Ce dernier envoie une fois par mois une infolettre à ses clients sur différents thèmes touchant à la mise en marché. Le but : «Se faire connaître en tant qu’expert dans son domaine et garder le contact avec les clients qu’on ne voit pas souvent», explique Jean-Pierre Lauzier.
Depuis quelques années, le marketing de contenu s’est taillé une place dans la publicité traditionnelle. Il reste une stratégie commerciale, mais plus raffinée que la publicité.
«Le marketing de contenu consiste à fournir de l’information au client pour le faire grandir et pour qu’il prenne la meilleure décision pour lui-même», dit Jean-Pierre Lauzier.
Plutôt que de vanter une entreprise ou un conseiller, les textes de marketing de contenu renseignent les clients notamment sur l’intérêt pour des étudiants de cotiser à un CELI. Ils peuvent aussi présenter une revue des marchés ou donner des conseils de placement dans un marché volatil.
«Le client est au centre de la démarche, explique Bruno Lussier, professeur de marketing à l’École des sciences de la gestion (ESG-UQAM). La création et la diffusion de contenu informatif sur différentes plateformes visent à fidéliser les clients et à en attirer de nouveaux par l’envoi d’informations ciblées et originales sur des sujets qui les intéressent.»
C’est une façon «de se différencier en investissant dans la qualité de la relation avec ses clients», selon le professeur.
Susciter la confiance
«Aujourd’hui, les individus échaudés par les crises et les scandales veulent trouver un conseiller en qui ils peuvent avoir confiance. Dans ce contexte, montrer son expertise est important. On essaie d’attirer les clients en leur rendant service grâce à de l’information ciblée qui peut leur être utile», ajoute Stéphanie Kennan, présidente de l’agence de communication Bang Marketing, qui offre des services de marketing de contenu, entre autres, dans le domaine financier.
Selon elle, cette forme de marketing est une façon de forger une relation avec son client sans se montrer trop agressif. «Ce n’est pas un marketing qui dérange. C’est une carte professionnelle pour le conseiller», dit Stéphanie Kennan.
Si un conseiller a tout avantage à avoir recours au marketing de contenu, il n’en reste pas moins qu’il s’agit d’un exercice difficile. Tout d’abord, «ça prend beaucoup de temps», témoigne Jean-Pierre Lauzier, qui passe parfois jusqu’à deux semaines à la rédaction d’un billet. Il faut réunir les informations, puis rédiger, vérifier, corriger.
«Il faut également savoir écrire, avoir quelque chose à dire, et sortir des propos rebattus», poursuit Stéphanie Kennan. La clé de la réussite, martèle Bruno Lussier, c’est de publier du «contenu pertinent, engageant et intéressant» et à un rythme suffisamment raisonnable pour ne pas «harceler» les clients.
Il est essentiel d’être vigilant et de respecter la conformité, prévient Stéphanie Kennan : «Le domaine financier comporte de nombreuses normes qui évoluent rapidement. Il faut faire attention d’écrire les bonnes informations et de faire régulièrement le tri dans les anciennes parutions pour supprimer celles qui ne sont plus à jour.»
Ne pas faire de la publicité
Si le contenu est mal fait, personne ne le lira, et pire, si le texte contient des erreurs, la crédibilité du conseiller et celle de son entreprise seront entachées.
S’il n’apporte rien de nouveau ou de ciblé, le client pourrait être agacé, voire se sentir agressé. L’erreur fatale serait «de parler de soi, de ses services. Il ne faut pas que ça passe pour de la publicité», insiste Jean-Pierre Lauzier.
Le risque est bien réel : une étude menée sur le site du magazine américain WealthManagement.com a révélé que si 37 % des clients aisés ont une perception positive d’un conseiller qui a une forte présence sur Internet en affichant «périodiquement des billets utiles», 68 % d’entre eux ont une opinion négative de celui qui «affiche constamment des futilités, des images, des citations, etc.».
La complexité de la production d’un marketing de contenu de qualité a poussé de nombreuses agences de communication à se spécialiser dans ce service : choix des sujets, récolte de l’information, rédaction, introduction de mots clés qui permettent un référencement optimal sur Google. Elles peuvent même personnaliser les messages pour le conseiller et lui fournir des statistiques sur la réception des publications par les internautes quand le marketing de contenu se fait sur Internet.
Tout cela entraîne des coûts qui semblent encore trop importants pour de nombreux conseillers : 25 000 $ pour un service clés en main et des courriels envoyés trimestriellement.
«Nos clients sont rarement des conseillers seuls, ce sont souvent des regroupements qui partagent les coûts», affirme Stéphanie Kennan, qui estime que la pratique n’est pas encore très développée dans le milieu financier, à l’exception peut-être «des grandes institutions financières qui investissent des budgets importants dans la communication».
«C’est un investissement, mais il ne faut pas s’attendre à en récolter les fruits avant deux ou trois ans. Ensuite, c’est très rentable, car les gens partagent les informations qu’on leur envoie, les font lire à des collègues, à des amis», observe Jean-Pierre Lauzier, qui compte aujourd’hui environ 10 000 abonnés à son infolettre, par rapport à une cinquantaine à ses débuts, il y a 12 ans.