Drapeau des USA à Chicago avec des gratte-ciel sur fond.
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Donald Trump a été élu mercredi 47e président des États-Unis, un retour extraordinaire pour un ex-président qui a refusé d’accepter la défaite il y a quatre ans, a déclenché une violente insurrection au Capitole, a été reconnu coupable de crimes et a survécu à deux tentatives d’assassinat.

Avec sa victoire dans le Wisconsin, Donald Trump a franchi le cap des 270 grands électeurs nécessaires pour décrocher la présidence. Plus tôt lors de la soirée électorale, il avait mis la main sur d’autres États pivots, comme la Pennsylvanie, la Géorgie et la Caroline du Nord.

Cette victoire valide sa vision intransigeante de la politique. Au cours de la campagne, il a attaqué sa rivale démocrate, Kamala Harris, en des termes profondément personnels – souvent misogynes et racistes – tout en promouvant une image apocalyptique d’un pays envahi par des migrants violents.

Sa rhétorique grossière, associée à une image d’hypermasculinité, a trouvé un écho auprès des électeurs en colère – en particulier des hommes – dans une nation profondément polarisée.

En tant que président, il s’est engagé à poursuivre un programme centré sur la refonte radicale du gouvernement fédéral et la poursuite de représailles contre ses ennemis. S’adressant à ses partisans, tôt mercredi, Donald Trump a affirmé avoir remporté «un mandat sans précédent et puissant».

«Chaque citoyen, je me battrai pour vous, pour votre famille et votre avenir», a-t-il affirmé.

«Nous avons un pays qui a besoin d’aide, et il en a terriblement besoin. Nous allons réparer nos frontières. Nous allons tout réparer dans notre pays.»

Ce résultat couronne une campagne électorale tumultueuse et compétitive au possible, qui a été marquée par deux tentatives d’assassinat visant Donald Trump et un changement de candidat dans le camp démocrate à peine un mois avant la convention du parti.

Donald Trump héritera d’une série de défis lorsqu’il prendra ses fonctions, le 20 janvier prochain, notamment une polarisation politique accrue et des crises mondiales qui mettent à l’épreuve l’influence des États-Unis à l’étranger.

Sa victoire contre Kamala Harris, la première femme noire à diriger un grand parti, marque la deuxième fois qu’il bat une rivale féminine lors d’une élection présidentielle. En 2016, il avait défait Hillary Clinton.

Kamala Harris, l’actuelle vice-présidente, a pris les rênes de la campagne démocrate lorsque le président Joe Biden a quitté la course dans la foulée d’inquiétudes suscitées par son âge.

Malgré une poussée d’énergie initiale autour de sa campagne, elle a eu du mal à convaincre les électeurs désillusionnés qu’elle représentait une rupture avec l’administration impopulaire de M. Biden.

Kamala Harris ne s’est pas exprimée publiquement depuis l’annonce de la victoire de Donald Trump par les médias. Son coprésident de campagne, Cedric Richmond, a indiqué qu’elle prendrait la parole mercredi.

Donald Trump devient donc le premier ancien président à revenir au pouvoir depuis Grover Cleveland en 1892. Il est le premier président à avoir été condamné pour un crime et, à 78 ans, il est le plus âgé à être élu à ce poste.

Profondes refontes à prévoir

Donald Trump sera beaucoup moins soumis à des contrôles lorsqu’il reviendra à la Maison-Blanche. Il a l’intention de mettre en œuvre rapidement un programme de grande envergure qui transformerait presque tous les aspects du gouvernement fédéral américain.

Ses anciens détracteurs républicains au Congrès ont été en grande partie battus ou ont pris leur retraite. Les tribunaux fédéraux sont désormais remplis de juges qu’il a nommés. La Cour suprême des États-Unis, qui comprend trois juges nommés par Donald Trump, a rendu une décision accordant aux présidents une large immunité contre les poursuites.

Le langage et le comportement de Donald Trump pendant la campagne ont poussé de nombreux démocrates, de même que certains républicains, à prévenir que son retour à la Maison-Blanche pourrait causer un choc à la démocratie.

Il a fait l’éloge de dirigeants autoritaires, a prévenu qu’il déploierait l’armée pour cibler ses opposants politiques – qu’il qualifie d’«ennemis de l’intérieur» –, a menacé de prendre des mesures contre les médias en cas de couverture défavorable et a suggéré de suspendre la Constitution.

Moments décisifs

Alors que Kamala Harris a concentré une grande partie de son message sur des thèmes positifs, Donald Trump a canalisé un puissant sentiment de colère et de ressentiment parmi les électeurs.

