Aussi, la plus récente version de l’ébauche de la loi fédérale intitulée Loi sur la stabilité des marchés des capitaux n’excède pas la compétence du Parlement du Canada, selon le plus haut tribunal du pays.
Dans un jugement unanime des magistrats, la Cour suprême vient ainsi casser le jugement de la Cour d’appel du Québec. Selon celui-ci, les juges majoritaires de la Cour d’appel avaient conclu que le régime coopératif était inconstitutionnel.
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« Il est primordial d’entretenir un dialogue constructif, le régime coopératif se limitant à une participation volontaire, et nous continuerons de respecter les pouvoirs des organismes de réglementation existants des provinces et territoires où le régime coopératif ne s’appliquera pas », ajoute-t-il.
Régime coopératif
Rappelons que le gouvernement fédéral et les gouvernements de l’Ontario, de la Colombie‑Britannique, de la Saskatchewan, du Nouveau‑Brunswick, de l’Île‑du‑Prince‑Édouard et du Yukon ont proposé de mettre en place un régime coopératif national de réglementation des marchés des capitaux au Canada. Le cadre du régime coopératif est établi dans un accord entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux et territoriaux participants selon un protocole, lequel prévoit des lois types pour les provinces et le parlement fédéral.
La loi provinciale type et l’ébauche de la loi fédérale qui sont ainsi proposées n’ont pas force de loi tant et aussi longtemps qu’elles n’ont pas été dûment adoptées par les législatures provinciales et le Parlement du Canada, respectivement.
Selon la Cour suprême, ce protocole n’oblige pas les législatures des provinces participantes à légiférer pour adopter les dispositions de la loi provinciale type elles‑mêmes. Les législatures provinciales demeurent libres de rejeter les lois proposées et toute modification apportée à celles‑ci si elles choisissent de le faire.
« Même si le protocole devait réellement viser à entraver le droit des législatures provinciales d’adopter, de modifier et d’abroger leurs lois relatives aux valeurs mobilières, il serait tout simplement inopérant à cet égard en raison du principe de la souveraineté parlementaire », lit-on dans le jugement de la Cour suprême.
Selon ce principe, le pouvoir de l’exécutif ne peut entraver l’exercice du pouvoir de la législature d’adopter, de modifier et d’abroger des lois. « Un accord de l’exécutif censé entraver l’action de la législature n’est pas intrinsèquement inconstitutionnel; il ne produira tout simplement pas l’effet souhaité », d’après ce tribunal.
De plus, le régime coopératif ne comporte pas de délégation inacceptable du pouvoir de légiférer, selon la Cour suprême : « ni le protocole ni la loi provinciale type n’habilite le Conseil des ministres à modifier unilatéralement la législation des provinces en matière de valeurs mobilières, et le régime coopératif n’impose aucune limite juridique au pouvoir législatif des provinces participantes d’adopter, de modifier et d’abroger leurs lois respectives en matière de valeurs mobilières comme elles l’entendent. »
« Étant donné qu’il ne permet aucunement au Conseil des ministres de court‑circuiter les législatures provinciales, le régime coopératif, s’il est correctement mis en œuvre conformément aux modalités du Protocole, n’entraînera en aucun cas l’abdication de la compétence législative primaire des provinces participantes », lit-on dans le jugement de la Cour suprême.
« La loi fédérale complète celles provinciales »
La Cour suprême souligne que le caractère véritable de l’ébauche de la loi fédérale est d’endiguer le risque systémique susceptible d’avoir des conséquences négatives importantes sur l’économie canadienne. Elle ne contient aucune disposition portant sur la réglementation des aspects courants du commerce des valeurs mobilières.
« Interprétée correctement, l’ébauche de la loi fédérale ne vise donc pas à remplacer les lois provinciales et territoriales sur les valeurs mobilières. Elle a plutôt été conçue de manière à compléter ces lois en s’attaquant aux objectifs économiques considérés comme de nature nationale », lit-on dans le jugement.
« La préservation de l’intégrité et de la stabilité de l’économie canadienne est très clairement une matière qui a une dimension nationale et qui excède la compétence provinciale », soutient la Cour suprême.
Avec la collaboration de Richard Cloutier