Enthousiasme à l'égard des banques
everythingpossible / 123RF Banque d'images

Natalie Taylor, vice-présidente et analyste principale des actions chez Gestion d’actifs CIBC, partage ce point de vue. Après une année 2016 fort honnête, elle entrevoit «une année 2017 encore meilleure sur le plan des bénéfices», en raison notamment d’une efficacité accrue résultant des dernières compressions et des améliorations technologiques.

De plus, le raffermissement du secteur énergétique fait en sorte que les banques canadiennes doivent mettre de côté moins de provisions pour créances douteuses, explique Natalie Taylor.

Des secteurs éprouvés

Par contre, les portefeuillistes sont moins enthousiastes à l’égard des autres segments du secteur financier et misent peu sur les titres des sociétés d’assurances et de gestion d’actifs actuellement.

«Les assureurs sont très éprouvés par la faiblesse des taux d’intérêt», souligne James Cole, vice-président principal et gestionnaire de portefeuille chez Portland Investment Counsel.

Du côté de la gestion d’actifs, le constat n’est guère plus réjouissant. «Le déplacement vers les fonds négociés en Bourse ne montre aucun signe de ralentissement et pose un défi au modèle d’entreprise des gestionnaires d’actifs», affirme James Cole.

Il y a toujours une exception qui confirme la règle. Ainsi, Natalie Taylor croit au potentiel du titre de la compagnie d’assurance vie Great-West Life, mais dans une perspective à contre-courant.

«Ce titre a sous-performé à cause de préoccupations démesurées liées au Brexit, dit-elle. L’évaluation du titre le situe nettement sous ses pairs. Pourtant, la Great-West investit son capital avec doigté, elle est bien gérée et elle peut bénéficier d’une hausse des taux d’intérêt.»

Des banques plus solides

Plusieurs facteurs expliquent l’enthousiasme des portefeuillistes à l’égard des titres bancaires, tant canadiens qu’américains.

En premier lieu, les institutions ont renforcé leur structure.

Ainsi, les revenus liés à l’écart de taux entre dépôts et prêts ne représentent plus, en moyenne, que la moitié des revenus totaux. L’autre moitié provient des frais de gestion prélevés sur une multitude d’activités : comptes de déposants, gestion d’actifs, courtage, activités internationales, etc.

«Les sources de revenus des banques sont maintenant beaucoup plus stables, note Doug Warwick. Et je ne suis pas certain que les ratios cours/bénéfices des titres reflètent à quel point les affaires des banques ont évolué depuis 10 ans.»

La générosité des dividendes payés par les banques est un autre point positif. Au Canada, la moitié des bénéfices sont versés en dividendes, indique Natalie Taylor. À la fin de novembre, le rendement du dividende variait de 3,43 % (Banque TD) à 4,58 % (Banque CIBC), selon Bloomberg.

Un autre facteur favorable est lié à la déconfiture du secteur pétrolier canadien et à la surchauffe du secteur immobilier, deux situations qui ont pesé sur les titres des banques, mais qui ont en réalité des effets peu marqués.

Selon Doug Warwick, le taux de délinquance des prêts, bien qu’il ait augmenté, est demeuré bien en deçà de la moyenne nationale historique. Par ailleurs, une chute des prix de l’immobilier au Canada aurait un impact relativement faible, à son avis.

Une préférence pour la CIBC

Toutes les banques canadiennes figurent donc en vedette dans les portefeuilles de Doug Warwick et de Natalie Taylor. Cette dernière, dans une perspective à contre-courant encore une fois, donne sa faveur au titre de CIBC, bien qu’il ne soit pas le plus important de ses titres bancaires en portefeuille.

«L’évaluation du titre de CIBC est attrayante, juge-t-elle. La banque augmente son portefeuille de prêts immobiliers plus rapidement, malgré les inquiétudes face au marché immobilier, que je crois injustifiées. De plus, elle a beaucoup amélioré ses activités de détail et elle dépasse les attentes des analystes.»

«Une partie intéressante tient à la filiale Private Bancorp, de Chicago [acquise en juillet dernier], ajoute-t-elle. Les attentes sont faibles, mais je pense que l’environnement sous Trump est porteur de promesses.»

L’effet Trump

James Cole juge d’ailleurs que les perspectives sont encore meilleures pour les banques américaines, grâce à «l’effet Trump».

«Au cours des deux derniers jours [l’entrevue a eu lieu le 10 novembre, deux jours après les élections], il y a eu une frénésie autour des titres des banques américaines, dit-il. Les titres de JPMorgan Chase et de Wells Fargo ont gagné environ 10 %.»

«Les marchés sont soulagés de voir que Hillary Clinton et ses associés, qui étaient anti grandes banques, sont écartés, soutient James Cole. Et les impôts des entreprises devraient être réduits, probablement de 15 à 35 %.»

De plus, la réglementation américaine du secteur bancaire devrait être allégée, prévoit Doug Warwick. En outre, une règle qui plafonne les dividendes à 30 % des bénéfices sera sans doute abolie.

Enfin, on s’attend à ce que les taux d’intérêt soient haussés de façon plus marquée aux États-Unis qu’au Canada. «Cela améliorera les marges bénéficiaires sur les portefeuilles de prêts», souligne Doug Warwick.

L’enfer, c’est l’Europe

Pendant ce temps, en Europe, «c’est l’enfer !» lance Natalie Taylor.

Les pays européens «sont encore dans un cycle potentiellement déflationniste et certains pratiquent des taux d’intérêt négatifs, ce qui est très dommageable pour les institutions financières», affirme Tim Johal, cogestionnaire du Fonds global Services financiers Investors, chez Groupe Investors, le seul de nos interlocuteurs à pratiquer dans une perspective mondiale.

Certaines banques, notamment en Suisse, ont étendu leurs activités de marchés des capitaux à l’échelle mondiale, «mais n’ont pas réussi à en tirer des bénéfices substantiels, explique Tim Johal. Cette situation est exacerbée par un environnement réglementaire lourd.»

«Nous croyons que les Suisses réduiront leur empreinte dans les marchés de capitaux, ce qui avantagera les acteurs américains», soutient-il.

Tim Johal privilégie d’ailleurs le marché américain. Parmi les titres bancaires, il accorde sa préférence à JPMorgan Chase. Selon lui, cette banque est dirigée de main de maître, elle affiche une belle rentabilité et des résultats peu volatils grâce à la diversité de ses activités.

De plus, JPMorgan Chase est bien positionnée pour profiter de l’abolition du plafond de dividendes de 30 % des bénéfices. «JPMorgan a la capacité d’augmenter rapidement son niveau de dividendes», juge Tim Johal.

Ailleurs dans le monde, certaines banques des marchés émergents présentent beaucoup d’attrait, car dans la plupart de ces pays, relativement peu de consommateurs ont un compte bancaire.

De sorte que «la croissance économique laisse entrevoir d’immenses occasions pour les banques d’accroître leurs activités dans ces marchés», croit Doug Warwick. C’est le cas notamment au Mexique et en Chine.

Par contre, les banques de certaines régions du monde doivent composer avec un environnement réglementaire instable.