fin de compte.
Yvon Charest émet des réserves quant à la proposition du ministère des Finances qu’un consommateur puisse être indemnisé lorsqu’il est victime d’une fraude commise par un représentant certifié, même si la réclamation concerne la vente de produits que ce dernier n’était pas autorisé à offrir.
«Si un distributeur ne fait pas sa job de vendre des assurances, oui, on devrait indemniser ses clients, mais s’il fait de la fausse représentation sur d’autres types de produits ou qu’il vend des produits qu’il n’a pas le droit de vendre, les bons représentants de l’industrie n’ont pas à payer pour cela.»
Enfin, il croit que la Loi sur les assurances québécoise devrait être harmonisée avec les règles en vigueur dans le reste du Canada. Actuellement, au Québec, une société d’assurance de personnes qui veut vendre de l’assurance habitation doit avoir une entité légale différente avec des administrateurs différents. «Plus on gère un gros groupe, plus on multiplie les structures. Si on veut aider les sociétés québécoises à se développer, ça prendra un cadre réglementaire plus souple.» Lire aussi les textes en pages 4 et B4.
En collaboration avec Guillaume Poulin-Goyer