« Notre perspective pour 2019 s’appuie sur un optimisme prudent », a expliqué Candice Bangsund, gestionnaire de portefeuille pour Fiera Capital.
Elle s’attend à ce que les valeurs mobilières performent mieux que les obligations, pendant que la croissance mondiale restera relativement saine. Selon elle, une récession est improbable avant la fin de 2020.
Les marchés en sont aux derniers moments d’un cycle économique marqué, notamment, par sa plus longue séquence haussière. C’est habituellement à ce moment que les investisseurs délaissent les titres qui s’appuient sur la croissance pour se réfugier dans les secteurs jugés plus défensifs, comme ceux de la finance, des matériaux, de l’industrie et de l’énergie.
« Cela va être intrinsèquement positif pour le TSX », a expliqué Mme Bangsund, prédisant des rendements de 10 à 15 % et une performance encore plus forte pour les marchés émergents. L’experte ne voit cependant pas beaucoup d’avantages pour les marchés américains.
« C’est une période où nous voyons une occasion de rattrapage, mais cela ne sera pas une opération à long terme. D’ici la deuxième moitié de 2019, nous allons avoir des prises de profits et du repositionnement pour 2020, avec des perspectives un peu plus prudentes. »
L’indice composé S&P/TSX traversait les dernières séances de l’année en affichant un recul d’environ 14 % par rapport au début janvier, alors qu’il valait 16 209,13 points. Cela ferait de 2018 la pire année du TSX depuis 2008, année de la Grande Récession, alors qu’il avait perdu 35,2 %.
Le TSX a subi une correction en février et a de nouveau glissé en octobre après avoir culminé à 16 586,46 points à la mi-juillet. Il a ensuite chuté en décembre, atteignant son plus bas niveau en deux ans, à 13 863,97 points le 24 décembre, avant de rebondir jeudi à 14 165,21 points.
« Cela a été une année où il a été difficile pour un investisseur de faire de l’argent même avec un portefeuille équilibré typique », a souligné Mme Bangsund en entrevue.
Optimisme face au pétrole
Le secteur financier, le plus important selon la valeur boursière sur le TSX, a chuté de près de 15 %. L’énergie, le deuxième en importance, a glissé de près de 32 %, le prix du pétrole WTI ayant cédé environ 26 % et le cours du brut canadien ayant été affecté par le manque de capacité des oléoducs pour les marchés d’exportation.
Les matériaux ont chuté d’environ 14 % en raison de la baisse des prix de l’or et du cuivre et de la hausse du dollar américain.
Le secteur de la technologie a enregistré une croissance d’environ 5 % sur la même vague que les bourses américaines, mais il ne représente que 3 % du TSX. Le mince secteur des soins de santé a perdu 14 % en raison de la volatilité extrême des titres de cannabis, alors que le Canada a légalisé la consommation de marijuana à des fins récréatives en octobre.
Malgré les ventes de titres dans le secteur de l’énergie en décembre ayant contribué au recul du WTI à un creux de 44,25 $ US le baril, Mme Bangsund établit un prix cible de 70 $ US le baril pour 2019, tandis que d’autres observateurs le voient se situer entre 50 et 60 $ US.
« Nous sommes plutôt optimistes à l’égard des prix du pétrole, ce qui alimente nos perspectives positives pour le dollar canadien et le marché boursier canadien », a ajouté Mme Bangsund.
L’année a été marquée par des incertitudes géopolitiques, notamment la confrontation sur le budget italien entre Rome et l’Union européenne, et par le Brexit. Mais le principal élément qui a influencé les marchés est le programme protectionniste de l’administration Trump, qui s’est notamment traduit par la renégociation de l’Accord de libre-échange nord-américain, des menaces de tarifs douaniers sur les automobiles et un affrontement avec la Chine.
Du côté de Wall Street
Les marchés américains étaient également en voie de connaître leur pire année en une décennie en dépit du fait qu’ils ont été propulsés au début de l’année par le secteur de la technologie et que les bénéfices des entreprises ont été soutenus par les réductions d’impôt fédérales. Vers la fin de l’année, la moyenne industrielle Dow Jones et l’indice S&P 500 chutaient d’environ 12 % après avoir gagné 25 % et 20 % respectivement en 2017.
Les rendements sur les marchés seront compliqués au moins au cours des deux prochaines années par des hausses des taux d’intérêt et la faiblesse de la croissance mondiale, prédit Kash Pashootan, PDG et directeur des investissements de First Avenue Investment Counsel.
« Nous ne nous attendons pas à un effondrement du marché ni à un déclin important, mais nous ne croyons pas non plus que nous aurons la même résilience et la même vigueur des actions que celles observées au cours des quelques dernières années », a-t-il affirmé.
La volatilité qui a marqué 2018 pourrait se poursuivre l’année prochaine, a ajouté Craig Fehr, stratège des marchés canadiens pour Edward Jones.
« Je ne pense pas que ce sera nécessairement une année record, a-t-il déclaré. Je ne pense pas qu’il y aura répétition de l’année 2017 avec des gains énormes et très peu d’inconvénients, mais je pense que 2019 peut être une autre bonne année pour le marché des actions. »
Selon Douglas Porter, économiste en chef de BMO, le TSX performera mieux que le S&P 500 l’année prochaine, alors qu’il a eu un rendement inférieur à celui des États-Unis au cours de sept des huit dernières années.
« En règle générale, c’est assez simple: lorsque le prix réel des produits de base augmente, la Bourse de Toronto brille », écrit-il dans une note. « Néanmoins, avec la réduction de l’incertitude liée au commerce, l’accord de libre-échange Canada-États-Unis-Mexique, et de nombreuses mauvaises nouvelles dans le secteur de l’énergie déjà prises en compte, l’année prochaine pourrait voir un rare gain pour le TSX, au moins sur une base relative. »