Option consommateurs partageait ce point de vue en 2013, lors d’une consultation de l’Autorité des marchés financiers (AMF) : «Le FISF abandonne à leur sort un grand nombre de consommateurs dont plusieurs pourtant ont pris les précautions nécessaires en s’assurant de faire affaire avec des personnes certifiées.»
L’organisme propose donc qu’on étende la couverture du FISF afin d’indemniser les victimes d’un conseiller, même s’il a commis une fraude dans un domaine qui n’est pas relié à son permis.
Option Consommateurs propose aussi qu’on établisse un mécanisme d’indemnisation pour les situations où l’assurance responsabilité professionnelle d’un représentant refuse d’indemniser les victimes sous prétexte qu’il s’agit d’une fraude : «S’il y a un débat sur la nature exacte de l’acte commis (fraude ou faute lourde), le FISF devrait se charger à la fois de l’indemnisation des victimes et de la récupération des sommes impliquées auprès de l’assureur».
Discordance
L’industrie est généralement prudente quant à l’élargissement de la couverture du FISF. «La recommandation visant à modifier les critères d’admissibilité d’une réclamation au FISF et ses répercussions sur l’industrie doivent faire l’objet d’une étude minutieuse, notamment quant aux coûts», avance-t-on dans le mémoire d’Industrielle Alliance (iA) remis au ministère et signé par le chef de la direction Yvon Charest.
iA suggère que «l’admissibilité d’une réclamation au FISF soit d’abord soumise à l’assureur par son processus de traitement des plaintes», soumet Yvon Charest.
L’actuaire ajoute que «ce mode alternatif de résolution des conflits permet de régler un grand nombre de dossiers à l’amiable, et, à notre avis, aurait pour effet non seulement d’écourter les délais pour le consommateur, mais également de diminuer les conséquences financières tant pour les consommateurs que pour les cabinets ou pour l’AMF».
iA craint que les modifications suggérées au FISF ne déresponsabilisent le client. D’autres groupes, dont Mérici Services Financiers, partagent cette appréhension : «Le consommateur devrait prendre des mesures raisonnablement nécessaires pour vérifier l’inscription du représentant et ce que cette inscription lui permet d’accomplir».
Mérici reconnaît qu’il peut être difficile pour le client de s’y retrouver parmi les différents titres. «Nous craignons que la certitude d’être couvert ne mène le consommateur à la négligence ou à l’insouciance», lit-on dans le rapport du cabinet de Sherbrooke.
Le Mouvement Desjardins formule la même inquiétude et désapprouve l’élargissement du mandat du FISF. «Il faut limiter les paramètres du FISF, car plus on les augmente, plus on déresponsabilise les consommateurs, ce qui risque de faire augmenter les cas de fraudes, et par conséquent, les coûts d’indemnisation», avance le groupe coopératif. Celui-ci considère que le consommateur doit effectuer un minimum de vérifications avant de confier un mandat à un représentant.
Les conseillers ont plus de responsabilités
L’AMF rétorque cependant que «cette position est contraire à celle retenue par les tribunaux québécois et par la Cour suprême du Canada. En effet, les tribunaux tendent à reconnaître que les intermédiaires ont une plus grande part de responsabilité que les consommateurs dans le déroulement des transactions financières, puisqu’ils sont les spécialistes et qu’ils ont une connaissance plus approfondie du marché.»
«Le milieu des produits et services financiers est un milieu de plus en plus complexe. Au cours des dernières années, on a constaté un foisonnement de nouveaux produits. Conséquemment, il peut être difficile pour un profane de s’y retrouver, et c’est précisément pour cette raison que le consommateur confie ses affaires à un intermédiaire. On ne peut lui demander d’être lui-même un expert du domaine financier», ajoute le régulateur.
C’est pourquoi l’AMF recommande au ministère des Finances de modifier la législation afin d’étendre les mécanismes d’indemnisation à toutes fraudes et manoeuvres dolosives ou tout détournement de fonds commis par un intermédiaire dans l’exercice de ses activités et indépendamment de la nature des produits offerts, dans la mesure où ce dernier est inscrit auprès de l’AMF et qu’il cotise au FISF.