Différents fonds, différentes fins d’année
D’abord, tous les fonds n’effectuent pas leur distribution au même moment. La plupart procèdent en décembre, mais certains autres en novembre, en janvier, en mars ou en avril. Plusieurs fonds constitués en société n’ont pas leur fin d’année le 31 décembre, il faut donc s’assurer de connaître la date de distribution.
Les fonds structurés en fiducie ont également tendance à distribuer davantage, compte tenu du fait qu’ils ne colligent pas les résultats de plusieurs fonds en un seul pour dégager des efficiences fiscales. Ils peuvent aussi distribuer des revenus d’intérêt ou des revenus étrangers, tels que des dividendes américains. Cela n’est pas le cas pour les fonds constitués en sociétés, qui ne peuvent distribuer que des gains en capital et des dividendes déterminés canadiens.
Vigilance élevée
Les promoteurs de fonds communs de placement sont de plus en plus proactifs pour aviser les conseillers des distributions qui seront effectuées. Il ne faut pas négliger de consulter les courriels envoyés à cette fin, mais aussi (et surtout) agir en conséquence selon la situation du client. Certes, le réflexe de ne pas acheter de fonds en fin d’année devrait être naturel, surtout si on ne connaît pas les distributions potentielles. Mais il y a plus.
Prenons l’exemple hypothétique d’un client qui a investi dans un fonds obligataire diversifié structuré en société en août 2015. La juste valeur marchande (JVM) du fonds a légèrement fléchi entre août et janvier. La fin d’année financière du fonds étant en février, la société de fonds distribue un gain en capital équivalent à 4 % de la JVM en janvier.
Le client se voit donc attribuer un revenu qu’il n’a pas gagné. Évidemment, la distribution se reflétera dans le prix de base rajusté (PBR) de l’investissement. On peut donc adopter diverses attitudes à cet égard. D’abord, convenir avec le client de vendre le placement à la suite de la distribution pour créer une perte équivalente à celle-ci, pour ensuite racheter le produit un mois plus tard. On évite ainsi d’effectuer une disposition factice et on annule le gain versé pour l’année en cours.
Il y a un risque que le placement fluctue à notre avantage (ou non) au cours de la période -on doit le considérer dans notre prise de décision initiale. On peut également décider de payer l’impôt tout de suite et de réduire la facture à la vente du portefeuille. Payer moins d’impôt plus tard peut parfois s’avérer avantageux, par exemple si une planification prévoit un revenu imposable moins élevé dans l’avenir.
Le style de gestion en cause ?
Un autre aspect à examiner est le style de gestion du portefeuilliste. Une étude récente menée par James Gauthier, directeur de la recherche sur les fonds, chez Scotia Gestion de patrimoine, permet de croire que le taux de rotation du portefeuille peut avoir une incidence sur les distributions de gain en capital.
Son hypothèse est que le taux de rotation est une mesure relativement stable dans le temps et que celle-ci est fonction du style de gestion. Si un portefeuille a un ratio de gains en capital nets (soit les gains en capital moins les pertes cumulées, divisé par l’actif net du fonds) élevé et que le taux de rotation du porte-feuille l’est également, on peut présumer que le gestionnaire cristallisera les gains dans une mesure qui est fonction du taux de rotation.
D’autres paramètres devraient certainement être considérés par les investisseurs. Des fonds qui sont en entrées nettes positives rachètent constamment de nouveaux titres, ce qui nivelle le PBR des titres détenus. Cela fera diminuer le ratio de gains en capital nets.
De plus, certains fonds de nature plus stratégique auront tendance à se protéger en prévision de replis, ce qui aura pour effet d’augmenter le taux de rotation à des points tournants.
C’est également un fait connu que plusieurs gestionnaires profitent de fins de trimestres positifs pour rééquilibrer leur portefeuille et cristalliser des gains obtenus, surtout s’ils sont surdimensionnés sur certains titres liés à des résultats extraordinaires ou à des acquisitions. Si cela se produit en fin d’année, des surprises peuvent se présenter lorsque les estimations de distributions de fin d’année sont envoyées.
L’analyse des données à un moment précis dans le temps quant au ratio de gains en capital nets peut donc ne pas être totalement fiable. L’idée est de se donner des pistes pour déterminer les fonds qui sont plus susceptibles de verser des distributions et de connaître et divulguer cette information aux clients, surtout ceux qui ont des enjeux fiscaux importants.
Limites à ne pas franchir
Les fonds qui ont des pertes cumulées importantes peuvent créer des occasions intéressantes à deux égards. D’abord, ils permettent d’espérer ne pas recevoir de distributions de gain en capital, ce qui a le potentiel de composer le capital à long terme sans devoir déclencher d’événement fiscal.
Également, certaines des catégories d’actif qui ont subi des pertes importantes dans les dernières années ont un potentiel de rebond. On pourrait ainsi profiter d’un rebond de façon fiscalement avantageuse. On peut notamment penser à des fonds aurifères si le métal jaune devait poursuivre sa relance entamée en janvier.
Il y a cependant un danger à choisir des fonds principalement pour des motivations fiscales. Il faut s’assurer de la saine gestion du fonds, de son comportement potentiel et de son adéquation avec la tolérance à la volatilité des investisseurs potentiels.
Le rendement ajusté au risque reste la pierre angulaire de la gestion de portefeuille et du rendement après impôt. Compte tenu du marché haussier entamé en 2009, la vaste majorité des fonds communs canadiens n’ont plus de pertes cumulées.
Plusieurs gestionnaires de stratégies procurant de très bons résultats ne sont pas forcément les plus attrayants d’un point de vue fiscal, parce qu’ils ne peuvent tout simplement plus offrir d’efficience fiscale. On peut penser à divers fonds quantitatifs, comme certains fonds de style momentum, par exemple.