Deux chiffres clés témoignent de la performance de l’Inde. Premièrement, le PIB a affiché une croissance de 7,2 % en 2014. Il devrait progresser de 7,5 % en 2015 et en 2016, soit le double de la moyenne mondiale, selon les dernières prévisions du Fonds monétaire international (FMI) (http://tinyurl.com/qa7pews).

Deuxièmement, l’indice phare BSE Sensex, de la Bourse de Bombay, a grimpé de 29 % en 2014 (45 % en dollars canadiens), soit la plus forte hausse parmi les Bourses des pays émergents, signale Marc Dalpé, gestionnaire de portefeuille et associé du groupe Dalpé Milette, chez Richardson GMP, à Montréal. C’est dire que les investisseurs se sont pris d’affection pour l’Inde.

«L’Inde se trouve dans une position privilégiée (sweet spot)», affirme David Kunselman, gestionnaire de portefeuille principal chez Excel Funds Management, à Toronto.

La baisse du prix du pétrole a donné un solide coup de pouce à l’économie indienne, contribuant à faire économiser 50 G$ US. Le taux d’inflation est passé de 9 % à près de 5 % au cours de la dernière année, indique David Kunselman.

«L’effet Modi»

Cependant, le moteur le plus important de la renaissance indienne est l’élection, en mai 2014, du premier ministre Narendra Modi.

«Dans un pays comme l’Inde, il faut porter beaucoup plus attention aux événements politiques, qui ont un effet plus marqué sur les cycles macroéconomiques que dans les pays développés», souligne Keith Porter, directeur du secteur des marchés émergents chez Altervest, à Montréal.

La feuille de route de Narendra Modi impressionne. Lorsqu’il était aux commandes de la province de Gujarat de 2001 à 2014, «il en a fait un des États les mieux gérés, avec une croissance annuelle de 10 %, note David Kunselman. C’est un individu pro-affaires qui répond aux attentes.»

Certaines initiatives sont majeures. Mentionnons l’implantation, en décembre dernier, d’une nouvelle taxe à valeur ajoutée unifiée pour l’ensemble des 28 provinces, des investissements massifs dans les infrastructures et une mise au pas de la bureaucratie gouvernementale.

«Ce que j’aime de Narendra Modi, c’est qu’il ne cherche pas les grands coups d’éclat, mais qu’il accumule plutôt de petites réformes dont les effets s’additionnent», précise Keith Porter.

«Tout ce que Narendra Modi propose ne sera pas nécessairement mis en place, mais au moins, il a le pied sur l’accélérateur», soutient Marc Dalpé. L’élément le plus important tient au changement de mentalité, dit-il : «Un pays ne peut pas être concurrentiel s’il a l’une des bureaucraties les plus lourdes du monde».

Les Indiens dépensent

Pourquoi l’épargnant canadien se préoccuperait-il de ce qui se passe dans un pays lointain, qui se tenait jusqu’ici dans l’ombre du colosse chinois ?

«Le Canada ne représente que 2,5 % de l’économie mondiale, répond Marc Dalpé, dont le fonds investit en Inde depuis 2003. On n’investit pas dans des pays, mais dans des sociétés, et on veut investir dans des sociétés exposées à un environnement économique favorable. C’est le cas en Inde.»

Les technologies de l’information et la pharmaceutique continuent d’être les secteurs clés de la Bourse indienne. Cependant, un nouveau secteur émerge sur les marchés boursiers, le manufacturier, indique David Kunselman.

Ainsi, le titre du fabricant de pièces automobiles Motherson Sumi Systems a grimpé de 169 % en 2014, et celui du métallurgiste Bharat Forge, de 210 %, précise-t-il.

Le marché de consommation est en pleine effervescence. Les Indiens disposent d’un revenu disponible en croissance et dépensent à l’avenant : maison, automobile et différents biens de consommation.

La meilleure façon de tirer profit de cette tendance, jugent tous nos intervenants, est d’investir dans le secteur bancaire, dans des sociétés telles ICICI Bank, Axis Bank, Yes Bank.

Keith Porter privilégie la banque ICICI, car elle n’a pas peur d’innover et sait joindre les déposants là où ils se trouvent. Ainsi, elle a mis en place un service de succursales mobiles (des camions se déplacent de village en village), elle multiplie les microprêts et mise sur les transactions bancaires par téléphone.

Investir dans les fonds

Cela dit, il est difficile et coûteux pour l’épargnant canadien d’investir directement dans des titres de sociétés à la Bourse de Bombay. De plus, les marchés de New York et de Londres ne comptent qu’une douzaine de titres de type ADR (American Depositary Receipt), déplore Keith Porter.

Investir dans les fonds communs et les fonds négociés en Bourse (FNB) est donc la meilleure solution pour profiter de l’essor de l’Inde.

Du côté des FNB, le iShares India Index (symbole XID à la Bourse de Toronto) accorde une place prépondérante (31,2 %) au secteur financier. BlackRock offre aussi le iShares BRIC Index (CBQ), moins spécialisé, dans lequel l’Inde occupe un poids bien inférieur à celui des titres chinois (13,2 % par rapport à 54,8 %).

Quant aux fonds communs offerts au Canada, un seul est consacré exclusivement à l’Inde, le Fonds Inde Excel. Il affiche un rendement de 35,2 % depuis un an et un rendement annualisé de 19,4 % depuis trois ans, selon Morningstar.

Les fonds qui se concentrent dans les pays du BRIC, peu nombreux aussi, offrent parfois une bonne proportion de titres indiens. Par exemple, le fonds HSBC Actions BRIC investit 27,7 % de son portefeuille dans des titres indiens, selon Morningstar.

Par ailleurs, on trouve au Canada 236 fonds communs d’actions axés sur les marchés émergents. Dans le fonds Desjardins marchés émergents, par exemple, la proportion de titres indiens s’élève à 14,2 %.