Il a profité des frustrations liées aux prix élevés et des craintes concernant la criminalité et les migrants entrés illégalement dans le pays sous l’administration de M. Biden. Il a également utilisé les guerres au Moyen-Orient et l’invasion de l’Ukraine par la Russie pour démontrer que le monde est en proie au chaos sous les démocrates.

C’est une formule que Donald Trump a perfectionnée en 2016, lorsqu’il s’est présenté comme la seule personne capable de résoudre les problèmes du pays.

Cette campagne a souvent viré à l’absurde, Donald Trump amplifiant des rumeurs bizarres et démenties selon lesquelles des migrants volaient et mangeaient des chats et des chiens de compagnie dans une ville de l’Ohio. Il a aussi donné le coup d’envoi d’un rassemblement en faisant l’éloge des organes génitaux du légendaire golfeur Arnold Palmer.

Mais le moment décisif a peut-être eu lieu en juillet, lorsqu’un homme armé a ouvert le feu lors d’un rassemblement de Donald Trump à Butler, en Pennsylvanie. Une balle a effleuré l’oreille de Donald Trump et tué l’un de ses partisans. Le visage maculé de sang, Donald Trump s’est levé et a levé le poing en l’air en encourageant ses partisans à se battre.

Des semaines plus tard, une deuxième tentative d’assassinat a été déjouée, lorsqu’un agent des services secrets a repéré le canon d’une arme à feu qui dépassait d’un buisson alors que Donald Trump jouait au golf.

Retour spectaculaire

Le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche semblait peu probable lorsqu’il a quitté Washington, en 2021, en tant que personnage diminué dont les mensonges sur sa défaite ont déclenché une violente insurrection au Capitole américain.

Les démocrates, qui contrôlaient la Chambre des représentants, l’ont rapidement mis en accusation pour son rôle dans l’insurrection, faisant de lui le seul président à avoir été mis en accusation deux fois. Il a été acquitté par le Sénat américain, où de nombreux républicains ont fait valoir qu’il ne représentait plus une menace parce qu’il avait quitté ses fonctions.

Mais depuis sa station balnéaire de Mar-a-Lago en Floride, Donald Trump – aidé par certains républicains élus – s’est efforcé de maintenir sa pertinence politique.

À l’approche des élections de mi-mandat, en 2022, Donald Trump a utilisé son influence pour s’affirmer comme le leader incontesté du parti. Ses candidats ont presque toujours remporté leurs primaires, mais certains ont été défaits lors d’élections que les républicains considéraient comme à leur portée.

Si l’avenir de Donald Trump était incertain, le portrait a changé en 2023 lorsqu’il a dû faire face à une vague d’inculpations au niveau des États et au niveau fédéral pour son rôle dans l’insurrection, sa gestion d’informations classifiées et son ingérence électorale.

Il a utilisé ces accusations pour se présenter comme la victime d’un gouvernement zélé, un argument qui a trouvé un écho auprès d’une base républicaine de plus en plus sceptique – voire carrément hostile – aux institutions et aux structures de pouvoir établies.

Donald Trump a facilement remporté la nomination de son parti, sans jamais participer à un débat contre les autres candidats républicains.

Accusations criminelles

En mai, Donald Trump a été reconnu coupable à New York de 34 chefs d’accusation pour un projet visant à influencer illégalement l’élection de 2016 en versant de l’argent à une actrice de films pour adultes. Il risque d’être condamné plus tard ce mois-ci, mais sa victoire pose de sérieuses questions quant à savoir s’il sera un jour puni.

Il a également été reconnu coupable dans deux autres affaires civiles à New York: l’une pour avoir gonflé ses actifs et l’autre pour avoir abusé sexuellement de la chroniqueuse E. Jean Carroll en 1996.

Donald Trump fait l’objet d’accusations criminelles supplémentaires dans une affaire d’ingérence électorale en Géorgie qui s’est enlisée. Au niveau fédéral, il a été inculpé pour son rôle dans la tentative d’annuler les résultats de l’élection de 2020 et pour avoir mal géré des documents classifiés. Lorsqu’il deviendra président, le 20 janvier, Donald Trump pourrait nommer un procureur général qui retirerait les accusations fédérales.

À son arrivée à Washington en 2017, Donald Trump ne connaissait pas grand-chose aux leviers du pouvoir fédéral. Son programme a été contrecarré par le Congrès et les tribunaux, ainsi que par des membres de haut rang de son personnel qui ont pris sur eux de servir de garde-fous.

Cette fois, Donald Trump a déclaré qu’il s’entourerait de fidèles qui appliqueront son programme, sans poser de questions, et qui arriveront avec des centaines de projets de décrets, de propositions législatives et de documents politiques approfondis en main.