La prochaine vague : les fonds indiciels ciblés
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Puis, comme dans tout bon fonds négocié en Bourse (FNB), on «automatise» la constitution et la gestion du portefeuille en fonction de certaines règles préétablies (reproduction d’un indice, notamment), de façon à abaisser le plus possible les frais de gestion.

Que la crème

«Vous pourriez appeler notre approche « super-beta »», dit Wesley Gray, chef de la direction d‘Alpha Architect, à Philadelphie, une firme fondée en 2010 qui gère des fonds indiciels ciblés.

«Chez la majorité des praticiens du beta judicieux, seulement une fraction de leur portefeuille est vraiment active, la fraction « judicieuse », poursuit-il. Nous, nous concentrons nos portefeuilles uniquement sur cette part « judicieuse ». Cela signifie que dans l’univers de 500 ou 700 titres qui correspondent à un facteur, par exemple, nous ne retenons que les 50 supérieurs.»

Dans de tels portefeuilles, la part active est survoltée. «Tous les titres sont coupables jusqu’à preuve du contraire», illustre le gestionnaire de portefeuille Patrick O’Shaughnessy, de O’Shaughnessy Asset Management.

C’est-à-dire que, contrairement aux fonds indiciels et FNB courants, le gestionnaire ne reproduit pas au départ l’ensemble d’un indice. Il part de zéro et compose son portefeuille en ajoutant les meilleurs titres qui représentent un facteur.

Le nom «indiciel ciblé» est d’ailleurs inapproprié ; le temps établira sans doute un nom définitif pour le secteur. Si on se fie au modèle des fonds d’Alpha Architect, ces portefeuilles ne reproduisent aucun indice.

C’est dire que «nous ne trouvons pas dans les marchés un indice satisfaisant auquel nous pouvons nous comparer», précise Wesley Gray.

Trop tôt pour les évaluer

Il est tôt pour évaluer la performance des fonds misant sur l’approche indiciel ciblé, car il y en a encore peu.

Un portefeuille de Patrick O’Shaughnessy a surpassé le S&P 500 annuellement en moyenne de 6,7 points de pourcentage. Mais il s’agit d’un portefeuille hypothétique, testé à rebours, concentré dans les 50 titres les moins chers et s’étalant sur la période de 1964 à 2015.

Les portefeuilles d’Alpha Architect affichent jusqu’ici des résultats mitigés, reconnaît Wesley Gray. «Au début (après le lancement en octobre 2014), nous obtenions un rendement de 15-20 % au-dessus du marché, dit-il. Mais nous avons heurté un mur.» Le fonds QVAL a sombré de 19,3 % de juin 2015 à juin 2016.

La volatilité est un des principaux handicaps d’un fonds indiciel ciblé, en raison du faible nombre de titres, reconnaît Wesley Gray. «Les fonds rebondissent de tous bords tous côtés, dit-il. C’est pourquoi nous devons bien informer nos clients. Écoutez, un fonds factoriel ne peut pas battre les marchés tout le temps !»

John Rekenthaler rappelle l’époque des fonds de valeur concentrés, dans les années 1990, et constate que leur performance n’a guère été impressionnante. Certains fonds concentrés, une dizaine, ont brillé, mais la plupart ont été assez décevants.

Il faut dire que ces fonds concentrés, à la différence de la nouvelle génération du «super beta», n’affichaient pas une couleur factorielle et n’étaient pas gérés selon des règles appliquées à la lettre. Une gestion «automatisée» devrait prévenir ce genre d’erreurs.

En tant que groupe, les fonds indiciels ciblés ne s’avéreront probablement pas supérieurs aux variétés de fonds indiciels, juge John Rekenthaler, tout comme dans l’ensemble, les fonds factoriels ne sont pas supérieurs aux fonds indiciels passifs qu’ils tentent de remplacer. Toutefois, «le temps des fonds ciblés est certainement arrivé», conclut-il.