Ces produits, mieux connus sous l’acronyme CDO (Collateralized Debt Obligation), qui sont titrisés et réinvestis dans des swaps de crédit, proposent aux investisseurs d’assurer le risque de défaut des actifs qu’ils détiennent.
Depuis le début de l’année, ce sont près de 3 G$ en valeur notionnelle – soit la valeur du levier appliqué aux actifs sous-jacents – qui ont été produits par les banques d’investissement américaines, notamment J. P. Morgan Chase et Citigroup.
Le Wall Street Journal rapportait, au début de juin, que certaines banques d’investissement britanniques s’y mettaient également, pour des valeurs notionnelles qui vont de 300 à 500 M$.
C’est peu par rapport à 2008, l’âge d’or de ces produits.
Des quelque 1 000 G$ de valeur qu’a atteints le marché des CDO à l’époque, les investisseurs n’ont récupéré que 10 %.
«Cela signale que les marchés n’offrent pas assez de rendement aux investisseurs», observe Maria Boyazny, présidente du gestionnaire MB Global Partners, de New York et spécialiste des dérivés de crédit.
De passage à Montréal en juin à l’occasion du Forum économique des Amériques, celle qui gère un actif de 4 G$ disait voir dans la réapparition des CDO synthétiques le signal que l’appétit du risque a réapparu chez certains investisseurs.
Elle remarque ainsi que les marchés assistent au retour de ces produits, qui avaient pratiquement disparu.
En outre, «ceux qui les ont conservés pour limiter leurs pertes recommencent à les écouler», poursuit la fondatrice de MB Global Partners.
Depuis 2008, l’effritement des écarts de crédit incite les investisseurs institutionnels à solliciter les grandes banques pour remettre ce type de produit au goût du jour.
Alors que les rendements de la dette corporative à long terme ont atteint un record de 9 % en octobre 2008, ils s’établissaient en juin 2013 à 2,6 %, relève l’agence de presse Bloomberg.
«Quand le risque sur le rendement atteint pratiquement zéro – ce qui arrive quand les bons du Trésor sont à 40 points de base, comme c’est le cas actuellement – le risque réel pour le rendement est négatif», explique Richard Ness, président du consultant Tactico, spécialisé dans les plateformes de négociation. Ainsi, ceux qui proposent des produits qui peuvent «mathématiquement atteindre 300 points de base ont la part belle».
Le hic, c’est qu’il faut alors composer avec des soubresauts qui vont de 15 % à la hausse ou à la baisse.
«Ce n’est pas le produit qui pose problème. La crise a été causée par des filous qui ont vendu ces produits à des gestionnaires extrêmement naïfs», poursuit Richard Ness, ancien président du défunt courtier remiseur Penson Canada.
«Nos produits reposent sur une meilleure divulgation des risques et de l’actif», soutient pour sa part Timothy Ryan Jr, directeur mondial chez J.P Morgan Chase.
Ce qui n’émeut pas Maria Boyazny. «Si un produit avait une note de F et qu’il obtient maintenant un C-, ce n’est pas nécessairement un bon produit», remarque la gestionnaire new-yorkaise.
D’ailleurs, Timothy Ryan concède que Moody’s n’a pas voulu coter le produit, qui sera structuré dès que des investisseurs auront été rassemblés en nombre suffisant.
Certains estiment que ce n’est plus un marché dynamique.
Denis Sénécal, ancien vice-président, Revenus fixes, chez State Street Global Advisor (SSgA) à Montréal, qui a déjà structuré des CDO, a remarqué lui aussi la réapparition de ces produits.
«Le marché est d’environ 10 à 20 % de ce qu’il était avant la crise», dit-il.
Il estime qu’un retour du marché serait une bonne chose, entre autres pour les petites sociétés qui ont besoin de financement et n’ont pas un crédit reluisant.
Cela dit, il pense que la situation actuelle n’est pas comparable à celle qui prévalait avant la crise.
«Le manque de confiance de certains gestionnaires envers ces produits les rend difficiles à vendre. En outre, plusieurs institutions interdisent les CDO structurés.»
Il y a donc un appétit «marginal» pour ce type de produit.
Denis Sénécal remarque cependant que le marché «est beaucoup plus discipliné, et que les produits que je vois sont beaucoup mieux structurés qu’en 2008».