Une pile de livres dont le plus haut est ouvert. Derrière, on voit une balance de la justice.
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Nicolas Puech, héritier de la prestigieuse maison Hermès, l’une des familles les plus influentes du luxe mondial, a perdu sa bataille judiciaire en Suisse. Il accusait son conseiller financier de l’avoir escroqué de 13 milliards de dollars.

L’arrière-petit-fils de Thierry Hermès, fondateur de l’entreprise célèbre pour ses carrés de soie et ses sacs à main, a géré sa fortune avec une certaine nonchalance, ce qui l’a conduit à accorder une « confiance aveugle » à son gestionnaire de fortune, a estimé la Cour d’appel de Genève, qui a rejeté sa plainte le 12 juillet.

Éric Freymond, à la tête de Semper Gestion, a administré les actifs de l’héritier et de sa fondation pendant plus de vingt ans. Son mandat, qui a été révoqué en 2022, incluait notamment la supervision des opérations sur six millions d’actions d’Hermès détenues par son client, soit environ 5,7 % du groupe Hermès, rapporte Business Insider

Nicolas Puech affirme que le gestionnaire a orchestré la « fraude du siècle » en profitant de sa situation pour faire disparaître le bloc d’actions au moyen de diverses opérations financières, selon le média d’investigation suisse Gotham City.

C’est en tentant de modifier son testament que Nicolas Puech a découvert la disparition des actions. Il a alors annulé les mandats du conseiller et l’a poursuivi en justice pour mauvaise gestion, manque de transparence, et détournement de fonds.

Le tribunal genevois a estimé que ces accusations manquaient de preuves solides. La Cour a souligné que Nicolas Puech avait signé des documents en blanc et donné un accès total à ses comptes bancaires à son gestionnaire de fortune. Aucune preuve de malhonnêteté n’a été retenue contre celui-ci.

Des actions disparues

Une question reste en suspens : où sont passées les actions manquantes ? La Tribune de Genève explique qu’elles avaient été déposées dans une banque genevoise en 2012 et que leur localisation actuelle est inconnue.

Ces actions étant des titres au porteur, elles ne sont associées à aucun nom précis et appartiennent à la personne qui les détient. Il est donc très difficile de suivre leur traçabilité. Axel Dumas, président exécutif d’Hermès, a confirmé qu’il n’avait aucun moyen de les suivre ou de les contrôler.

Ces actions représentent une part significative du groupe Hermès, aujourd’hui valorisé à environ 155 milliards de dollars. Les descendants de Thierry Hermès, fondateur de l’entreprise en 1837 à Paris, forment la troisième famille la plus riche du monde, selon le Bloomberg Billionaires Index.

Changements controversés dans un héritage

Nicolas Puech avait initialement légué ses actions à sa fondation Isocrate, dédiée au soutien du journalisme d’investigation. Cependant, il a récemment changé de bénéficiaire, au profit de son jardinier. Depuis la disparition des actions, la fondation philanthropique fait face à des difficultés pour trouver du financement, selon Bloomberg.

Cette saga s’inscrit dans un contexte de rivalités familiales et de tensions avec d’autres géants du luxe. Il y a dix ans, Bernard Arnault, fondateur de LVMH, avait accumulé discrètement des actions du groupe. Grâce à l’appui présumé de Nicolas Puech, il était parvenu à détenir jusqu’à 23 % du capital de Hermès.

Cette situation avait semé la discorde au sein de la famille Hermès, qui refusait de voir l’entreprise passer sous le giron de LVMH. Finalement, en novembre 2014, LVMH a vendu la totalité de ses actions Hermès, réalisant une plus-value nette de 2,4 milliards d’euros (environ 3,5 milliards de dollars canadiens). LVMH avait également été condamné en juillet 2013 à une amende de 8 millions d’euros par l’Autorité des marchés financiers (AMF) pour être entré secrètement au capital de son concurrent.