Les préretraités ont toutefois de nombreux besoins, car peu d’entre eux sont très bien préparés à cette nouvelle étape de leur vie. En fait, seulement 13 % des baby-boomers se disent prêts pour la retraite, selon une étude Ipsos Reid.
«Souvent, les clients m’arrivent un peu au dernier moment. Ils n’ont jamais été conseillés par un spécialiste en planification de retraite», dit Maxime Michaud, dont 25 à 35 % du volume d’activité provient de la clientèle des 55 à 60 ans.
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«Plusieurs de ces nouveaux clients ont seulement des placements garantis qui rapportent 1,5 à 2 % – même pas le taux de l’inflation – et leur endettement est trop élevé, ajoute-t-il. Certains ont encore un prêt hypothécaire alors qu’idéalement, ils ne devraient plus avoir de dettes.»
Maxime Michaud souligne aussi que plusieurs préretraités n’ont jamais touché à leurs fonds immobilisés, comme leurs régime de retraite.
«Or, arrivés à l’âge de 65 ans, ils sont soumis au retrait maximum de leur régime de retraite. S’ils avaient décaissé avant, ils auraient pu mettre progressivement de l’argent dans un REER, et à la retraite, ils auraient plus de souplesse pour choisir le montant des versements», explique-t-il.
Dire les vraies affaires
C’est toutefois une clientèle «difficile à aller chercher», juge André Goudreau, directeur régional au bureau de la Mauricie du Groupe Investors.
«Ce sont des personnes qui s’y prennent souvent à minuit moins cinq et ne veulent pas se tromper : elles recherchent quelqu’un de fiable avec qui nouer une relation à long terme. Il faut construire une relation de confiance.»
Pour cela, des appels fréquents, des rencontres annuelles, des explications claires, une planification précise sont le meilleur moyen d’établir une bonne relation et d’asseoir sa crédibilité.
Autant d’atouts qui seront utiles par la suite, car même si les baby-boomers sont bien informés, ils ont parfois de vieux réflexes financiers qui leur nuisent.
«Les Québécois, francophones notamment, ont été élevés suivant le principe «qui paie ses dettes s’enrichit». Or, à l’âge de la retraite, certaines personnes ont fini de payer leur maison, mais n’ont aucun argent en banque et peu de REER, si bien qu’elles sont obligées de vendre leur résidence pour récupérer des liquidités», déplore André Goudreau.
«C’est parfois difficile de leur faire comprendre qu’une bonne stratégie consiste à hypothéquer un peu leur maison pour mettre de l’argent dans leur REER, qui rapporte un crédit d’impôt qui pourra être investi», ajoute-t-il.
Il arrive souvent que le conseiller doive inciter le préretraité à revoir son plan de retraite, car il n’a pas épargné suffisamment. «Il faut parfois leur dire de changer de train de vie», témoigne André Goudreau.
Maxime Michaud couve davantage ses clients préretraités que les jeunes, qu’il «brasse» au besoin. Néanmoins, s’il le faut, il n’hésite pas à dire aux plus âgés qu’ils doivent revoir leurs attentes : retarder l’âge de la retraite, réduire les dépenses ou encore revoir les projets de voyage.
Ce sont des étapes difficiles pour les clients qui, de surcroît, doivent se projeter dans la dernière partie de leur vie.
«C’est la période de la vie la plus vulnérable, une étape très insécurisante, car les préretraités vivront bientôt de gros changements et une certaine perte de contrôle», constate Cathy Duval, gestionnaire de portefeuilles et vice-présidente à la Financière Banque Nationale, Gestion de patrimoine.
«Les clients qui approchent de la retraite ont besoin de soutien, d’information et de conseils. Ils parlent souvent de choses émotives comme la perspective de perdre l’environnement social du bureau ou d’être en tout temps avec leur conjoint, et de sujets graves comme la mort et la maladie», explique-t-elle.
«En tant que conseiller, on doit leur offrir une grande écoute, faire preuve de psychologie, donner beaucoup de renseignements, être très disponible», ajoute Cathy Duval.
Faire parler les chiffres
De plus, on peut prévoir que cette clientèle appelle plus souvent que les autres, pour être rassurée. «Plus que la mort, l’idée de la perte d’autonomie touche beaucoup cette clientèle. On essaie de prévoir qu’ils aient assez d’argent pour d’éventuels soins à domicile, etc.», remarque Maxime Michaud.
«Les clients préretraités veulent que leurs besoins soient traduits en chiffres. Ils veulent du concret», souligne André Goudreau. Ce qui demande un engagement, de la pédagogie et du temps au conseiller, d’autant plus que les situations sont souvent complexes.
«Il faut analyser s’il faut retirer de l’argent du CELI ou du REER en premier, appeler le comptable pour voir comment décaisser, revoir le plan annuellement, sécuriser les placements plus l’âge avance, faire le tri dans les polices d’assurance, vérifier que le testament est à jour», énumère Cathy Duval.
Cet accompagnement est payant et rend cette clientèle particulièrement attachante. «Ça renforce beaucoup la relation, témoigne Cathy Duval. La fidélité en est plus forte.»